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créature-créateur

On ne peut observer la manière dont il [Saint Thomas d’Aquin] conduit cette purification théologique [consistant à dépouiller certaines images des notions qui, les liant à l’être finies, les rendraient inapplicables à Dieu] sans remarquer le principe dont elle procède : la notion de Dieu comme pur acte d’être dont l’essence est identiquement cet être, Ipsum Purum Esse, ou Natura Essendi. Pas un moment de cette dialectique où elle soit perdue de vue ; au contraire, cette notion est comme le ressort, le nerf, la vie […]. On retrouve à chaque pas l’une des opérations dont la suite est décrite dans les deux Sommes : réduction de l’opération à la puissance, de la puissance à la nature, de la nature à l’essence, et de l’essence à l’esse, c’est-à-dire, en dernière analyse, à l’Est de Qui Est.

Il est donc IMPOSSIBLE de professer la théologie de Saint Thomas sans souscrire en même temps à sa notion de Dieu et, par implication, à sa notion de l’être. Certains pensent se mettre suffisamment d’accord avec sa pensée en reliant ses conclusions théologiques à la notion de Dieu conçu comme Être, mais ce n’est pas assez faire si, en même temps, on ne conçoit pas l’être comme fait Saint Thomas.

[…] Pour comprendre la doctrine de Saint Thomas, il faut voir que sa noétique y est entièrement conditionnée par une métaphysique de l’être, et que cette métaphysique requiert une notion de l’être telle qu’elle contienne en soi, et livre au premier coup d’œil, ce qui relie le fini à sa cause première, et ce qui l’en distingue. A partir de ce moment, qui est le premier, il devient également impossible de concevoir le fini comme indépendant de sa cause et de le confondre avec elle. Rien n’est sans Dieu et rien n’est Dieu.

Tous les théologiens l’enseignent et les différences entre eux ne sont que dans la manière de l’enseigner, mais ces différences importent, sinon directement au salut lui-même, qui est la fin propre de la révélation, du moins à l’intellection de la foi, qui est la fin propre de la théologie. Or ce que dit Saint Thomas sur ce point, c’est précisément que la notion première formée par l’intellect n’est pas une notion de l’être si indéterminée qu’elle conviendrait également à Dieu et aux créatures. Au contraire, la notion première, qui est principe premier dans l’ordre de l’appréhension simple, est celle de l’étant (ens), propre à la créature conçue comme "ce qui a l’être" (habens esse) et, par conséquent, inapplicable à Dieu sous cette forme. Car Dieu n’est pas un étant, il n’a pas l’être, il Est.

Si l’on y prend garde, on verra pourquoi, en raison de cette vérité même, des preuves de l’existence de Dieu par voie de causalité sont, chez Saint Thomas, à la fois possibles et nécessaires. Elles sont possibles puisque, partant de l’étant, on peut remonter à l’être comme à la cause de ce que l’étant (ens) a d’être (esse). Elles sont nécessaires précisément parce que, ne partant pas d’une notion indéterminée de l’être en général, mais de l’expérience sensible de l’être de quelque étant, on ne saurait découvrir dans la notion de l’habens esse, par voie analytique et comme a priori, celle, toute différente de l’esse, subsistant par soi comme s’il était à soi-même sa propre essence. Une preuve inductive est alors nécessaire, dont le seul moyen concevable est la causalité.

On voit en même temps la raison profonde pour laquelle, ainsi sauvée de l’ontologisme dès sa première démarche, la doctrine de Saint Thomas est immédiatement orientée vers cette théologie négative et transcendante qui recueille, dans ce qu’il avait de plus précieux, l’héritage de la théologie grecque. […] Quelque nom que nous donnions à Dieu, il faudra toujours ajouter qu’en lui, ce nom signifie la nature, qui est la substance, qui est l’essence, qui est l’ipsum purum esse. De cet être pur, aucune représentation n’est possible, et c’est pourquoi, en fin de compte, l’homme ne peut ici-bas qu’étreindre Dieu par l’amour, au-delà des affirmations et des négations, dans l’obscurité. Aussi Saint Thomas ne dit-il pas seulement que l’être de Dieu nous est mal connu ; c’est "inconnu" qu’on l’a entendu dire. Rappelons-le : Esse Dei est ignotum.

Cette transcendance absolue de Dieu ne s’exprime bien que dans un langage métaphysique où, pour en parler avec le plus de précision possible, on peut dire de Dieu que même ens ne lui convient pas exactement, car Dieu est à l’état pur et exclusivement ce par quoi le fini est de l’étant, grâce à sa participation à l’être. 

