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décor

La tempête s’était calmée, mais le vent était encore violent et la mer, haute et furieuse, battait la côte. D’immenses nuages, déchiquetés par le vent, filaient à toute vitesse au-dessus de nos têtes, laissant passer, par endroits, les rayons du soleil qui coloraient le paysage de nuances changeantes de vert, de mauve et de brun.

Auteur: May Peter

Info: L'île des chasseurs d'oiseaux

[ mouvant ] [ éléments naturels ]

 

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effet de serre

Début avril 2022, le Giec a publié le troisième volet de son sixième rapport. Ses membres ont bien fait les choses, ils ont réuni 239 scientifiques pour étudier 18 000 articles synthétisés en 2 913 pages. Le budget carbone restant est d'environ 325 Gt d'équivalent CO² (et de nombreuses actualisations revoient ce budget à la baisse) pour limiter le réchauffement à + 1,5°C. Mais la trajectoire du système Terre ne dépend pas seulement des décisions que prendront les successeurs de nos responsables politiques, elle résulte des décisions passées. Aujourd'hui, les infrastructures qui mobilisent des énergies fossiles émettrons environ 600 Gt d'équivalent CO² d'ici 2050 et, si nous ajoutons les émissions qui seront générées par les infrastructures en projet, on monte à 850 Gt. Ça veut dire quoi ? Ça veut dire que ça ne passe pas. Si nous voulons contenir l'emballement bioclimatique et garantir la vie humaine en société sur la Terre, non seulement nous devons décroître, mais en plus nous devons démanteler. Je n'y suis pour rien, c'est le réel.

Auteur: Wallenhorst Nathanaël

Info: Contenir l’emballement bioclimatique, 2025. Épistémologie des limites planétaires - Étape 4: juger la politique. - Redéfinir le lieu du débat politique - p. 62

[ prévisionnel ]

 

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interrogation

La question n'est pas de savoir si je souhaite devenir un héros, mais si j'en suis capable...

 

Auteur: Brugeas Vincent

Info: Daemon, tome 1 : Les vierges de Thessalie

[ introspection ] [ courage ]

 

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repères

J’aimerais qu’il existe des lieux stables, immobiles, intangibles, intouchés et presque intouchables, immuables, enracinés ; des lieux qui seraient des références, des points de départ, des sources. 

Auteur: Perec Georges

Info: Espèces d'espaces, GALILÉE, 1974

[ balises ]

 

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sécularisation

Louis XIV avait dégradé l'Église française en l'associant au culte de sa personne et en lui imposant l'obéissance même en matière de religion. Cette servilité de l'Église envers le souverain fut pour beaucoup dans l'anticléricalisme du siècle suivant.

Mais quand l’Église commit l’erreur irréparable d’associer son sort à celui des institutions monarchiques, elle se coupa de la vie publique. Rien ne pouvait mieux servir les aspirations totalitaires de l’État. Il devait en résulter le système laïque, prélude à l’adoration avouée de l’État comme tel en faveur aujourd’hui.

Les chrétiens sont sans défense contre l’esprit laïque. Car ou ils se donnent entièrement à une action politique, une action de parti, pour remettre le pouvoir temporel aux mains d’un clergé, ou de l’entourage d’un clergé ; ou bien ils se résignent à être eux-mêmes irréligieux dans toute la partie profane de leur propre vie, ce qui est généralement le cas aujourd’hui, à un degré bien plus élevé que les intéressés eux-mêmes n’en ont conscience. Dans les deux cas est abandonnée la fonction propre de la religion, qui consiste à imprégner de lumière toute la vie profane, publique et privée, sans jamais aucunement la dominer. 

Auteur: Weil Simone

Info: L'enracinement, Editions Gallimard, 1949, pages 153-154

[ historique ] [ impasse ] [ roi soleil ]

 

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étatisme

Sauf erreur, la notion d’État comme objet de fidélité est apparue, pour la première fois en France et en Europe, avec Richelieu. Avant lui on pouvait parler, sur un ton d’attachement religieux, du bien public, du pays, du roi, du seigneur. Lui, le premier, adopta le principe que quiconque exerce une fonction publique doit sa fidélité tout entière, dans l’exercice de cette fonction, non pas au public, non pas au roi, mais à l’État et à rien d’autre. Il serait difficile de définir l’État d’une manière rigoureuse. Mais il n’est malheureusement pas possible de douter que ce mot ne désigne une réalité. 

