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incarnation

Par l’opus creationis toutes choses existent en dehors de Dieu, mais ordonnées à sa contemplation. Cette ordonnation brisée, il "ne reste plus" à Dieu qu’à entrer Lui-même, en personne, dans cette extériorité cosmique, afin de la ramener vers Lui, afin de la retourner vers sa Face. Cette sortie, cet exode, cet anéantissement de Dieu, c’est ce que saint Paul appelle la kénôse : "Jésus Christ, Lui qui, subsistant en la forme de Dieu, n’a pas considéré son égalité avec Dieu comme un bien jalousement tenu, mais s’est anéanti Lui-même (ékénôsen, littéralement s’est vidé) prenant la forme d’esclave" (Phi 2, 6-7). Cependant cette sortie est en vue d’une entrée, cet exode en vue d’un retour, cet anéantissement en vue d’une exaltation, cette kénôse en vue d’une métanoïa. Car, nous dit Jésus en saint Luc (5,53) : "Je suis venu appeler les pécheurs à la métanoïa", au retournement d’être, de connaissance et d’amour.

Auteur: Borella Jean

Info: Le sens du surnaturel, L'Harmattan, 1997, page 151

[ théologie chrétienne ] [ kénose ] [ Fils ] [ étymologie ] [ définition ]

 

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post-lapsaire

Ainsi se vérifie une loi, qui vaut pour toutes les créatures, visibles ou invisibles, paradisiaques ou tombées, c’est que la nature doit être réalisée, il faut devenir ce que l’on est. La différence entre l’état adamique et l’état post-adamique, c’est que la grâce surnaturelle de cette réalisation est donnée à Adam immédiatement avec sa nature, tandis qu’elle n’est conférée aux hommes déchus que par le baptême, c’est-à-dire par la participation sacramentelle à la mort du Médiateur.

Mais, même conférée à l’être adamique dès le premier instant de sa création, cette grâce surnaturelle est amissible, puisqu’elle ne peut être reçue que par le consentement de la liberté, et donc qu’elle peut être refusée.

Ce qui est perdu, parce que refusé, c’est la grâce immédiatement donnée à la nature. Ce qui en résulte, c’est donc un état de nature nue, de nature dépouillée : "ils virent qu’ils étaient nus", nous dit la Genèse de nos premiers parents après la chute. Mais cet état de nature nue n’est pas notre état "naturel".

Auteur: Borella Jean

Info: Le sens du surnaturel, L'Harmattan, 1997, pages 148-149

[ condition humaine ] [ théologie chrétienne ] [ déiformité ]

 

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charité

C’est par elle seule que l’homme atteint la perfection, c’est par elle aussi, et par le don de sagesse qui en est inséparable, qu’a lieu la véritable contemplation. C’est par elle seule que l’Esprit peut régner parmi les hommes. Voilà le point capital sur lequel nul accord n’est possible avec l’intellectualisme absolu et l’ésotérisme hindou.

Auteur: Maritain Jacques

Info: Une heure avec Ferdinand Ossendowski, Publié dans Les nouvelles littéraires du 26 juillet 1924

[ vertu théologale ] [ orient-occident ] [ différence ]

 

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orient-occident

En cela [la pure contemplation] la religion jaune reste fidèle à l’une des plus profondes vérités de l’ordre spirituel. Et certes, ils ont raison de reprocher à notre civilisation son matérialisme, et sa dissipation dans l’activité extérieure. Si l’Europe est dans les affres où nous la voyons, c’est qu’elle a failli à sa mission. Mais ce n’est pas d’eux qu’elle doit recevoir l’initiation aux choses de l’esprit. Il lui suffit de revenir à sa plus authentique tradition, qui, à bien meilleur titre que la tradition orientale, affirme la prééminence de la sagesse et de la contemplation.

Auteur: Maritain Jacques

Info: Une heure avec Ferdinand Ossendowski, Publié dans Les nouvelles littéraires du 26 juillet 1924

[ bouddhisme ] [ lamaïsme ]

 

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raison naturelle

Dieu est connu naturellement au moyen des images de ses effets.

Auteur: Saint Thomas d'Aquin

Info: Somme théologique, I, q.12, a.12

[ connaissance ] [ monde sensible ] [ représentations ]

 

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théologie chrétienne

Le désir naturel de la créature raisonnable est de savoir toutes ces choses dont la connaissance constitue la perfection de l’intellect : ce sont les genres et les espèces des choses, et leurs essences. Cela, tout élu voyant l’essence divine le verra. Quant à connaître les singuliers autres que lui-même, et leurs pensées et leurs actions, cela n’est pas requis par la perfection de l’intellect, et son désir naturel ne s’étend pas à cela, et pas davantage à connaître les choses qui n’existent pas, mais que Dieu pourrait faire. Si cependant, Dieu seul était vu, lui qui est la source et le principe de tout l’être et de toute la vérité, il comblerait le désir naturel de savoir de telle façon qu’on ne chercherait rien d’autre et qu’on serait bienheureux.

