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homme-femme
Elle laissa la lumière éteinte, mit de la musique tout doucement et s’allongea sur le lit, en T-shirt et culotte, le visage vers la fenêtre. Quand Matthieu s’allongea près d’elle, tout habillé, elle se tourna vers lui sans dire un mot, il voyait ses yeux briller dans l’obscurité, il lui sembla qu’elle souriait d’un sourire frémissant et il entendait sa respiration lourde et profonde et il en était ému, il savait qu’il lui suffisait de tendre la main et de la frôler pour que quelque chose se passe, mais il ne pouvait pas, c’était comme s’il l’avait déjà abandonnée et trahie, la culpabilité le paralysait et il ne bougeait pas, se contentant de lui faire face et de la regarder dans les yeux jusqu’à ce que son sourire ait disparu et qu’ils se soient endormis tous les yeux. Il tenait à elle comme à sa possibilité la plus lointaine.
Auteur:
Ferrari Jérôme
Années: 1966 -
Epoque – Courant religieux: Récent et Libéralisme économique
Sexe: H
Profession et précisions: enseignant
Continent – Pays: Europe - France
Info:
Le sermon sur la chute de Rome, Actes sud, 2012, page 52
[
chastes
]
[
inexistante
]
[
abstraite
]
paysage
Les montagnes et la mer.
Le monde est dépourvu de beauté. Toute la beauté du monde n’est qu’une interprétation de notre esprit et, sans interprétation, il ne reste rien, rien d’autre qu’un amas sans couleur ni sens, le tas d’ordures dispersées au hasard. Toute trace d’esprit avait disparu du monde et les montagnes, et la mer, dévoilaient leur présence inerte et silencieuse. Antoine sentit sa gorge se serrer. Un sanglot convulsif crispa un instant ses lèvres et il se dit qu’il avait trop bu et qu’il était très fatigué. Bizarrement, l’idée de fatigue l’emplit d’une tristesse terrible, mais il ignora à cet instant que, installée à la faveur d’une pensée fortuite, la tristesse ne quitterait pas son âme.
Il regarda Batti lisant le journal, les sourcils froncés, comme s’il n’était pas en train de lire pour la centième fois les mêmes phrases pompeuses et idiotes, qui ne lui apprenaient rien et dont la seule fonction visible était de figer le langage dans une carapace de merde.
Auteur:
Ferrari Jérôme
Années: 1966 -
Epoque – Courant religieux: Récent et Libéralisme économique
Sexe: H
Profession et précisions: enseignant
Continent – Pays: Europe - France
Info:
Dans le secret, Actes sud, 2010, pages 16-17
[
mélancolie
]
[
insignifiance
]
[
réel
]
[
propagande
]
musique
- C’était pour le Vendredi saint, quand nous pleurons la mort de Notre-Seigneur Jésus avant de fêter sa résurrection. Les confrères chantent, ce jour-là, qui est pour eux un jour sacré entre tous, peut-être plus eu Noël que nous célébrerons bientôt. Ils chantent le psaume cinquante, Miserere mei Deus, en polyphonie, à quatre – ces quatre-là sont choisis par le prieur et c’est l’honneur de leur vie. Et sais-tu ce que j’ai entendu ?
- Non, dit l’enfant, plein de curiosité, dites-le-moi.
- Eh bien ! ils étaient quatre à chanter mais j’ai entendu, et tous les chrétiens réunis ce jour-là l’ont entendu comme moi, une cinquième voix…
- Est-ce possible ?
- Je l’ai entendue. Tu as confiance en ma parole ?
- Oui, oui, bien sûr.
- C’était une cinquième voix qui planait bien haut au-dessus des autres. Les confrères la nomment sa quintina. C’est une voix d’une pureté bien au-delà des capacités de l’homme, déchu et cependant pas tout à fait abandonné.