Richelieu, qui avait la clarté d’intelligence si fréquente à cette époque, a défini en termes lumineux cette différence entre morale et politique autour de laquelle on a semé depuis tant de confusion. Il a dit à peu près : On doit se garder d’appliquer les mêmes règles au salut de l’État qu’à celui de l’âme ; car le salut des âmes s’opère dans l’autre monde, au lieu que celui des États ne s’opère que dans celui-ci.

Cela est cruellement vrai. Un chrétien ne devrait pouvoir en tirer qu’une seule conclusion : c’est qu’au lieu qu’on doit au salut de l’âme, c’est-à-dire à Dieu, une fidélité totale, absolue, inconditionnée, la cause du salut de l’État est de celles auxquelles on doit une fidélité limitée et conditionnelle.

Mais bien que Richelieu crût être chrétien, et sans doute sincèrement, sa conclusion était tout autre. Elle était que l’homme responsable du salut de l’État, et ses subordonnés, doivent employer à cette fin tous les moyens efficaces, sans aucune exception, et en y sacrifiant au besoin leurs propres personnes, leur souverain, le peuple, les pays étrangers, et toute espèce d’obligation. […]

Son dévouement à l’État a déraciné la France. Sa politique était de tuer systématiquement toute vie spontanée dans le pays, pour empêcher que quoi que ce soit pût s’opposer à l’État. Si son action en ce sens semble avoir eu des limites, c’est qu’il commençait et qu’il était assez habile pour procéder graduellement. Il suffit de lire les dédicaces de Corneille pour sentir à quel degré de servilité ignoble il avait su abaisser les esprits. Depuis, pour préserver de la honte nos gloires nationales, on a imaginé de dire que c’était simplement le langage de politesse de l’époque. Mais c’est un mensonge. Pour s’en convaincre, il n’y a qu’à lire les écrits de Théophile de Viau. Seulement Théophile est mort prématurément des conséquences d’un emprisonnement arbitraire, au lieu que Corneille a vécu très vieux.

La littérature n’a d’intérêt que comme signe, mais elle est un signe qui ne trompe pas. Le langage servile de Corneille montre que Richelieu voulait asservir les esprits eux-mêmes. Non pas à sa personne, car dans son abnégation de soi-même il était probablement sincère, mais à l’État représenté par lui. Sa conception de l’État était déjà totalitaire. Il l’a appliquée autant qu’il pouvait en soumettant le pays, dans toute la mesure où le permettaient les moyens de son temps, à un régime policier. Il a ainsi détruit une grande partie de la vie morale du pays. Si la France s’est soumise à cet étouffement, c’est que les nobles l’avaient tellement désolée de guerres civiles absurdes et atrocement cruelles qu’elle a accepté d’acheter la paix civile à ce prix.

Auteur: Weil Simone

Info: L'enracinement, Editions Gallimard, 1949, pages 149-150

[ historique ] [ gouvernement ] [ critique ]

 

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idoles

L'État est une chose froide qui ne peut pas être aimée mais il tue et abolit tout ce qui pourrait l'être ; ainsi on est forcé de l'aimer, parce qu'il n'y a que lui. Tel est le supplice moral de nos contemporains.

C'est peut-être la vraie cause de ce phénomène du chef qui a surgi partout et surprend tant de gens. Actuellement, dans tous les pays, dans toutes les causes, il y a un homme vers qui vont les fidélités à titre personnel. La nécessité d'embrasser le froid métallique de l'État a rendu les gens, par contraste, affamés d'aimer quelque chose qui soit fait de chair et de sang. Ce phénomène n'est pas près de prendre fin, et, si désastreuses qu'en aient été jusqu'ici les conséquences, il peut nous réserver encore des surprises très pénibles ; car l'art, bien connu à Hollywood, de fabriquer des vedettes avec n'importe quel matériel humain permet à n'importe qui de s'offrir à l'adoration des masses. 

Auteur: Weil Simone

Info: L'enracinement, Editions Gallimard, 1949, page 148

[ dictature ] [ impersonnel ] [ compensation ]

 

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gouvernement

Ainsi il y a eu en France ce paradoxe d’un patriotisme fondé, non sur l’amour du passé, mais sur la rupture la plus violente avec le passé du pays. Et pourtant la Révolution avait un passé dans la partie plus ou moins souterraine de l’histoire de France ; tout ce qui avait rapport à l’émancipation des serfs, aux libertés des villes, aux luttes sociales ; les révoltes du xive siècle, le début du mouvement des Bourguignons, la Fronde, des écrivains comme d’Aubigné, Théophile de Viau, Retz. Sous François Ier un projet de milice populaire fut écarté, parce que les seigneurs objectèrent que si on le réalisait les petits-fils des miliciens seraient seigneurs et leurs propres petits-fils seraient serfs. Si grande était la force ascendante qui soulevait souterrainement ce peuple.

