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créature-créateur

Participer et être causé sont une seule et même chose. Dire que l’être créé est de l’être participé, c’est dire qu’il est l’effet propre de l’Être non causé, qui est Dieu. C’est pourquoi Saint Thomas [d'Aquin] passe si fréquemment, et sans articuler le mouvement de passage, des idées d’être par soi et d’acte pur d’être, à celles de cause de tout être, d’être causé et d’être par mode de participation. En pareil cas, Saint Thomas est vraiment chez lui, au cœur de sa citadelle métaphysique et théologique. C’est en ce nœud de notions premières qu’on découvre le sens du principe sans cesse allégué par lui, que "ce qui est par autrui se réduit, comme à sa cause, à ce qui est par soi". En même temps on voit que la notion d’être par autrui, ou par une cause, coïncide avec celle d’être per modum participationis. Enfin, on voit avec évidence le lien qui rattache la notion d’être créé, ou participé, à la notion thomiste de Dieu, acte pur d’être "Car il faut poser un étant (ens) qui soit son être même (ipsum suum esse) ; et cela se prouve, car il faut qu’il y ait un premier étant, qui soit acte pur et en qui ne se trouve aucune composition. Il faut donc que soient par cet être unique tous les autres, qui ne sont pas leur être, mais ont l’être par mode de participation".

Auteur: Gilson Etienne

Info: Introduction à la philosophie chrétienne, Vrin, 2011, page 151

[ cause-effet ] [ équivalence ] [ christianisme ]

 

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créature-créateur

On ne célèbrera donc jamais assez la gloire des essences, miroirs où se reflète en une infinité de modes divers la perfection simple d’un Acte pur d’être qui les transcende. Leur intelligibilité, leur ordre, leur bonté et leur beauté sont ceux de tout univers créé, actuel ou possible. Le propre de l’essence, mode fini de participation à l’être, est de rendre possible l’existence d’une natura rerumi qui ne soit ni le néant ni Dieu. C’est pourquoi nous la présentions comme la condition ontologique de la possibilité même d’une réalité non-divine. Conquis sur le néant par la libre volonté du créateur, un tel univers se compose d’étants, qui ne sont ni essences sans existence, ni existences sans essences, mais plutôt, actes d’être mesurés par les essences auxquelles eux-mêmes confèrent l’existence. […]

Faut-il désigner d’un nom ce genre de métaphysique ? Mais ce n’est pas un genre de métaphysique, c’est la métaphysique même à la pointe extrême de pénétration dans la nature de l’être. De toute manière, on ne pourrait la nommer ni un essentialisme (de l’essence sans l’être), ni un existentialisme (de l’être sans l’essence) ; pour lui trouver un nom, il faudrait l’appeler un "ontisme", ce qui n’avancerait pas à grand-chose, puisque le sens du nom serait simplement : philosophie de l’être. En effet, tout est, soit l’être de Qui Est, soit le mode d’être d’un étant mesuré par son essence et créé par l’efficace divine […]. 

Auteur: Gilson Etienne

Info: Introduction à la philosophie chrétienne, Vrin, 2011, pages 183-184

[ métaphysique de l'être ] [ christianisme ] [ irréductibilité réciproque ]

 

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christianisme

On a pourtant entendu dire de la théologie scolastique en général qu’elle était nuisible à la vérité chrétienne, parce qu’elle substitue la raison à la foi, la philosophie à la révélation, l’orgueil du savoir à la charité et à la piété qui sauvent. […] Chercher les origines de cette erreur serait œuvre de longue haleine et, de toute manière, les conclusions en resteraient incertaines. Notre petit livre se propose simplement de mettre en évidence la vérité contraire, savoir, que la théologie de Saint Thomas d’Aquin, loin d’exclure toute spiritualité, en est une.

Ceci devrait être évident de soi. La théologie d’un théologien digne de ce nom ne peut être autre chose que le mouvement même de son intellect et de son amour cherchant la vérité sur Dieu dans l’enseignement de l’Ecriture Sainte et dans la considération de ses œuvres. Telle est la théologie de Saint Thomas d’Aquin. Il est vrai que sa rigueur technique et l’extrême abstraction de ses notions fondamentales la rendent d’accès difficile à tous, et pratiquement impossible à certains, mais cette difficulté n’en altère ni l’objet ni le sens. Rien n’autorise à penser que ce sens, qui est celui d’un intellectus fidei, soit inaccessible à des esprits capables d’en comprendre les termes. Quand bien même la sécheresse et la complication des justifications techniques les rebuteraient, la lumière de vérité qui éclate d’elle-même aux esprits devrait leur être en quelque mesure perceptible dans les formules où elle s’exprime.