Auteur:
Ferrari Jérôme
Années: 1966 -
Epoque – Courant religieux: Récent et Libéralisme économique
Sexe: H
Profession et précisions: enseignant
Continent – Pays: Europe - France
Info:
Dans le secret, Actes sud, 2010, pages 48-49
[
accord
]
[
note miraculeuse
]
bilan
Il revoyait la naissance de sa fille. Il se rappelait sa fierté. Il n’avait pas de souvenirs de joie. Juste la fierté. Il s’accorda un peu de répit et parvint à considérer sa vie comme s’il lui était extérieur, comme s’il la contemplait depuis une calme esplanade située au-delà de sa propre mort, sans passion ni remords, juste avec l’impartialité scrupuleuse d’un scribe dépourvu de sentiments. Il énumérait des images et des métaphores. Il se voyait bêcher scrupuleusement dans un jardin écarlate les restes de ses enfants et de sa propre existence qui le submergeaient. Il sentait les pointes des seins de Lucille lui entrer dans la poitrine comme des couteaux. Il comptait une à une les lignes de cocaïne et les larmes versées. Il se remémorait chaque détail d’un mégot collé sur la cuisse d’une fille sans visage. Il caressait le visage souriant d’Agathe qui s’estompait. Et rien de tout cela n’était aussi réel que le soleil qui persistait à le réchauffer. Il n’y avait plus ni haine, ni pitié, ni simulacre d’espoir. Car telles étaient nos vies, songea-t-il. Et voilà tout l’amour dont je suis capable.
Auteur:
Ferrari Jérôme
Années: 1966 -
Epoque – Courant religieux: Récent et Libéralisme économique
Sexe: H
Profession et précisions: enseignant
Continent – Pays: Europe - France
Info:
Dans le secret, Actes sud, 2010, pages 177-178
[
regard rétrospectif
]
[
rêverie
]
[
indifférence
]
[
pauvreté
]
christianisme
Pendant trois jours, les Wisigoths d’Alaric ont pillé la ville et traîné leurs longs manteaux bleus dans le sang des vierges. Quand Augustin l’apprend, il s’en émeut à peine. Il lutte depuis des années contre la fureur des donatistes et consacre tous ses efforts maintenant qu’ils sont vaincus, à les ramener dans le sein de l’Eglise catholique. Il prêche les vertus du pardon à des fidèles qu’anime encore l’esprit de vengeance. Il ne s’intéresse pas aux pierres qui s’écroulent. Car bien qu’il ait rejeté loin de lui, avec horreur, les hérésies de sa jeunesse coupable, peut-être a-t-il gardé en lui des enseignements de Mani la conviction profonde que ce monde est mauvais et ne mérite pas que l’on verse des larmes sur sa fin. Oui, le monde est rempli des ténèbres du mal, il le croit toujours, mais il sait aujourd’hui qu’aucun esprit ne les anime, qui porterait atteinte à l’unité du Dieu éternel, car les ténèbres ne sont que l’absence de lumière, de même que le mal indique seulement la trace du retrait de Dieu hors du monde, la distance infinie qui les sépare, que seule Sa grâce peut combler dans les eaux pures du baptême.
Auteur:
Ferrari Jérôme
Années: 1966 -
Epoque – Courant religieux: Récent et Libéralisme économique
Sexe: H
Profession et précisions: enseignant
Continent – Pays: Europe - France
Info:
Le sermon sur la chute de Rome, Actes sud, 2012, pages 198-199
[
temporel-éternel
]
[
paganisme
]
enfance
Je me souviens d’anciennes soirées de Noël, de mes parents, de mes grands-parents, de mon oncle Paul, je me souviens des dizaines de cousins que nous n’avons plus revus, je me souviens de la solennité de la nuit, et du froid qu’il faisait dans l’église pendant la messe de la Nativité, je me souviens de l’ennui terrible dans lequel me plongeaient d’abord les prières et puis ensuite toutes les discussions des adultes avec tous ces souvenirs familiaux qui n’évoquaient rien pour moi, avec tous ces baisers si moites qui sentaient la vieillesse et le désespoir, un ennui si terrible, en vérité, que la perspective des cadeaux à ouvrir ne parvenait pas à m’en libérer, ma grand-mère m’embrassait, et je m’ennuyais, ma mère m’embrassait, et je m’ennuyais, un vieux cousin en chemise cachemire et mocassins blancs me demandait ce que je faisais à l’école et je lui répondais en périssant d’ennui, et tout le monde était si gentil avec moi mais pas au point de me dire que ce qui m’ennuyait était sur le point de mourir et que j’y repenserais bien des années plus tard – si peu d’années plus tard, en somme – avec une telle nostalgie et une si grande peur. Ce ne sont pas seulement les hommes qui meurent, les mondes meurent aussi d’une vraie mort, aussi définitive et triste que celle des hommes.