Auteur: Gilson Etienne

Info: Introduction à la philosophie chrétienne, Vrin, 2011, pages 138-142

[ naturel-surnaturel ] [ distinction ] [ continuité ] [ apophatique ] [ nescience ] [ analogie ]

 

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philosophie-théologie

Nulle doctrine, mieux que celle des Ennéades, ne met en évidence le lien des notions d’être et d’intelligibilité. Au sommet de la hiérarchie des substances-principes, se trouve l’Un, mais de l’Un absolu on ne saurait rien dire, pas même qu’il est, car ce serait dire de lui qu’il est l’être, et non plus l’un. On ne peut même pas dire de l’un qu’il est l’un, car en considérant deux fois l’un, on le fait être deux. Bref, l’un est ineffable, on ne peut former à son endroit aucune proposition qui n’aurait pour effet de le détruire, et ceci est vrai de l’un lui-même. Sans doute, l’un n’est pas inconscient ; bien au contraire, il est au sommet de l’immatérialité et de la connaissance, mais il ne connaît pas au moyen de propositions et il n’en saurait former, au sujet de lui-même, aucune dont l’effet serait de lui faire connaître ce qu’il est. L’un est au-delà du "ce que", et puisqu’il n’y a rien qu’il soit, il est au-delà de l’être. A strictement et proprement parler, l’un n’est pas.

L’être apparaît donc au-dessous de l’un. Avec profondeur, Plotin fait commencer l’être avec la connaissance des idées, et en même temps qu’elle, car on ne peut vraiment dire que l’être est qu’au moment où l’on peut en dire ce qu’il est. C’est pourquoi la deuxième substance-principe, qui vient immédiatement après l’Un, est l’Intelligence (nous), qui, précisément parce qu’elle est connaissance, est être. L’Intelligence n’est pas l’Un, mais elle est la connaissance de l’Un, sinon en lui-même, qui transcende la connaissance, du moins sous la forme de toutes ses participations possibles. En tant que connues, ces participations possibles se nomment Idées ; c’est donc bien avec l’Intelligence, lieu des Idées, qu’on atteint véritablement l’ordre de l’être. […] La première chose qui vienne après l’Un (qui lui-même est premier), c’est l’être.

Cette inséparabilité de l’être et de l’intelligible tient donc à ce que rien ne commence d’être tant qu’on ne peut savoir et dire que cela est. On entre au même moment dans un ordre où la pensée se sent chez elle ; à l’Un, à l’ineffable et à l’indéfinissable succèdent tout à la fois le multiple, l’exprimable et le définissable. […]

Une leçon se dégage de cette expérience plotinienne sur la notion de l’Un ; c’est que le multiple ne peut s’obtenir, à partir de l’Un, que sous forme d’idées intelligibles distinctes. A moins d’être conçues comme telles, ces formes intelligibles ne sont pas ; elles ne sont donc pas des êtres ; bref, l’intelligibilité de ces formes est un intermédiaire nécessaire entre l’unité, qui transcende sur l’être, et l’être qui ne se pose que dans la multiplicité.

L’opération n’est pas représentable. Si on tente de l’imaginer, on pense à une sorte d’éclatement métaphysique de l’Un qui se disperserait en Idées, mais rien de tel ne se produit. L’Un reste un ; indifférent à cette prolifération d’images de lui-même dans laquelle il n’est pas engagé, parce que son unité n’est pas celle d’un nombre composable et décomposable à la manière d’une somme, l’Un reste hors de cette plurification qui ne le concerne pas. Le multiple est fait de fragments d’une unité qui n’est pas celle de leur tout. La vieille métaphore de l’image est encore ici la meilleure, car une infinité de reflets dans un jeu de glaces n’ajoute rien à la substance de l’objet qu’ils représentent. […]

Pourquoi donc s’engager dans ces embarras inextricables ? Puisque le donné est multiple et que l’être singulier, dont il est fait, nous est intelligiblement concevable, pourquoi lui ajouter cet Un dont le rapport au multiple est si malaisément compréhensible ? Simplement parce que l’antinomie de l’un et du multiple n’est pas une construction de l’esprit ; elle est donnée dans le multiple même, puisque nous ne pouvons le concevoir que comme une certaine sorte d’unité. […]

Saint Thomas [d'Aquin] a toujours marqué un vif intérêt pour cette dialectique platonicienne de l’un et du multiple parce qu’elle préfigurait à ses yeux celle de l’être et de l’essence. Dans une philosophie chrétienne née d’une méditation rationnelle de la parole de Dieu, la première substance-principe n’est pas l’Un, mais l’Être. Comme l’Un, l’Être échappe à la définition. C’est un lieu commun que la notion d’être n’est pas définissable précisément parce que, étant première, elle inclut nécessairement tous les termes dont on pourrait user pour la définir. Pourtant, hors de l’être, il n’y a que le néant. L’entendement fait donc constamment usage, à titre de premier principe, d’une notion dont il a l’intellection, mais qui élude les prises de la raison raisonnante. On ne peut rien dire de l’être, même fini, sinon qu’il est l’acte en vertu duquel l’étant est, ou existe. Tout se passe comme si l’esse créé participait au caractère mystérieux de la cause créatrice, et en effet, concevoir l’esse fini en soi et à l’état pur serait une entreprise contradictoire ; ce serait tenter de concevoir Dieu. 