Auteur: Gilson Etienne

Info: Introduction à la philosophie chrétienne, Vrin, 2011, page 30

[ défense ] [ critiques ] [ résumé ] [ éloge ] [ catholicisme ]

 
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théologiens chrétiens

Venu après lui, il [Duns Scot] ne croit pas pouvoir le [Saint Thomas d’Aquin] suivre. Qu’est-ce que cet esse thomiste, qui s’ajouterait au réel pour le faire être, comme si ce qui est avait encore besoin qu’on le fasse exister ? Je ne comprends pas, dit Duns Scot. En effet, pour lui, l’être est l’essence même, et puisque l’essence est l’être, elle ne supporte aucune addition : nullum esse dicit aliquid additum essentiae. Ainsi pensent encore les scotistes. Et pourquoi les combattre ? […] Pourquoi le Scotiste accepterait-il de remplacer une notion éminemment satisfaisante pour l’esprit par une que ceux mêmes qui la proposent tiennent pour difficile à concevoir ? Sans doute, il y a des difficultés, car le réel proprement dit n’est pas l’essence, mais l’individu, et il y a dans l’individu plus que l’essence. Comment, à partir de l’essence, expliquer l’individualité ? La réponse est connue et l’école scotiste se fait souvent gloire du sens aigu de l’individuel dont elle fait preuve. Et à bon droit, mais l’heccéité n’occupe dans le scotisme une telle place que parce qu’il faut beaucoup s’efforcer pour lui en trouver une. C’est la difficulté d’expliquer l’individu à partir de sa propre notion de l’être qui a fait du scotisme une métaphysique de l’individuel. Salutaire avertissement à tant de thomistes qui confondent individuation et individualité, car si la métaphysique de l’esse n’expliquait pas l’individualité mieux encore que celle de l’essence, il y aurait lieu de la réviser. […] L’esse, qui n’est pas le principe d’individuation, est l’acte premier de toute individualité, et il est bon de s’en souvenir.

Auteur: Gilson Etienne

Info: Introduction à la philosophie chrétienne, Vrin, 2011, pages 98-99

[ acte d'être ] [ question ] [ différence ] [ incomplétude ]

 

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métaphysique

[…] au sens propre des mots ens, ou étant, un être est quelque chose qui possède l’existence actuelle, c’est-à-dire l’esse, ou l’actus essendi. Ce quelque chose, sujet récepteur de l’acte d’être (esse), on le nomme l’essence. En conséquence, puisqu’il se compose d’un acte d’être limité par une essence, tout être autre que Dieu est fini par définition. Inversement, puisqu’il est l’acte pur d’être, l’esse même (ipsum esse) sans aucune essence qui le limite, Dieu est infini en vertu de sa notion même. Si donc tout étant est fini entant qu’il a l’acte d’exister, mais ne l’est pas, c’est la même chose de dire que Dieu est, qu’il est Qui Est, qu’il est parfaitement simple, qu’il est infini et situé au-delà de l’ens. Dieu est infini parce que sa simplicité est celle de l’acte pur d’esse, qui n’est ni ceci ni cela, mais est, absolument.

[…] après avoir observé que Dieu est au-dessus même de l’étant (ens), dont la notion implique finitude (habens esse), Saint Thomas nous laissera pourtant dire que Dieu est premier dans l’ordre de l’être, et suprêmement être (maxime ens). C’est que l’homme lui-même étant composé d’essence et d’esse, l’objet proportionné à l’intellect humain n’est pas l’esse pur, mais l’étant (ens), dont on vient de dire qu’il est toujours un acte d’exister déterminé et limité par une essence. Si tel est son objet propre, notre intellect est incapable de concevoir des objets d’espèce différente. Les objets matériels sont au-dessous de lui : ils lui échappent par le singulier de leurs déterminations matérielles mêmes ; l’exister pur est au-dessus de lui : il transcende l’intellect humain par l’infinité de son acte. Il ne reste qu’à tirer de ces prémisses la conséquence qu’elles impliquent : n’est saisissable pour notre intellect que ce qui a une quiddité, ou essence, participant à l’exister (esse) ; or la quiddité de Dieu est l’exister même (ipsum esse) ; Dieu est donc au-dessus de l’intellect.