Mais l’influence des Encyclopédistes, tous intellectuels déracinés, tous obsédés par l’idée de progrès, empêcha qu’on fît aucun effort pour évoquer une tradition révolutionnaire. D’ailleurs la longue terreur du règne de Louis XIV faisait un espace vide, difficile à franchir. C’est à cause d’elle que, malgré les efforts de Montesquieu en sens contraire, le courant de libération du xviiie siècle se trouva sans racines historiques. 1789 fut vraiment une rupture.

Le sentiment qu’on nommait alors patriotisme avait pour objet uniquement le présent et l’avenir. C’était l’amour de la nation souveraine, fondé dans une large mesure sur la fierté d’en faire partie. La qualité de Français semblait être non pas un fait, mais un choix de la volonté, comme aujourd’hui l’affiliation à un parti ou à une Église.

Quant à ceux qui étaient attachés au passé de la France, leur attachement prit la forme de fidélité personnelle et dynastique au roi. Ils n’éprouvèrent aucune gêne à chercher un secours dans les armes des rois étrangers. Ce n’étaient pas des traîtres. Ils demeuraient fidèles à ce à quoi ils croyaient devoir de la fidélité, exactement comme les hommes qui firent mourir Louis XVI.

Les seuls à cette époque qui furent patriotes au sens que le mot a pris plus tard, ce sont ceux qui sont apparus aux yeux des contemporains et de la postérité comme les archi-traîtres, les gens comme Talleyrand, qui ont servi, non pas, comme on l’a dit, tous les régimes, mais la France derrière tous les régimes. Mais pour eux la France n’était ni la nation souveraine, ni le roi ; c’était l’État français. La suite des événements leur a donné raison.

Car, quand l’illusion de la souveraineté nationale apparut manifestement comme une illusion, elle ne put plus servir d’objet au patriotisme ; d’autre part, la royauté était comme ces plantes coupées qu’on ne replante plus ; le patriotisme devait changer de signification et s’orienter vers l’État. Mais dès lors il cessait d’être populaire. Car l’État n’était pas une création de 1789, il datait du début du xviie siècle et avait part à la haine vouée par le peuple à la royauté. C’est ainsi que, par un paradoxe historique à première vue surprenant, le patriotisme changea de classe sociale et de camp politique ; il avait été à gauche, il passa à droite.

Le changement s’opéra complètement à la suite de la Commune et des débuts de la IIIe République. Le massacre de mai 1871 a été un coup dont, moralement, les ouvriers français ne se sont peut-être pas relevés. Ce n’est pas tellement loin. Un ouvrier âgé aujourd’hui de cinquante ans peut en avoir recueilli les souvenirs terrifiés de la bouche de son père alors enfant. L’armée du xixe siècle était une création spécifique de la Révolution française. Même les soldats aux ordres des Bourbons, de Louis-Philippe ou de Napoléon III devaient se faire une extrême violence pour tirer sur le peuple. En 1871, pour la première fois depuis la Révolution, si l’on excepte le court intermède de 1848, la France possédait une armée républicaine. Cette armée, composée de braves garçons des campagnes françaises, se mit à massacrer les ouvriers avec un débordement inouï de joie sadique. Il y avait de quoi produire un choc.

[…]

La IIIe République fut un second choc. On peut croire à la souveraineté nationale tant que de méchants rois ou empereurs la bâillonnent ; on pense : s'ils n'étaient pas là !... Mais quand ils ne sont plus là, quand la démocratie est installée et que néanmoins le peuple n'est manifestement pas souverain, le désarroi est inévitable. 

Auteur: Weil Simone

Info: L'enracinement, Editions Gallimard, 1949, pages 142 à 145

[ historique ] [ désillusion ]

 

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genèse

Je suis physicienne à l'Arizona State University, et je me consacre à une question fondamentale qui me passionne : comment la vie est-elle apparue sur Terre, et plus largement, quelle est la nature profonde du vivant ? Pour répondre à cela, je crois qu’il est essentiel de revisiter nos concepts à travers le prisme de la théorie de l’information et de la physique fondamentale.