Auteur: Gilson Etienne

Info: Introduction à la philosophie chrétienne, Vrin, 2011, pages 173-177

[ métaphysique de l'être ] [ métaphysique de l'un ] [ transposition ] [ christianisme ] [ apophatique ]

 

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foi-raison

Poser cette question [l’être et l’essence sont-ils la même chose], c’est implicitement supposer qu’être essence ne soit pas identiquement être un être ou, inversement, qu’être ne soit pas identiquement être essence. Beaucoup de théologiens et de philosophes ne penseraient même pas à poser la question. Au moment où il la pose, Saint Thomas lui-même vient d’établir que, considéré comme suppôt, ou sujet, Dieu est identiquement sa propre essence, ou nature. Si un être et sa propre essence sont identiques, si, en d’autres termes, un être est identiquement ce qu’il est, comment peut-on le concevoir encore plus simple ? Il n’y a rien de plus simple que l’identité de soi à soi. […] 

Sans doute, bien des raisons suggèrent la composition d’essence et d’être dans les étants, mais aucune ne la démontre à la rigueur. Il est évident, ou démontrable, qu’un étant fini n’a pas de soi son être. L’essence finie est donc en puissance à l’égard de son être actuel et cette composition de puissance et d’acte suffit à distinguer radicalement l’étant, qui n’est qu’un être, de Celui qui est l’Être. Mais comment démontrer, par inspection directe de l’étant, que l’existence actuelle est en lui l’effet d’un acte fini, intrinsèque à sa substance et qui fait de lui un ens, au sens précis d’essence ayant son acte propre d’exister ? Duns Scot, Suarez, d’innombrables théologiens ont refusé et refusent encore d’accepter cette doctrine métaphysique.

On ne pense peut-être pas assez à la redoutable conséquence théologique de ce refus. C’est que, si la substance réelle finie ne se compose pas d’essence et d’être, il n’y a plus lieu d’éliminer cette composition de notre notion de Dieu pour établir sa parfaite simplicité. L’entreprise devient sans objet, car on ne peut éliminer de l’être divin une composition qui n’existe nulle part, sauf dans la pensée de ceux qui la conçoivent. La démarche du théologien suit donc l’ordre inverse. Sachant, parce que Dieu l’a dit, que son nom propre est Est, le théologien pose l’étant fini comme nécessairement complexe. Or lui-même part de Dieu comme de l’absolument simple ; il faut donc que la complexité de la substance finie résulte d’abord d’une addition à l’acte fondamental d’être. Cette addition ne peut d’abord être que celle d’une essence, grâce à laquelle un acte d’être est celui d’un certain être. S’il n’était un composant métaphysique réel de l’étant, l’acte d’être (essendi esse) ne ferait pas réellement composition avec l’essence ; l’étant serait simple comme l’être divin ; il serait Dieu.

La certitude que l’esse, ou acte d’être, est un élément proprement dit de l’étant et qu’à ce titre il est inclus dans sa structure, s’explique donc d’abord par la certitude antérieure que l’acte d’être existe actuellement en soi et à part, dans la pureté métaphysique absolue de ce qui n’a rien, pas même l’essence, parce qu’il est tout ce qu’on pourrait vouloir lui attribuer. […] C’est parce qu’on sait que Dieu est être pur, que l’on situe dans un acte d’être métaphysiquement non-pur le noyau métaphysique de la réalité.

Toute cette dialectique est mise en mouvement, dirigée et conclue à la lumière de la parole de l’Exode. Elle est métaphysique de méthode et de structure car rien, dans le texte sacré, ne la suggère ni ne l’annonce. La révélation comme telle peut atteindre sa fin propre sans y recourir et l’on doit convenir qu’humainement parlant, le sens littéral primitif de l’Ecriture ne suggérait aucune technique aristotélicienne. Pourtant, Saint Thomas y a lu, à la fois et indivisément que Dieu est, qu’il est l’Être, et qu’il est simple. Or être Qui Est, et être simple, c’est proprement être, purement et simplement. […] Parce que Dieu s’est révélé comme Celui Qui Est, le philosophe sait qu’à l’origine et au cœur même des étants, il faut situer l’acte pur d’exister. […] Ne disons pas : puisque l’Ecriture l’affirme, les notions philosophiques d’être et de Dieu s’identifient, en fin de compte, avec celle de l’acte d’être ; en effet, l’Ecriture elle-même ne le dit pas ; mais elle dit : le nom propre de Dieu est : Qui Est ; parce qu’elle le dit, je le crois ; pendant que j’adhère ainsi à l’objet de la foi, l’entendement fécondé par ce contact pénètre plus avant dans l’intellection de la notion première d’être. D’un seul et même mouvement, il découvre dans le sens philosophique du premier principe une profondeur imprévue et conquiert une sorte d’intellection, imparfaite mais vraie, de l’objet de la foi.

