Dès l'adolescence, la question de Dieu, de sa réalité ou de son absence, imprègne toutes mes pensées. Obsédé par le désir d'une connaissance claire et certaine du divin, j'entame une quête personnelle marquée tout autant par la raison que par la souffrance. C'est un épisode profond d'angoisse et de dépression, résolu non par la grâce mais par la science — en l'occurrence la chimie d'un médicament — qui me conduit soudain à une révélation bouleversante : et si dans la guérison, il n'y avait aucune trace du surnaturel ? Si Dieu, ou plutôt la propension à croire en Dieu, était tapie dans la fabrique intime de nos cerveaux, travaillant silencieusement à travers nos angoisses, nos peurs de la mort, nos aspirations à l'absolu ?
Aucune certitude ne nous est offerte sur la réalité du monde extérieur, car, guidé par une méfiance kantienne, je sais que nous ne pouvons connaître que nos percepts, nos constructions mentales ; et parmi elles, Dieu n'est qu'un concept issu de notre propre esprit. Devant l'absence de signes tangibles, je décide alors de porter ma foi non sur une instance transcendante mais sur la méthode scientifique, convaincu que la nature, au travers de l'évolution, a façonné chacune de nos caractéristiques, jusque dans nos penchants métaphysiques les plus profonds.
C'est donc par le biais de la biologie, de la neuropsychologie et de l'anthropologie que j'explore l'origine du sentiment religieux. J'avance une proposition audacieuse : l'expérience du sacré n'est pas une fenêtre ouverte sur l'ailleurs, mais le témoignage d'une adaptation inscrite dans notre code génétique. Il s'agit d'un mécanisme neurophysiologique : nous sommes, par la nécessité de survivre à l'épouvante de notre condition mortelle, " câblés " pour percevoir une réalité spirituelle et croire aux forces qui transcendent nos frontières physiques et biologiques. La foi, loin d'être un don divin, devient ainsi un simple produit de la sélection naturelle. Elle permet à l'espèce humaine de soutenir la conscience terrifiante de sa propre finitude, de maintenir un équilibre psychique face à l'angoisse du néant.
J'analyse la succession des phénomènes spirituels — prières, conversions, extases, glossolalies, expériences de mort imminente, sentiment moral — comme autant de manifestations d'un " gène spirituel ", une fonction biologique héritée. Le sentiment d'unité avec l'univers, la dissolution de l'ego — cette sensation d'être absorbé dans un tout, apaisant notre détresse existentielle — s'explique par la prise en charge d'un " centre de contrôle " (l'ego) submergé à l'idée de sa propre impuissance. Pour cette raison, l'enfant, initialement initié de conscience réflexive, vit encore dans cet état fusionnel, que le croyant adulte tente de retrouver dans l'expérience mystique.
Ce n'est pas tant le contenu des croyances qui importent à l'espèce mais leur fonction stabilisatrice, leur pouvoir d'apaiser les peurs les plus archaïques – la mort, l'absurde, la solitude radicale. L'évolution aurait sélectionné ce trait singulier chez Homo sapiens : la capacité à tisser du sens là où il n'y en a pas, afin de préserver la santé mentale du groupe.
Face à l'évidence neuropsychologique, puis-je pour autant affirmer que Dieu n'existe pas ? La réponse bien évidemment m'échappe. Car, tout en croyant avoir démontré que l'appel vers une transcendance n'est qu'un artefact biologique, je ne puis exclure que, cachée derrière la mécanique du cerveau, une dimension transcendantale existe, en deçà de la portée de nos méthodes rationnelles. Je m'attache donc aussi à la puissance symbolique de Dieu : une production de la raison, un objet du désir, un repos pour des cœurs en quête de sens.
Mon livre n'est donc pas un plaidoyer pour ou contre la foi mais un plaidoyer pour l'intelligence scientifique, une invitation à comprendre comment, inlassablement, notre cerveau fabrique du divin. J'offre ainsi quelques éléments de réponse au " comment " et non pas au " pourquoi ", croyant reconnaître, dans cette pulsion spirituelle, un miroir de l'espèce humaine, né de la nécessité vitale d'une survivance à elle-même.
Ce résumé synthétise à la fois la dimension introspective du récit, l'argument de la thèse neurobiologique que je défends, et la tension irrésolue entre réductionnisme scientifique et mystère du transcendant.
Années: 196? -
Epoque – Courant religieux: Récent et libéralisme économique
Sexe: H
Profession et précisions: diplômé en philo de l'université SUNY Stony Brook, a oeuvré comme électricien en Angleterre, assistant photographe à NYC, prof d'histoire en primaire, passeur de camions en Afrique, tuteur aux Philippines et scénariste en Allemagne.
Continent – Pays: Amérique du nord - Usa