Lorsque nous regardons la vie, il devient clair que son essence ne se limite pas à la simple chimie des molécules. Ce qui la caractérise profondément, c’est la manière dont l’information s’organise et s’auto-maintient dans des systèmes physiques complexes. Je compare souvent cela à l’étude des trous noirs en astrophysique : tout comme comprendre la gravité à travers les trous noirs a révolutionné la physique, je suis persuadée que la vie est là où l’information devient la plus dynamique, la plus dense, et surtout quand elle commence à influencer la dynamique même de la matière.

La question des origines de la vie se divise pour moi en deux grandes problématiques. D’une part, il y a les éléments historiques : quand et comment la vie a émergé sur notre planète ? Les archives fossiles les plus anciennes, comme les stromatolites, datent d’environ 3,8 milliards d’années, mais ces preuves demeurent fragmentaires et laissent beaucoup de zones d’ombre. D’autre part, il y a la question plus fondamentale et expérimentale : comment la vie émerge-t-elle à partir de la matière non vivante ? Cette interrogation est au cœur de mes recherches théoriques et propose de dépasser les simples modèles moléculaires pour saisir l’émergence de l’information vivante.

Tous les êtres vivants sur Terre partagent une biochimie universelle, avec des briques communes telles que l’ADN, les ARN, les ribosomes, et les protéines. Cette universalité témoigne d’un ancêtre commun unique, que nous appelons le dernier ancêtre commun universel, ou LUCA. Mais attention, ce LUCA n’était pas nécessairement un organisme isolé ; il s’agissait plutôt d’une communauté génétique où les échanges horizontaux entre différentes formes de vie brouillaient la notion même d’individualité. Cela m’amène à penser que, dès ses débuts, la vie était un phénomène collectif, écologique, et dynamique.

Je remets aussi en question la vision classique selon laquelle la vie a commencé par un événement isolé, par exemple l’apparition d’une molécule auto-réplicative ou d’une cellule protocellulaire. Je propose plutôt que la vie ait émergé comme un phénomène global, planétaire, inscrit dans les cycles géochimiques de la Terre primitive. Certaines voies métaboliques clés, comme le cycle de l’acide citrique (appelé aussi cycle de Krebs), ont pu naître spontanément à partir de réactions chimiques thermodynamiquement favorisées, avant même que les premières enzymes ne soient disponibles. Autrement dit, la vie a pu surgir de la physique du système Terre entière.

À mes yeux, les attributs conventionnels du vivant — métabolisme, reproduction, compartimentation — sont loin d’être des phénomènes isolés. Ils sont plutôt l’expression d’un principe fondamental unique : l’organisation et le transfert d’information. L’ADN, par exemple, n’est pas simplement une molécule porteuse de gènes ; c’est un support fiable de l’information qui structure et régule les cycles métaboliques. La vie devient un système où l’information structure la matière à différents niveaux, organisant les flux énergétiques et les interactions moléculaires pour maintenir un état loin de l’équilibre.

Enfin, je tiens à souligner que la définition même de la vie et la compréhension de son origine sont inextricablement liées. Une théorie unificatrice de la vie devrait pouvoir expliquer pourquoi et comment l’information acquiert ce rôle organisationnel unique dans les systèmes vivants, ainsi que les mécanismes par lesquels ce contrôle informationnel émerge. C’est un défi interdisciplinaire — conjuguant physique, biologie, chimie et écologie — mais c’est aussi une opportunité de repenser la vie non seulement comme un phénomène biologique, mais comme un phénomène informationnel planétaire et écologique.

Ces réflexions nous poussent à envisager la vie sous un nouvel angle : non plus seulement comme une collection de molécules, mais comme un système complexe d’informations qui modifient la matière et créent de nouvelles formes d’organisation. C’est cette vision renouvelée qui, je l’espère, nous aidera à comprendre les origines les plus profondes du vivant, ici sur Terre et peut-être ailleurs dans l’Univers.



 

Auteur: Walker Sara Imari

Info: https://complexity.simplecast.com/episodes/40/transcript - Gaïa est un système informationnel auto-organisé influençant la matière dans un cadre écologique et planétaire. Résumé synthèse : perplexity.ai

[ émergence du biotique ] [ réseau ] [  liaison ] [  portance ] [  trame ] [  enchevêtrement ] [  cadre ] [  tissage ] [ auto-organisation ]

 

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gender studies

La longue histoire de la structure appelée par Lacan Discours Capitaliste (qui a produit le capitalisme, et non l’inverse) conduit au déni de la dimension réelle du corps. Ce refus prend aujourd’hui, entre autres tournures, l’apparence de son envers, à savoir celle d’une glorification, d'une célébration du corps, qui est en fait sa camisole.