C’est ce mouvement même que l’on nomme philosophie chrétienne, pour l’intellection de la parole de Dieu, si précieuse dans sa modestie, qu’il procure. Pour l’ordre doctrinal, les élargissements de perspective et l’approfondissement des vues philosophiques dont ce mouvement est la cause, il reçoit le titre de philosophie scolastique. Sous ces deux aspects complémentaires, il est inséparable de l’Ecriture. On doit donc s’exercer longuement, ou mieux encore souvent, soit à percevoir, dans la plénitude du nom de Dieu la présence d’une dialectique de la simplicité divine, soit, inversement, à dérouler à loisir cette dialectique à la lumière de l’Ego sum qui sum. 

Auteur: Gilson Etienne

Info: Introduction à la philosophie chrétienne, Vrin, 2011, pages 66 à 69

[ créature-créateur ] [ christianisme ]

 

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philosophie-théologie

[…] au fond, tout ce que Saint Thomas [d'Aquin] a dit des Idées était dans son esprit une concession de plus faite au langage d’une philosophie qui n’était pas vraiment la sienne. C’était aussi, n’en doutons pas, la reconnaissance de l’autorité théologique de Saint Augustin. 

En effet, l’exposé du problème et sa discussion dans le Contra Gentiles (I, 44-71) relègue à l’arrière-plan la notion d’idée divine. Celle-ci fait de brèves apparitions aux chapitres 51 et 54, où il est question de la manière dont une pluralité d’objets peut être dans l’intellect divin sans en rompre l’unité, mais Saint Thomas n’en fait mention que comme d’un artifice employé par Saint Augustin pour "sauver dans une certaine mesure l’opinion de Platon". Celui-ci, dit Saint Thomas, pour éviter d’introduire de la composition dans l’intellect divin, a situé les Idées hors de Dieu, comme des formes intelligibles subsistant en elles-mêmes. Mais on n’évite ainsi un inconvénient que pour s’exposer à plusieurs autres, car, d’abord, puisque Dieu devrait alors prendre connaissance d’objets autres que son essence, sa perfection dépendrait d’êtres autres que lui-même, ce qui est impossible ; en outre, puisque tout ce qui n’est pas son essence est causé par elle, ces formes intelligibles devraient être causées par Dieu, et comme il ne pourrait les causer sans les connaître, la connaissance qu’il en a ne peut dépendre d’elles, mais seulement de lui. De toute manière, il ne suffirait pas de poser des Idées hors de Dieu pour expliquer la connaissance qu’il a des choses ; pour que Dieu connaisse les formes des choses, il faut qu’elles soient dans l’intellect divin lui-même. La solution platonicienne du problème est donc inopérante ; la Somme contre les Gentils ne semble pas avoir jugé nécessaire de mettre en œuvre la notion platonicienne d’Idée, entendue de quelque manière que ce soit.

En fait, Saint Thomas n’en a pas besoin, en ce sens qu’il peut exposer la vérité sur ce point sans recourir à aucune notion qui ne découle nécessairement de ses propres principes, ou qui ne coïncide avec l’un d’eux. Dieu est premier moteur ; qu’on le conçoive comme se mouvant soi-même ou comme entièrement immobile, il faut que Dieu soit intelligent. Dans les deux cas, en effet, Dieu meut en tant que désiré, donc en tant que connu, et il ne se peut que ce qu’il meut connaisse sans que lui-même, qui est premier, soit doué de connaissance. Mais nous en revenons aussitôt au grand principe de la simplicité divine. Intelliger est à l’intellect ce qu’être est à l’essence ; mais c’est l’être qui est l’essence de Dieu ; l’intellect de Dieu est donc son essence, qui est son être. […]

Qu’ont à faire les Idées dans une pareille doctrine ? Jean Duns Scot fera pertinemment observer qu’un théologien pourrait fort bien expliquer la vérité sur la connaissance que Dieu a des choses sans faire mention de la notion d’Idée. C’est au moins aussi vrai de la doctrine de Saint Thomas. En effet, pourquoi poserait-on des Idées en Dieu ? Pourquoi expliquer comment, par elles, il connaît les créatures ? Mais Dieu connaît par son intellect, qui est son essence, qui est son esse. Comme le dit Saint Thomas avec force, si l’on veut que toute connaissance se fasse par une espèce intelligible, alors, c’est l’essence de Dieu qui est en lui l’espèce intelligible […].