Auteur: Saint Thomas d'Aquin

Info: Somme théologique, I, q.12, a.8

[ unité-multiplicité ] [ béatitude ] [ surnaturel-naturel ]

 

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théologie chrétienne

"Comprendre" a deux sens. L’un, strict et propre, exprimant l’inclusion de l’objet dans le sujet qui comprend. Ainsi, Dieu n’est compris d’aucune manière, ni par un intellect ni autrement, car, infini, il ne peut être inclus dans rien de fini, ce qui ferait que quelque chose de fini l’envelopperait infiniment, comme il est infini lui-même. Or c’est en ce sens que nous parlons de "comprendre". Mais ce mot peut avoir un autre sens, plus large, suivant lequel la compréhension est opposée à la quête. En effet, celui qui atteint quelqu’un, le tenant désormais, est dit le saisir (comprehendere). C’est ainsi que Dieu est compris par les élus, selon ce mot du Cantique (3, 4) : "Je l’ai saisi, je ne le lâcherai pas." Et tel est le sens des formules employées par l’Apôtre. La "compréhension" est alors un des trois dons de l’âme bienheureuse, correspondant à l’espérance comme la vision correspond à la foi, et la jouissance à l’amour de charité. Parmi nous, tout ce qui est vu n’est pas pour cela tenu et possédé ; car on voit bien des choses à distance, bien des choses qui ne sont pas en notre pouvoir. Nous ne jouissons pas non plus de tous les biens que nous avons, soit parce qu’on n’y trouve pas de plaisir, soit parce qu’ils ne sont pas la fin ultime de notre désir, capables d’assouvir le désir et de l’apaiser. Mais en Dieu, les élus ont ces trois choses : car ils voient Dieu ; le voyant ils le tiennent présent, parce qu’il est en leur pouvoir de le voir sans cesse, et en le tenant ils en jouissent, comme de la fin ultime qui comble le désir.

Auteur: Saint Thomas d'Aquin

Info: Somme théologique, I, q.12, a.7

[ limites humaines ] [ définition ] [ béatitude ] [ créature-créateur ]

 

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réflexivité

A partir d'un certain âge, on se met à relire. Pendant le confinement, nous avons fait le tour de nos bibliothèques, petites ou grandes, interrogeant les volumes parfois empoussiérés comme réservoir de relectures potentielles.

Si lire engage une riche expérience du temps, relire démultiplie encore cette exploration car, en plus des strates déjà évoquées, on aura tantôt à faire à la personne devenue inconnue qui fit la première lecture - ainsi que, parfois, à quelques traces de cette lointaine époque (un surlignement brutal, des marginalia, un numéro de téléphone fixe...) tantôt à celui ou celle que l'on est devenu, lecteur ou lectrice d'un autre livre. La grande joie des relectures tient dans cet effet de surprise : c'est dans le même qu'est le différent !


Auteur: Loyer Emmanuelle

Info: L'impitoyable aujourd'hui

[ instabilité ] [ diachronique ]

 

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chronos

Ivo Andric épouse cette même poétique aquatique de l'écume et des profondeurs, dans les termes exacts employés par Braudel, mais lui a troqué la mer pour la rivière : " Le rapport entre la durée et la longueur d'une vie d'homme est le même rapport que le rapport entre la surface agitée, mouvante et rapide de la rivière et son fond permanent et stable dont les modifications sont lentes et imperceptibles. "

Auteur: Loyer Emmanuelle

Info: L'impitoyable aujourd'hui

[ temps ] [ fugace surface ] [ stable profondeur ]

 

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topologisation sémantique

Au fond, nous autres littéraires ne sommes pas très à l’aise avec l’impératif de contextualisation. Il semble que nous comprenions sa nécessité, sans pour autant nous reconnaître dans l’injonction à la " mise en contexte " lorsqu’elle nous vient d’autres disciplines. Par " nous autres ", j’entends ici les littéraires scrupuleux, frottés de sciences sociales, conscients de l’historicité de leur objet, et pas toujours certains de sa dignité – non bien sûr ces littéraires complaisamment caricaturés par les sociologues comme des amoureux des textes, aveugles aux variations historiques, aux logiques de champ et à l’arbitraire des conventions. Cette difficulté est éminemment politique – en un sens superficiel d’abord, car il s’agit au fond de se situer entre une perspective " de droite " et une autre " de gauche " : entre une approche conservatrice et essentialiste, qui saisit la littérature comme un corpus de textes eux-mêmes conçus en termes de valeur, et une approche critique qui insiste sur le caractère historique et construit de cette valeur, voire sur sa participation à des logiques de domination. Difficulté politique dans un sens plus profond également, car la contextualisation est une opération politiquement très ambivalente : la mise en contexte est en effet souvent présentée comme un geste relativiste, qui menace de dissoudre l’intégrité des objets dans leur environnement ; en un autre sens pourtant, elle témoigne aussi d’un confort intellectuel qui, au prétexte que les objets doivent être saisis dans leur espace d’origine, refuse leur actualisation et les décharge de leur potentiel d’effraction et de subversion. Telle est l’ambivalence, peut-être indépassable, de toute contextualisation : toujours présentée comme un rappel visant à prévenir la dérive herméneutique et à circonscrire l’espace d’une interprétation légitime, elle oscille entre le geste éminemment critique, voire corrosif, et l’opération subrepticement conservatrice, qui prémunit et protège le présent en refusant d’étendre la pertinence des objets du passé au-delà de ce passé.

Auteur: Debaene Vincent

Info: Le contexte : pour et contre. Études littéraires et anthropologie

[ intégration ] [ dualité orthogonale ] [ positionnement diachronique ] [ référencement ] [ polygonation onomasiologique ]

 

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