Auteur:
Ferrari Jérôme
Années: 1966 -
Epoque – Courant religieux: Récent et Libéralisme économique
Sexe: H
Profession et précisions: enseignant
Continent – Pays: Europe - France
Info:
Dans le secret, Actes sud, 2010, page 135
[
mélancolie
]
[
passé
]
[
temps
]
[
regard rétrospectif
]
rapport sexuel
Agrippant à deux mains les montants du lit, la serveuse écrasa sa chatte sur la bouche d’Antoine sans se rendre compte qu’un de ses genoux bloquait presque complètement la circulation de son bras gauche et que, les narines complètement bouchées par toute la cocaïne qu’il s’était enfilée dans la soirée, il était en train de suffoquer comme un noyé. Trop effaré pour avoir le courage de la repousser, il tenta de respirer de temps en temps en faisant des contorsions d’apnéiste avec la bouche tout en continuant à s’acquitter de sa tâche du mieux qu’il pouvait. Ses poumons le brûlaient, il ne sentait plus son bras, des bulles tièdes crevaient au coin de ses lèvres, l’arête d’un paquet de cigarettes oublié dans les draps lui écorchait le dos, la cocaïne tendait ses muscles épuisés et faisait couler dans sa gorge un suc épais et amer, une érection mécanique lui tordait le ventre, tout son corps était tendu et crispé comme s’il allait craquer de toutes parts et se déchirer, le pubis de la serveuse lui griffait ses lèvres et il lui semblait entendre dans la chanson que raï que déversait la chaîne hi-fi les échos limpides de la voix de sa femme qui lui disait ne t’excuse pas pour ma vie, ne t’excuse pas pour mes rêves et il tordait la bouche avec frénésie, tendu vers les gémissements de la serveuse, si loin au-dessus de lui et rien ne parvenait à l’arracher à la nuit triste de son esprit dont il scrutait les ténèbres comme de l’extérieur.
Auteur:
Ferrari Jérôme
Années: 1966 -
Epoque – Courant religieux: Récent et Libéralisme économique
Sexe: H
Profession et précisions: enseignant
Continent – Pays: Europe - France
Info:
Dans le secret, Actes sud, 2010, pages 59-60
[
cunnilingus
]
[
baise
]
[
adultère
]
[
torture
]
[
désagréable
]
[
drogue
]
retrouvailles
Il a sans doute regardé ses enfants sans les reconnaître mais son épouse n'avait pas changé parce qu'elle n'avait jamais été jeune ni fraîche, et il l'a serrée contre lui bien que Marcel n'ait jamais compris ce qui avait bien pu pousser l'un vers l'autre leurs deux corps desséchés et rompus, ce ne pouvait être le désir, ni même un instinct animal, peut-être était-ce seulement parce que Marcel avait besoin de leur étreinte pour quitter les limbes au fond desquels il guettait depuis si longtemps, attendant de naître, et c'est pour répondre à son appel silencieux qu'ils ont rampé cette nuit-là l'un sur l'autre dans l'obscurité de leur chambre, sans faire de bruit pour ne pas alerter Jean-Baptiste et Jeanne-Marie qui faisaient semblant de dormir, allongés sur leur matelas dans un coin de la pièce, le coeur battant devant le mystère des craquements et des soupirs rauques qu'ils comprenaient sans pouvoir le nommer, pris de vertige devant l'ampleur du mystère qui mêlait si près d'eux la violence à l'intimité, tandis que leurs parents s'épuisaient rageusement à frotter leurs corps l'un à l'autre, tordant et explorant la sécheresse de leurs propres chairs pour en ranimer les sources anciennes taries par la tristesse, le deuil et le sel et puiser, tout au fond de leurs ventres, ce qu'il y restait d'humeurs et de glaires, ne serait-ce qu'une trace d'humidité, un peu de fluide qui sert de réceptacle à la vie, une seule goutte, et ils ont fait tant d'efforts que cette goutte a fini par sourdre et se condenser en eux, rendant la vie possible, alors même qu'ils n'étaient plus qu'à peine vivants.