De là résulte cette conséquence étonnante que, si l’on veut parler d’espèces intelligibles à propos de la connaissance divine, on ne peut lui en attribuer qu’une seule. Dans une des analyses de l’acte de connaître les plus limpides qu’il ait données, (CG. I, 53, 3), Saint Thomas rappelle que, informé d’abord par l’espèce venue de l’objet connu, l’intellect, en connaissant, forme ensuite en soi une espèce intelligible de cet objet, puis, grâce à cette espèce, une sorte d’intention de ce même objet. Cette intention en est la notion intelligible (ratio), que la définition signifie. L’intention connue, ou notion formée, est donc le terme de l’opération intellectuelle dont l’espèce intelligible est le principe. Ainsi donc, un intellect averti par l’objet sensible et son espèce, forme lui-même une espèce intelligible, puis, fécondé par cette espèce, forme la notion intelligible de l’espèce, son intention.

Nous ne pouvons concevoir l’intellection divine autrement qu’à partir de ce que nous savons de la nôtre. On dira donc que Dieu, lui aussi, connaît les choses par l’opération de son intellect et que son intellect les connaît par une espèce intelligible qui lui permet de s’en former une notion, seulement, dans le cas de Dieu, l’intellect est son essence ; pour la même raison (la parfaite simplicité de Dieu), l’opération de l’intellect divin est identiquement cet intellect, lui-même identique à l’essence divine ; enfin (toujours pour la même raison), l’espèce intelligible, principe formel de l’intellection, est identique en Dieu à l’intellect et à son opération, qui le sont eux-mêmes à l’essence, et comme, en fin de compte, l’essence est identique en Dieu à l’être, être et connaître sont en Dieu une seule et même chose : intelligere Dei est ejus esse.

[…] puisque Dieu ne connaît rien que par son essence, il connaît tout par une seule et unique "intention connue" qui est le Verbe divin, à partir d’une seule et unique espèce intelligible, qui est l’essence divine elle-même (CG. I, 3, 5). En somme, si l’on tenait à parler le langage des Idées, il faudrait dire ici qu’il n’y en a qu’une, qui est Dieu. 

Auteur: Gilson Etienne

Info: Introduction à la philosophie chrétienne, Vrin, 2011, pages 164-168

[ théorie de la connaissance ] [ analogie ] [ critique ] [ superflue ] [ christianisme ]

 

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philosophie-théologie

Peu de philosophes évitent la tentation de philosopher sans autres présuppositions que la pensée même. […] plusieurs d’entre eux [des philosophes chrétiens] ne cachent pas leur déplaisir quand on les exhorte à regarder et, si possible, à voir une vérité première qui, à ce titre, n’est pas objet de démonstration. C’est pourquoi, tenant la composition d’essence et d’existence dans le fini pour la vérité fondamentale de la philosophie chrétienne, ils n’ont pu supporter l’idée de la laisser à l’état d’affirmation arbitraire et ont entrepris de la démontrer.

Disons d’abord, pour éviter toute équivoque, que la distinction (ou composition) d’essence et d’être, dans le fini est en effet démontrable, sous de certaines conditions, pourtant, dont il importe au plus haut point de comprendre la nature.

[…] on a ramené à trois les principaux types d’arguments par lesquels Saint Thomas [d'Aquin] établit cette distinction fameuse dans les écoles.

Le premier […] est clairement exposé dans le De ente et essentia, IV : "Tout ce qui n’est pas de la notion d’une essence, ou quiddité, lui advient de l’extérieur et fait composition avec cette essence, car nulle essence ne peut être conçue sans ce qui en fait partie. Or toute essence ou quiddité peut être conçue sans que l’on conçoive quoi que ce soit de son existence ; en effet, je peux concevoir ce qu’est un homme, ou un phénix, et pourtant ignorer s’il en existe dans la nature. Il est donc manifeste que l’être est autre que l’essence, ou quiddité."

L’argument est irréfutable, mais que prouve-t-il ? D’abord que l’être actuel n’est pas inclus dans la notion de l’essence. […] Pour qu’une essence passe du possible à l’être, il faut donc qu’une cause extérieure lui confère l’existence actuelle. Il n’y a jamais eu de théologien ou de métaphysicien chrétien pour mettre en doute la validité de cette conséquence. N’étant pas à soi-même la cause de sa propre existence, l’être fini doit la tenir d’une cause supérieure, qui est Dieu. En ce sens, ce que l’on nomme distinction d’essence et d’être signifie simplement que tout être fini est un être créé. Or tous les théologiens l’admettent, mais beaucoup refusent d’en conclure que l’être fini se compose de deux éléments métaphysiques, son essence et un acte d’être en vertu duquel il existe. Dire qu’un être fini n’a pas dans son essence la raison de son être, c’est une chose […] ; dire que, dans ce même être fini, l’existence vient d’un actus essendi auquel tient précisément l’être actuel, c’est autre chose, et qui ne suit aucunement de l’argument en question.

