Pendant trois jours, les Wisigoths d’Alaric ont pillé la ville et traîné leurs longs manteaux bleus dans le sang des vierges. Quand Augustin l’apprend, il s’en émeut à peine. Il lutte depuis des années contre la fureur des donatistes et consacre tous ses efforts maintenant qu’ils sont vaincus, à les ramener dans le sein de l’Eglise catholique. Il prêche les vertus du pardon à des fidèles qu’anime encore l’esprit de vengeance. Il ne s’intéresse pas aux pierres qui s’écroulent. Car bien qu’il ait rejeté loin de lui, avec horreur, les hérésies de sa jeunesse coupable, peut-être a-t-il gardé en lui des enseignements de Mani la conviction profonde que ce monde est mauvais et ne mérite pas que l’on verse des larmes sur sa fin. Oui, le monde est rempli des ténèbres du mal, il le croit toujours, mais il sait aujourd’hui qu’aucun esprit ne les anime, qui porterait atteinte à l’unité du Dieu éternel, car les ténèbres ne sont que l’absence de lumière, de même que le mal indique seulement la trace du retrait de Dieu hors du monde, la distance infinie qui les sépare, que seule Sa grâce peut combler dans les eaux pures du baptême.
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Info: Le sermon sur la chute de Rome, Actes sud, 2012, pages 198-199
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