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sécularisation

Il m’est apparu que la non-résistance du christianisme aux épidémies du modernisme résidait dans une perversion de la charité. Tout au moins qu’il s’agissait de la cause essentielle. [...]

[...] la charité, parmi toutes les vertus, est la plus humaine et la plus subjective de toutes, c’est celle qui implique l’engagement le plus total du sujet humain dans sa réalisation de la valeur spirituelle, puisque l’exigence d’amour s’adresse à notre être le plus intime. C’est avec mon propre cœur que je dois aimer. Dès lors, cette vertu, qui est la plus haute de toutes, est aussi la plus fragile et la plus corruptible, puisqu’elle est celle qui renferme la plus grande part d’humanité.

C’est pourquoi la charité peut se dégrader et se réduire à un sentiment purement humain, alors qu’elle doit avoir Dieu pour objet. Cependant, désireuse de se sacrifier – car la tendance oblative est toujours présente dans l’amour – la charité chrétienne, ayant perdu le sens de la transcendance divine, se retourne en quelque sorte contre elle-même. En rejetant toutes les beautés et toutes les formes de la religion pour l’amour du monde, elle a l’impression d’accomplir le plus héroïque sacrifice et de donner sa propre chair pour le salut des hommes. Dieu est vraiment l’Absolu de l’amour, puisqu’aimer Dieu, pour un être créé et relatif, c’est, d’emblée, s’ouvrir au Tout-Autre et donc renoncer totalement à soi. Mais lorsque l’amour ne se porte plus vers Cela seul qui peut l’accomplir, alors il retourne contre lui-même le désir de dépassement et de sacrifice qui l’habite.

Auteur: Borella Jean

Info: "Situation du catholicisme aujourd'hui", éditions L'Harmattan, Paris, 2023, pages 159-160

[ vertu théologale ] [ naturel-surnaturel ]

 

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transcendance

[...] la conception dionysienne se distingue de la conception scolastique comme le mode initiatique se distingue du mode simplement spéculatif, sans qu’on puisse cependant parler d’une opposition absolue, du moins chez les maîtres [...]. Mais il n’en est pas de même dans le thomisme tardif. Or, l’idée qu’il existe une raison entièrement naturelle est étrangère à la perspective dionysienne, comme à la vérité. Cette thèse, propre au néo-thomisme, dérive de son adoption d’un aristotélisme schématisé, et l’on ne peut nier que cet aristotélisme ne recèle une tendance foncièrement naturaliste, même s’il échappe par endroits à cette limitation cosmologisante. De ce "naturalisme", la théologie scolastique ne pouvait entièrement neutraliser les effets, ce qui devait susciter la réaction anti-intellectualiste, et même nominaliste, de la mystique affective, ains que la puissante révolte luthérienne, avec les conséquences que l’on sait. Au contraire, Denys [l’Aréopagite] enseigne, avec Platon, l’hétéronomie et l’incomplétude de la raison (il n’y a pas de pure nature) et son exigence naturelle d’un accomplissement surnaturel d’ordre intellectif et même supra-intellectif ou supra-noétique, si l’on veut. [...] Dans cette perspective, l’intelligence est à la fois moins et plus que ce qu’en conçoit le "philosophisme scolastique", pour reprendre une expression d’Étienne Gilson, car elle est surnaturelle par nature ; en d’autres termes, elle est d’essence métaphysique : de même que "chez S. Thomas, tout le mystère divin est déjà présent dans la nature même de l’intellect" [Lettres de Monsieur Etienne Gilson au père de Lubac, 1986, page 75], de même, pour Denys et les platoniciens, l’intellect (noûs) est déjà quelque chose de divin (théios).

Auteur: Borella Jean

Info: Dans "Lumières de la théologie mystique", éditions L'Harmattan, Paris, 2015, pages 92-93

[ complémentarité ] [ christianisme ] [ anti-dualisme ]

 

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étymologie

Analogia est un mot grec. Il se compose de logia qui dérive de logos et du préfixe ana. Logos a de multiples sens : discours, parole, pensée, notion, raison, rapport, etc. Les sens de la préposition ana ne sont pas moins nombreux. Les philologues y discernent trois thèmes principaux : celui d’élévation, "de bas en haut", celui de retour "en arrière" ou encore "en sens inverse", celui de répétition, de ce qui se produit "de nouveau". Ces trois thèmes se combinent dans la notion d’analogia qui exprime l’idée d’un rapport (logos) entre ce qui est en haut et ce qui est en bas (verticalité) parce que ce qui est en bas est comme ce qui est en haut (répétition), avec éventuellement l’idée d’un renversement (le plus petit comme analogue du plus grand). C’est ce que Guénon appellera très justement "l’analogie de sens inverse".

Le terme a été transféré littéralement du grec au latin, où il est cependant ressenti comme étranger. C’est pourquoi Cicéron, dans son commentaire au Timée de Platon (4,12) propose de le rendre par "comparaison" ou "proportion" : "Ce qui se dit analogia en grec pourra, en latin, se dire comparatio ou proportio." Mais il se trouve que, chez les Latins, proportio, qui traduisait assez exactement analogia, a pris souent le sens plus vague de "rapport", qui en latin s’est d’abord dit ratio (équivalent du grec logos). C’est pourquoi, quand il voudra, au début du Vie siècle, faire connaître aux Latins l’arithmétique grecque, le chrétien Boèce se verra dans l’obligation, pour rendre analogia, de subsister à proportio un nouveau terme : ce sera celui de proportionalitas, littéralement "proportionnalité".