[…] Passons au deuxième groupe d’arguments. Leur schème commun, nous dit-on, est le suivant : "L’être dans lequel essence et existence ne sont pas distincts, l’être dont l’essence même est d’exister, est nécessairement unique, parce qu’il ne pourrait être multiplié sans être différencié, et qu’il ne peut être différencié d’aucune manière. En conséquence, dans tous les êtres créés, l’être se distingue de l’essence." [M. D. Roland-Gosselin, Le "De ente et essentia" de Saint Thomas d’Aquin, Paris, Vrin, 1926, p. 188]

Ici encore, l’argument est concluant et, cette fois, c’est bien la vérité de la distinction d’essence et d’existence qu’il aboutit à fonder. Voici sans aucun doute la voie royale et préférée des théologiens, car si Dieu est l’acte pur d’être, rien d’autre que lui ne peut l’être ; ce qui prétendrait à ce titre serait l’ipsum purum esse ; ce serait Dieu. Voilà pourquoi tant des théologiens thomistes accusent volontiers de panthéisme ceux qui, sourds à leurs arguments, refusent la distinction d’essence et d’existence dans le fini. Ils se font la partie belle car […] il faudrait d’abord établir que, pour Dieu, être l’Être est être le pur acte d’essence, dont l’essence est l’être même. La valeur de l’argument dépend donc entièrement de celle d’une certaine notion de Dieu à laquelle, quelle qu’en soit la valeur réelle, beaucoup de théologiens, dont certains furent des saints, semblent n’avoir jamais pensé.

Les preuves du troisièmes groupe, "prises de la nature de l’être créé, viennent corroborer ces conclusions". […] Etant, par définition, causé par un autre, "l’être créé ne subsiste point par soi, comme subsiste nécessairement l’être dont l’essence est d’exister ; d’autre part, être un effet ne peut convenir à l’être créé à raison de l’être lui-même, sinon tout être serait essentiellement effet, et il n’y aurait pas de cause première ; être effet convient donc à l’être créé à raison d’un sujet distinct de son être" [ibid.].

Rien ne fait mieux voir à quelle difficulté fondamentale se heurtent toutes ces démonstrations. Prouver que, puisqu’être créé n’est pas essentiel à l’être lui-même, cela ne peut lui convenir qu’à raison d’un sujet distinct de son être, c’est s’accorder la conclusion que l’on voulait démontrer. Car enfin, concédons les prémisses de l’argument, en quoi permettent-elles de conclure que le sujet de l’être créé est réellement distinct de son être ? Or c’est précisément cela qui est en question, et rien d’autre. Tout théologien conviendra que, par définition, un être créé n’est pas identiquement son existence ; il ne l’est pas, puisque, créé, il lui faut la recevoir pour être, mais, d’autre part, il suffit à l’essence créée, pour être, que Dieu la fasse exister, ce qui est proprement la créer. Que Dieu ne puisse créer un être fini sans lui conférer un acte d’esse réellement distinct de son essence, c’est ce qui peut être vrai, mais, à supposer même que ce soit démontrable, l’argument ne l’a pas démontré.

Ces raisons, et toutes celles du même genre, ont ceci de commun qu’elles supposent déjà conçue la notion d’être entendue au sens, non pas de l’étant (ens, habens esse, ce qui est), mais bien de l’acte d’être (esse) qui, composant avec l’essence, en fait précisément un étant, un habens esse. Or, dès qu’on a conçu cette notion proprement thomiste d’esse, il n’y a plus de problème, il ne reste plus rien à démontrer. 

Auteur: Gilson Etienne

Info: Introduction à la philosophie chrétienne, Vrin, 2011, pages 103 à 108

[ foi-raison ] [ christianisme ] [ limites ] [ créature-créateur ] [ indémontrabilité ] [ impossible ]

 

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philosophie-théologie

C’est seulement à partir du seizième siècle que le développement propre des études philosophiques exigées des futurs théologiens conduisit à diviser les études religieuses en deux parties, la philosophie scolastique et la théologie scolastique. A ce moment, ce qu’il y avait eu de philosophie incluse dans les théologies scolastiques, ou explicitement élaborée en vue de ces théologies et pour leur usage, se constitua en corps de doctrine distinct. C’est ce qu’avaient déjà fait les averroïstes du treizième siècle et leurs successeurs, mais leur intention était de séparer les deux disciplines, non seulement de les distinguer. Les scolastique du seizième siècle, et jusqu’à ceux de nos jours, ont fait une sorte de rêve : constituer, comme préambule à la théologie, une philosophie qui ne devrait rien à celle-ci, sauf une sorte de contrôle extérieur, et qui pourtant s’accorderait parfaitement avec elle. Les scolastiques de notre temps étant thomistes en quelque sorte par définition (bien que les exceptions soient nombreuses), ils veulent naturellement que cette philosophie soit celle de Saint Thomas d’Aquin, ce qui suppose que Saint Thomas ait eu une philosophie. On lui attribue donc celle qu’eut Aristote, retouchée pourtant, comme on assure que le Philosophe lui-même aurait pu le faire pour la mettre d’accord avec la théologie chrétienne.