Auteur: Gilson Etienne

Info: Introduction à la philosophie chrétienne, Vrin, 2011, pages 72-73

[ définition ] [ créature-créateur ] [ limites ] [ connaissance humaine ] [ raison ] [ christianisme ] [ Eternel ]

 
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créature-créateur

Pour user du langage de Saint Thomas lui-même, "la procession de la personne divine est antérieure à la procession de la créature, et plus parfaite" (ST. I, 45, 6, 1). En effet, la personne divine procède en parfaite ressemblance avec son principe, mais la créature, en ressemblance imparfaite seulement. Il semble donc que les processions des personnes divines soient la "cause" de la procession des choses et qu’ainsi créer appartienne en propre à la personne.

Saint Thomas ne le niera pas, bien au contraire, mais il faut voir en quel sens cela est vrai. La Trinité est engagée tout entière dans l’œuvre de création, comme on le voit au langage même de l’Eglise dans le Symbole des Apôtres. Le chrétien croit au Père tout-puissant, créateur de toutes choses visibles et invisibles ; il attribue encore au Fils que tout ait été fait par lui, et enfin, au Saint Esprit, qu’il soit Seigneur et vivificateur ; c’est donc bien aux personnes qu’il appartient proprement de créer. Pourtant, si l’on y prend garde, les personnes opèrent ici en tant qu’elles incluent des attributs essentiels de Dieu, c’est-à-dire des attributs de l’essence divine, qui sont l’intellect et la volonté. Un artisan opère par le verbe intérieur que son entendement conçoit et par l’amour qu’a sa volonté pour l’objet de son opération. De même, en Dieu, le Père produit la créature par son verbe, qui est le Fils, et par son amour, qui est le Saint Esprit. C’est dire que les personnes divines nous renvoient ici à l’essence divine ; elles sont en effet créatrices en tant qu’elles en incluent deux attributs essentiels.

Remonter jusqu’à l’essence divine, qu’est-ce à dire ? En Dieu, l’essence est l’être même. Or, créer, c’est proprement causer, ou produire, l’être des choses (causare, sive producere esse rerum). […] "Créer appartient donc à Dieu selon son être, qui est son essence (creare convenit Deo secudum suum esse, quod est ejus essentia), et puisque l’essence est commune aux trois personnes, créer n’est pas propre à une personne, mais commun à toute la Trinité " (ST. 1, 45, 6).

Auteur: Gilson Etienne

Info: Introduction à la philosophie chrétienne, Vrin, 2011, pages 146-147

[ origine ] [ christianisme ] [ hiérarchie ]

 
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philosophie-théologie

On ne saurait assez admirer l’attitude de ces philosophes scolastiques, fort conscients d’avoir à leur disposition deux sagesses et qui trouvent si facile d’en départager les domaines. "La sagesse, ou science parfaite", dit l’un d’eux, "est double, l’une qui procède à la lumière surnaturelle de la foi et de la révélation divine, l’autre qui procède à la lumière de la raison naturelle. Celle-ci est la Philosophie, celle-là est la Théologie chrétienne, science surnaturelle en sa racine et en raison de ses principes. On définira donc la philosophie : la connaissance par les causes ultimes procédant à la lumière naturelle de la raison" [J. Gredt, Elementa philosophiae aristotelico-thomisticae, vol. 1, art. 1].