Auteur:
Ferrari Jérôme
Années: 1966 -
Epoque – Courant religieux: Récent et Libéralisme économique
Sexe: H
Profession et précisions: enseignant
Continent – Pays: Europe - France
Info:
Le sermon sur la chute de Rome, Actes sud, 2012, page 16
[
scène originaire
]
[
conception
]
[
baise
]
[
couple
]
humain-divin
Car nous méritons de mourir, et c’est là une pensée proprement évangélique. Une pensée qui rend Dieu à nouveau possible. Ne pouvoir se passer de Dieu et être incapable d’y croire a quelque chose d’atroce. Et chacun sait ce qu’est la vie. Chacun soupçonne à quel point elle peut être pire. Ce qui rend, en un sens, la croyance en Dieu héroïque – ou seulement stupide. Concilier la bonté de Dieu, Sa puissance et l’état du monde fut pendant des siècles une entreprise jugée honorable que notre monde de surhommes a tournée en ridicule de manière injuste. Bien sûr, il y avait beaucoup de ridicule là-dedans, mais pas du genre qu’on croit. Ce qui l’était, c’était de penser que, si Dieu existe, Son œuvre doive être justifiée. Car Sa seule existence justifie tout, le mal, les tortures, les enfants morts-nés, les meurtres et l’ennui. Tout cela est purement et simplement effacé. Si Dieu est, les peines de l’enfer sont justifiées sans qu’il y ait besoin d’un seul argument et les damnés eux-mêmes, comprenant le sens de leur châtiment, le réduisent à rien. Ce n’est rien de brûler pour toujours si l’on comprend le sens et la nécessité ou même si, sans rien comprendre du tout, on sait que quelqu’un le comprend pour nous, si l’on sait qu’existe, en dehors de notre esprit limité, le point de vue de Dieu, en qui sont conciliées la cruauté impitoyable et la bonté parfaite. Le point de vue de Dieu n’a pas besoin d’être pertinent ou sublime ; il suffit qu’il soit multiple et infini. Le seul problème est d’avoir la force de croire car seule la foi, comme l’affirment les Ecritures, sauve.
Auteur:
Ferrari Jérôme
Années: 1966 -
Epoque – Courant religieux: Récent et Libéralisme économique
Sexe: H
Profession et précisions: enseignant
Continent – Pays: Europe - France
Info:
Dans le secret, Actes sud, 2010, pages 32-33
[
jugement dernier
]
[
justice céleste
]
aguicheuse
- Et surtout, faut pas niquer les serveuses, hein ? Les gens, ils viennent pas pour claquer leur fric chez vous pour vous voir niquer les serveuses ! Vous, vous pouvez niquer les clientes, mais pas les serveuses.
Annie était bien d'accord, dans la vie, on pouvait se permettre des tas de choses mais, quand on tenait un bar, jamais, au grand jamais, il ne fallait niquer les serveuses. Matthieu et Libero assurèrent qu'une telle horreur ne leur avait jamais traversé l'esprit.
Ils eurent la surprise de constater dès le lendemain qu'Annie, dont l'efficacité était par ailleurs irréprochable, semblait avoir conservé de ses anciennes fonctions la curieuse habitude d'accueillir chaque représentant du sexe masculin qui poussait la porte du bar d'une caresse, furtive mais appuyée, sur les couilles. Nul n'échappait à la palpation. Elle s'approchait du nouvel arrivant, tout sourire, et lui faisait deux grosses bises claquantes sur les joues tandis que de la main gauche, comme si de rien n'était, elle explorait son entrejambe en repliant légèrement les doigts. Le premier à faire les frais de cette manie fut Virgile Ordioni, qui arrivait les bras chargés de charcuterie. Il devint cramoisi, eut un rire bref, et resta debout dans la salle sans trop savoir quoi faire. Matthieu et Libero avaient d'abord pensé demander à Annie d'essayer de se montrer moins immédiatement amicale mais personne ne se plaignait, bien au contraire, les hommes du village faisaient plusieurs apparitions quotidiennes au bar, ils y venaient même pendant les heures habituellement creuses, les chasseurs abrégeaient leurs battues et Virgile mettait un point d'honneur à descendre tous les jours de la montagne, ne serait-ce que pour boire un café, si bien que Matthieu et Libero gardèrent le silence, non sans louer intérieurement la clairvoyante Annie dont l'immense sagesse avait percé à jour la simplicité de l'âme masculine.
Auteur:
Ferrari Jérôme
Années: 1966 -
Epoque – Courant religieux: Récent et Libéralisme économique
Sexe: H
Profession et précisions: enseignant
Continent – Pays: Europe - France
Info:
Le sermon sur la chute de Rome, Actes sud, 2012, pages 98-99
[
technique commerciale
]
[
sommelière
]