Sur l’opportunité d’adopter cette attitude, on peut différer d’opinion ; ce qu’il est très difficile d’admettre, c’est que, transportant dans le passé cette manière de faire, on prétende qu’elle ait été déjà celle de Saint Thomas d’Aquin. […] Il est incontestable que l’influence de la philosophie d’Aristote sur la pensée théologique de Saint Thomas dépasse de loin celle des autres philosophes. Elle est prépondérante en ce sens qu’ayant à mobiliser la philosophie au service de la théologie, c’est principalement celle d’Aristote dont Saint Thomas a fait usage, mais ce qu’il fait dire au Philosophe est toujours ce que celui-ci doit dire pour servir les fins du théologien. Et il n’est pas seul à les servir.

On altère la pensée théologique de Saint Thomas en imaginant qu’elle ait pu se lier à une doctrine philosophique quelconque, fût-ce même celle que le théologien jugeait de loin la meilleure de toutes. Lorsqu’il réfléchit sur ce que la raison humaine peut connaître de Dieu par ses seules forces, sans l’aide de la révélation judéo-chrétienne, Saint Thomas pose le problème, non pas du point de vue du seul Aristote, mais en fonction de l’histoire entière de la philosophie grecque. Car c’est là pour lui toute l’histoire de la philosophie, l’âge suivant n’ayant plus guère été que celui des commentateurs et des Saints.

Saint Thomas a plusieurs fois esquissé un tableau d’ensemble de cette histoire. Telle qu’il la connaissait et l’interprétait, elle apparaissait dominée par une règle générale. Dieu ne peut être trouvé que comme cause des êtres donnés dans l’expérience sensible, et l’idée que la raison se fait de lui s’élève à mesure qu’elle-même connaît plus profondément la nature de ses effets. En d’autres termes, on ne peut pas trouver un Dieu plus élevé que celui qu’on cherche ; pour trouver le Dieu le plus haut qu’elle soit capable de concevoir par ses seules forces, il faut que la raison naturelle s’interroge sur la cause de ce qu’il y a de plus parfait dans les êtres sensibles tels qu’elle les connaît.

Sous le regard scrutateur du théologien, cette histoire se présente comme celle d’un progrès, non pas continu, mais sans régressions et jalonné par un petit nombre d’étapes marquantes. Cet approfondissement progressif de la nature des êtres, qu’accompagne celui de notre connaissance de Dieu, suit lui-même un ordre déterminé, qui est celui de la connaissance humaine : secundum ordinem cognitionis humanae processerunt antiqui in consideratione naturae rerum (QDP, 3, 6)*. Or notre connaissance commence par le sensible et, à partir de là, elle s’élève progressivement à l’intelligible par une suite d’abstractions de plus en plus poussées.

Une première étape correspond à la perception sensible des qualités des corps. Les premiers philosophes ont donc naturellement été matérialistes pour la simple raison qu’ils ont d’abord confondu la réalité avec ce qu’ils pouvaient en percevoir par les sens. […] Pour eux, la substance est la matière ; ils ne la conçoivent même pas comme douée d’une forme substantielle, car les formes substantielles ne sont pas perceptibles aux sens ; par contre, les qualités des corps, qui en sont les formes accidentelles, tombent sous les prises des cinq sens.

Voici donc en quoi la réalité consistait selon les premiers philosophes : la matière, qui est la substance, et les accidents, qui sont causés par les principes constitutifs de la substance matérielle, ou éléments. Il ne leur en fallait pas davantage pour expliquer les apparences du monde sensible. Comprenons bien ce point tel que Saint Thomas lui-même l’entendait : si nous posons la matière comme une substance dont les éléments suffisent à rendre raison de toutes les qualités sensibles des corps, celles-ci ne sont autre chose que la manifestation de ces qualités. Elles n’ont donc pas à être produites ; elles sont là du seul fait que la substance matérielle, dont elles sont les formes accidentelles, est là. D’où cette conclusion digne d’attention que, pour ceux qui tiennent une philosophie de ce genre, la matière est la cause ultime de toutes les apparences. Il n’y a donc pas lieu de poser une cause de la matière, ou, plus exactement, ces philosophes sont contraints à affirmer que la matière n’a pas de cause, ce qui, pour Saint Thomas, revient à nier totalement la cause efficiente : une ponere cogebantur materiae causam non esse, et negare totaliter causam efficientem.** 