Ces paroles sont entièrement vraies et conformes à l’enseignement de Saint Thomas [d'Aquin] ; aucune difficulté ne surgit tant qu’on se tient sur le plan de la distinction formelle ; les obscurités s’accumulent au contraire si l’on prétend empêcher ces deux sagesses de cohabiter et de collaborer chez un même homme, dans un même esprit. De ce qu’enseigne la théologie, science surnaturelle en ses principes, la philosophie n'aura-t-elle rien à dire ? Et de ce qu’enseigne la philosophie, qui procède à la lumière de la raison naturelle, la théologie ne pensera-t-elle rien ? Saint Thomas, du moins, affirme exactement le contraire, car il ne maintient si fermement la distinction formelle des deux lumières et des deux sagesses que pour mieux leur permettre de collaborer, sans confusion possible mais sans faux scrupule, et intimement. […]

Le plus remarquable en ceci est qu’on veuille séparer révélation et raison pour satisfaire aux exigences d’une notion de la philosophie qui n’a jamais existé. Nul philosophe n’a jamais philosophé sur la forme vide d’une raison sans contenu. Ne penser à rien et ne pas penser, c’est tout un. Que l’on ôte par la pensée tout ce qu’il y a de proprement religieux dans les grandes philosophies grecques de Platon à Plotin, puis ce qu’il y a de proprement chrétien dans la spéculation philosophique de Descartes, de Malebranche, de Leibniz, même de Kant et de certains de ses successeurs, l’existence de ces doctrines devient incompréhensible. 

Auteur: Gilson Etienne

Info: Introduction à la philosophie chrétienne, Vrin, 2011, pages 115-116

[ complémentarité ] [ champs catégoriels distincts ] [ foi-raison ] [ christianisme ]

 

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acte d'être

[…] admirons comment cette philosophie chrétienne s’approfondit comme philosophie à mesure qu’elle se fait plus chrétienne, car il n’y a rien de ce que la créature est ou fait qui ne soit en elle une ressemblance divine, mais ce que la créature fait de plus noble, après être, c’est de vouloir ressembler à Dieu en causant comme lui d’autres êtres. […]

Ceci est éminemment vrai de l’homme, à travers qui toutes choses sont ordonnées vers Dieu, mais ce l’est aussi d’une vérité tout à fait générale, car toutes choses, même les natures dénuées de connaissance, tendent en fait vers Dieu par leurs opérations. Dans un monde ainsi fait, la poursuite des fins propres coïncide avec celle de la fin suprême et tout être cherche la béatitude en cherchant son propre bonheur. L’homme seul est capable de savoir qu’il le fait, mais c’est ce qu’il fait même s’il n’a pas conscience de le faire. Tel est cet "amour physique" de Dieu dont s’inquiètent seuls ceux qui ont perdu de vue ce qu’est une nature créée, imprégnée jusqu’en ses moindres fibres, et dans toutes ses opérations, de l’efficace divine qui l’habite et en qui elle a vraiment l’être, le mouvement et la vie.

[…] Tout être y est défini par son essence : l’homme même y est une nature dont la liberté se meut entre les limites fixées par les termes de sa définition : un être vivant dont le mode propre de connaître est la raison. D’autre part, l’objet propre de la liberté est d’assurer la réalisation de plus en plus parfaite de l’essence. Être un animal raisonnable, ce n’est pas simplement une définition, c’est un programme. De la naissance à la mort, chaque être humain doit travailler, selon ses possibilités individuelles, à devenir de plus en plus ce que serait un être connaissant et agissant en tout selon les lumières de la raison. Et non seulement pour lui-même, mais aussi bien pour la cité, puisque la destinée que lui impose sa nature d’être connaissant ne peut s’accomplir qu’en communion avec d’autres êtres raisonnables, cherchant, comme lui-même, à s’actualiser le plus parfaitement possible dans l’ordre de l’Être et du bien.

Auteur: Gilson Etienne

Info: Introduction à la philosophie chrétienne, Vrin, 2011, pages 197-199

[ image ] [ perfectionnement ] [ participation spirituelle ] [ puissance-acte ] [ zoon politikon ] [ actualisation ]

 
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métaphysique de l'être

[…] l’être créé tend vers la ressemblance divine du fait seul qu’il opère, et comme il ne peut opérer sans causer, il tend à ressembler à Dieu par là même qu’il est cause de ses actes, mais plus encore en ce qu’il est cause d’autres êtres. La doctrine découvre ici l’ensemble de son économie : un Dieu qui est le pur acte d’être ; à qui, comme effets d’un tel Dieu, il convient éminemment de causer à leur tour d’autres êtres. Le Dieu chrétien n’est pas un créateur qui crée des créateurs, mais il est un créateur qui crée des causes efficientes.