Le déni du réel du corps, c’est inévitablement, et d’abord, le déni de la dimension de la parole, structurée par la coupure qu’elle impose au parlêtre. Il en est sexué. Sexion. Coupure. Perte. Perte de jouissance, perte de sens, impossible à dire par-dessus le marché. C’est cette minoration qui fait la marque humaine. Elle est le lieu de notre puissance, qui est une puissance de l’en-moins. Or, l’idéologie dominante fait de cette minoration une simple déconvenue. Elle lui propose des solutions et des remèdes, faisant de notre condition un problème à résoudre, ou une maladie à soigner. C’est ainsi qu’à l’insaisissable Réel du sexe est aujourd’hui substitué l’Imaginaire normatif du genre.

Le genre tel qu’il est promu par ses études est bien une tentative de suture de la coupure qui fait le sexe. Il va de soi qu’elle demeure. Car la coupure nous est première. Elle est portée par le registre signifiant, qui est un déjà-là. La discontinuité qu’il impose instaure le registre de la différence, dont nous sommes les enfants. Plus encore que la condition de notre humanité, elle est celle de notre humanisation. Car pour nous, de totalité, point. C’est notre chance. Puisque, si cette entame fait le sexe, elle fait aussi la possibilité même du corps, de sa limite, de sa distinction, d’une jouissance propre à chacun en plus d’être propre à chaque sexe.

C’est là l’erreur logique invraisemblable (et commode) qui a fait prémisse à ces études (de genre), menées par les esprits les plus célébrés (ah, les pouvoirs de la fête…). C’est aussi la promesse complaisante qu’elle fait à nos narcissismes désespérés, en pointant le mirage technologique d’une retrouvaille avec la plénitude de l’être.

Mais homme et femme sont à jamais distants de leur être. Ils n’ont pas été séparés l’un de l’autre au départ d’une unité primordiale regrettée. Ils ne sont pas complémentaires, manquants l’un de l’autre. Ils sont les deux façons irrémédiables et distinctes de pâtir de la coupure, du manque structurel qui fait les êtres humains. Homme et femme sont les deux seules modalités d’un même ratage, d’une même totalité manquée, toujours-déjà manquante. Ils sont les deux expressions de l’en-moins humain. Et ces expressions s’appellent sexes.

Le sexe est bien, chez les êtres parlants, la conséquence de l’entame signifiante qui les causent. Ils en pâtissent (en jouissent), l’un et l’autre d’une façon radicalement autre. C’est sûrement pour ça qu’avec le sexe ça ne va pas, que ça ne va jamais. Le sexe est le lieu de la différence par excellence, le lieu de l’altérité la plus radicale. "Le sexe, c’est toujours l’autre sexe, même quand on y préfère le même." (Lacan).

Le discours dominant refuse le caractère définitif et insurmontable de cette différence (sexuelle). Il la surplombe et la suture d’un "tout possible", qui est une figure du "Tout possible".

Ainsi des dites études, qui escamotent la différence des sexes au profit d’une variété de genres.

S’engouffrent dans cette offre des sujets qui attendent pour beaucoup d’être, non pas pris en charge par une idéologie de la solution, mais entendus et restaurés dans la puissance de leurs limites, qui sont celles du sexe.

Il va de soi que ce programme se soutient d’un appauvrissement des possibilités de dire. Et pour tenter d’escamoter la coupure et ses conséquences, il faut un peu plus qu'une batterie d’artifices. Il faut en passer par une sape de la dimension de la parole. Si nous reconnaissons, par la psychanalyse notamment, que la sape de la parole coïncide nécessairement avec celle du Nom-du-Père, nous ne pouvons pas nous étonner de voir certains taux de natalité décroître. La déliquescence du langage et la sape du Père ne sont pas les conséquences de cet affaiblissement. Elles en sont les moyens.

Notre fécondité et notre puissance d’insémination sont affaire de désir. La biologie n'y suffit pas.

Logos spermatikos. C’est la parole qui s’insémine.

Affaiblir la parole, c’est nuire à l’espèce.

Se reproduire, c’est, pour les humains, recevoir et transmettre, bon gré mal gré, ce principe créateur, celui de la coupure qu’a toujours déjà opéré le signifiant, celui de la coupure portée par la parole, celui de la sexion. Se reproduire, c’est, pour les humains, transmettre non le genre, mais le sexe.

Auteur: Piquion Alexandre

Info: Publication facebook du 23 juillet 2025

[ critique ] [ castration ] [ fantasme d'unification ] [ sexuation ] [ indifférenciation ] [ reproduction ]

 

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