[…] La deuxième étape fut franchie par ceux des philosophes venus plus tard qui commencèrent, dans une certaine mesure, à prendre en considération les formes substantielles. Celles-ci étant invisibles, on s’élevait par là de la connaissance sensible à la connaissance intellectuelle. C’était un progrès décisif, car en passant de l’ordre du sensible à celui de l’intelligible, on atteignait l’universel. Pourtant, cette deuxième famille de philosophes ne se demanda pas s’il y avait des formes universelles et des causes universelles, toute son attention se porta sur les formes de certaines espèces. Cette fois, il s’agissait de causes vraiment agissantes (aliquas causas agentes***), mais qui ne conféraient pas aux choses l’être au sens où ce mot s’applique universellement à tout ce qui est. Les formes substantielles en question ne faisaient que permuter la matière en lui imposant tantôt une forme, tantôt une autre. C’est ainsi qu’Anaxagore expliquait la diversité de certaines formes substantielles en faisant appel à l’Intelligence, ou qu’Empédocle les expliquait, par l’Amitié et la Haine. 

[…] L’étape dernière fut alors franchie par un autre groupe de philosophes, tels que Platon, Aristote et leurs écoles, qui, réussissant à prendre en considération l’être même dans son universalité, ont été les seuls à poser quelque cause universelle des choses dont tout le reste tînt son être. […] tous les philosophes qui ont posé une cause universelle quelconque des choses (aliquam universalem causam rerum) viennent unanimement à l’appui de cette conclusion théologique : non, il n’existe aucun être qui ne soit créé par Dieu. C’est ce qu’enseigne la foi catholique elle-même, mais que l’on peut démontrer par trois raisons. […]

En effet, la première raison philosophique de poser une cause de l’être universel que retienne ici Saint Thomas, se tire de cette règle, que lorsqu’une même chose se rencontre en commun en plusieurs êtres, il faut qu’elle soit causée en eux par une cause unique. En effet, la présence commune d’une même chose en plusieurs êtres différents ne peut s’expliquer ni par ce qu’eux-mêmes ont de différent, ni par une pluralité de causes différentes. Or l’être (esse) appartient en commun à toutes choses, car elles se ressemblent en ceci, qu’elles sont, bien qu’elles diffèrent les unes des autres en ce qu’elles sont ; il faut donc nécessairement qu’elles ne tiennent pas leur être d’elles-mêmes, mais d’une certaine cause qui soit unique. […]

La deuxième raison se prend des degrés d’être et de perfection. La précédente se contentait de poser l’un comme cause du multiple, celle-ci pose l’absolu, ou le suprême degré dans chaque genre, comme cause de tout ce qui diffère par le plus ou le moins à l’intérieur du même genre. C’est la mesure de la participation au genre qui exige ici qu’on pose dans ce genre un terme suprême, cause unique de ses participations inégales. […]

Observons avec attention les limites des services que Saint Thomas attend ici des philosophes. Il suffit à son propos que Platon et Aristote se soient élevés l’un et l’autre à la considération de l’être universel et qu’ils lui aient assigné une cause unique. Disons plus précisément : il suffit à Saint Thomas que ces philosophes aient su assigner une cause unique à l’une quelconque des propriétés transcendantales de l’être en tant qu’être, que ce soit l’unité avec Platon, ou le bien et la perfection avec Aristote. Ces propriétés sont universellement attribuables à l’être, et Saint Thomas fait honneur à ces philosophes d’en avoir conclu qu’elles doivent nécessairement avoir une Cause unique, mais il n’attribue ni à l’un ni à l’autre une métaphysique de la Création. Platon et Aristote expliquent tout de l’être, sauf son existence même.

La troisième raison nous en conduit aussi près que les philosophes s’en sont jamais approchés ; c’est que ce qui est par autrui se réduit à ce qui est par soi comme à sa cause. Or les êtres donnés dans l’expérience ne sont pas purement et simplement de l’être. D’aucun d’eux on ne peut dire simplement : il est ; on doit toujours dire : il est ceci ou cela. Nous aurons à revenir sur ce fait important. Pour le présent, il suffira d’en retenir qu’il n’existe aucun être simple (c’est-à-dire, simplement et uniquement être) qui soit donné dans l’expérience.

Ce qui n’est qu’une certaine manière d’être, ou qu’un être d’une certaine espèce, n’est manifestement qu’une certaine manière de participer à l’être, et les limites de sa participation sont mesurées par la définition de son espèce. S’il y a des êtres par mode de participation, il doit y avoir d’abord un être par soi : est ponere aliquod ens quod est ipsum suum esse, c’est-à-dire un premier être qui soit l’acte pur d’être, et rien d’autre.

Auteur: Gilson Etienne

Info: Introduction à la philosophie chrétienne, Vrin, 2011, pages 46 à 54 * Les Anciens ont procédé à l'étude de la nature des choses selon l'ordre de la connaissance humaine. ** ils étaient contraints de poser que la matière n'avait pas de cause, et de nier totalement la cause efficiente. *** une certaine cause universelle des choses

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