Toutes les difficultés accumulées par les philosophies modernes, et même déjà par certaines philosophies et théologies médiévales, autour de la notion de cause efficiente, ont ici leur origine. Depuis Saint Augustin et Saint Bonaventure jusqu’à Malebranche et sa nombreuse école, on observe chez beaucoup de maîtres chrétiens une certaine méfiance à l’égard de cette notion. Il n’y a pas de conception de l’efficience qui n’y voie, en un certain sens, une causalité de l’être. Or, causer l’être de l’effet, n’est-ce pas dangereusement semblable à ce que ce serait que de le créer ? De là les palliatifs imaginés par certains philosophes et théologiens pour éviter d’attribuer à la créature le mode de causalité propre au Créateur. Les "raisons séminales" d’Augustin et de Bonaventure, les "causes occasionnelles" de Malebranche, autant de doctrines destinées à sauver les apparences d’une causalité efficiente démunie d’efficience proprement dite. Mais Hume ne s’y est pas trompé et le scepticisme qu’on lui reproche, d’ailleurs à bon droit, témoignait chez lui d’un certain sens du mystère qui fait parfois défaut à ses adversaires. Car ils ont raison de maintenir contre lui la réalité et la certitude de la relation de cause efficiente à effet causé, mais ils se trompent s’ils espèrent la réduire à une relation purement analytique de principe à conséquence. Dans un univers où le prototype de l’efficace causale est un acte créateur, la notion de cause efficiente reste enveloppée d’une zone de mystère, car elle-même n’est pas un mystère, mais elle est l’analogue de l’acte mystérieux entre tous par lequel Qui Est a librement causé des êtres. 

Auteur: Gilson Etienne

Info: Introduction à la philosophie chrétienne, Vrin, 2011, pages 195-196

[ précautions ] [ prudence ] [ analogie ]

 

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métaphysique de l'être

Si l’on posait Dieu dans l’ordre de l’essence, fût-ce même à son sommet, il deviendrait extrêmement difficile, pour ne pas dire impossible, de trouver hors de Dieu une place pour le monde des créatures. On ne peut rien ajouter à l’infini, ni rien en soustraire, si bien qu’à la parole de Leibniz "il n’y a qu’un Dieu, et ce Dieu suffit", on pourrait joindre cette remarque : et il se suffit. Mais nous partons ici de la notion d’un Dieu entièrement transcendant à l’ordre des essences, qui inclut la totalité des créatures, d’où l’on peut inférer qu’aucun problème d’addition ou de soustraction ne se posera entre lui et les étants qu’il crée. […]

Il reste donc à chercher comment l’essence peut venir de ce qui transcende l’essence en l’absorbant dans l’être. Certain philosophe d’aujourd’hui a reproché aux métaphysiciens d’autrefois de s’être attardés autour du problème de l’étant (das Seiende) sans aborder franchement celui de l’être (das Sein). Il se peut que nous méconnaissions le sens exact du reproche, car la vérité nous semblerait plutôt que les métaphysiques les plus profondes, de Platon à Thomas d’Aquin et au-delà jusqu’à notre propre temps, aient senti le besoin de dépasser le plan de l’essence pour atteindre celui de la source et cause de l’essence. Quoi qu’il en soit des autres, la métaphysique de l’esse constitue le cas typique d’une ontologie qui refuse expressément de s’en tenir au niveau de l’étant et pousse jusqu’à celui de l’être où l’étant prend sa source. Il est vrai qu’une fois là, le métaphysicien évite bien rarement de parler de l’être autrement que dans le langage de l’étant, mais ceux qui le lui reprochent font exactement la même chose. […] L’entendement n’a qu’un langage, qui est celui de l’essence. De l’au-delà de l’essence, on ne peut rien dire, sinon qu’il est et qu’il est la source de tout le reste, mais il est nécessaire de le savoir et de le dire, car prendre l’essence pour l’être est une des causes d’erreur les plus graves qui menacent la métaphysique. L’extrême pointe de la réflexion du métaphysicien est atteinte au moment où l’étant ne lui est plus concevable que comme une participation de l’être, lui-même insaisissable autrement qu’engagé dans l’essence de l’étant dont il est l’acte. 

Auteur: Gilson Etienne

Info: Introduction à la philosophie chrétienne, Vrin, 2011, pages 162-164

[ limitation du langage ] [ objection ] [ réfutation ]

 

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