Auteur: Borella Jean

Info: Penser l'analogie, L'Harmattan, Paris, 2012, pages 23-24

[ historique ] [ correspondance ]

 
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philosophes modernes

[…] la ratio est la lumière brisée et fragmentaire de l’intellectus. […]

La non distinction de l’intellectus et de la ratio paraît acquise chez Descartes. Dans la Deuxième Méditation métaphysique, où il entreprend de prouver que la nature de l’âme est plus aisée à connaître que celle du corps, Descartes, après avoir établi l’existence de cette nature, demande en quoi elle consiste et il répond : "Sum igitur res cogitans, id est mens, sive animus, sive intellectus, site ratio", c’est-à-dire : "je suis donc chose pensante, ou encore esprit, ou encore âme, ou encore intellect, ou encore raison". Ce qui fait difficulté dans ce texte, ce n’est point l’équivalence qu’il établit entre mens et animus, car une telle équivalence peut se réclamer d’une longue tradition, et on la rencontre dans diverses cultures. Mais il en va autrement pour intellectus et ratio, termes que la tradition philosophique antérieure avait presque constamment distingués.

Quant à la négation de l’intellectus, ou intellect intuitif, elle est l’œuvre de la philosophie kantienne. S’efforçant de prendre une conscience critique de la raison (Critique de la Raison pure), Kant n’y aperçoit pas ce pouvoir de connaissance intuitive (intellectus intuitivus) dont la dotait Descartes (sive intellectus, sive ratio). Et, puisqu’il n’y a pas d’intellectus, il n’y a point de métaphysique possible […]. La raison (Vernunft) devenant alors la faculté supérieure de connaissance, Kant est amené à inverser les rapports que toute la tradition philosophique antérieure avait admis, et à appeler entendement (Verstand, intellectus), l’activité cognitive inférieure, à savoir, celle qui revêt les connaissances sensibles d’une forme conceptuelle et que nous avons appelée mentale. De la confusion à l’inversion négatrice, tel est le chemin parcouru par la pensée occidentale.

Auteur: Borella Jean

Info: Amour et vérité, L’Harmattan, 2011, Paris, page 113

[ différence ]

 

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triforme corpus Christi

[…] le "Corps né de la Vierge", celui que nous appellerons le Corpus natum se présente lui-même, selon les Evangiles, sous trois aspects différents : il y a d’abord le Corps du Christ, tel qu’il est sorti du sein de la Vierge Marie et que les foules de Palestine ont connu comme véhicule de sa présence humaine (nous lui donnerons le nom de Corpus intactum ou integrum, parce qu’il existe alors dans la perfection de sa nature) ; il y a ensuite ce même Corps qui souffre sa passion et qui est marqué des stigmates de nos péchés (nous lui donnerons le nom de Corpus passum, c’est-à-dire de Corps souffrant, affecté par l’imperfection de notre nature) ; enfin, il y a le Corps ressuscité du Christ, Corps spirituel et cependant véritable parce qu’il est la vérité et l’essence permanente du Corps enfin révélées, ce que prouve précisément la Transfiguration (nous lui donnerons le nom de Corpus gloriosum, puisque la vraie perfection du corps humain ne se réalise que sous l’illumination de la grâce). Mais il est tout à fait étonnant de constater que cette triplicité d’aspects apparaît également dans le Corps-Eglise ou Corpus mysticum : l’Eglise militante, sur la terre, ne correspond-elle pas au Corpus intactum ? L’Eglise souffrante ne trouve-t-elle pas son modèle analogique dans le Corpus passum ? Et l’Eglise triomphante, au Ciel, n’est-elle pas figurée réellement par le rayonnement et la splendeur du Corpus gloriosum ? Quant au Corpus eucharisticum (ou Corps sacramentel), il est le lien d’unité opérative du Corpus natum et du Corpus mysticum, puisque, rendant le Corpus natum présent à l’intime de l’être de tous les chrétiens qui y communient, en réalisant leur union, il édifie le Corpus mysticum, auquel il est essentiellement ordonné.

Auteur: Borella Jean

Info: Le sens du surnaturel, L'Harmattan, 1997, pages 139-140

[ doctrine ] [ triple ] [ théologie chrétienne ] [ ternaire ]

 

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Sapience

L’identité dans l’altérité, c’est l’unité dans la multiplicité. C’est : "un" plus "un" plus "un", et ainsi de suite. C’est donc l’identité séparative. Parce que l’unité de l’Un divin se reflète en chaque être créé, chaque créature est "elle-même" et possède sa propre unité, mais du même coup, elle est séparée de toutes les autres créatures. C’est pourquoi nous parlons d’identité séparative. Et telle est la fonction cosmique de l’éternel masculin. Au contraire, concernant la fonction cosmique de l’éternel féminin, nous parlerons d’altérité unitive. C’est très exactement ce que réalise la Sophia divine. En elle est donné à Suso la révélation de l’unité ou de la coïncidence des opposés, c’est-à-dire, fondamentalement, la révélation de la possibilité du multiple. Plus encore, elle est cette possibilité même. A quelle condition, en effet, le multiple est-il possible ? [...] à la condition [...] que cette Unité soit conçue non comme unité massive et monolithique, comme la plénitude excluante de l’Étant suprême, mais comme l’espace infini, la matrice illimitée au sein de laquelle toutes les créatures trouveront de la place pour coexister sans se contredire, en d’autres termes, sans s’anéantir réciproquement.

[...] Le mystère de l’altérité n’est pas seulement le mystère de Dieu comme Autre de la créature, il est aussi et d’abord le mystère de la création comme Autre de Dieu. Ces deux mystères ne font qu’un et se conjoignent dans la divine Sophia. La Sophia désigne en Dieu son infinitude, son incirconscriptibilité, sa liberté réellement absolue qui donne à la multiplicité innombrable des créatures la possibilité métaphysique d’exister, la possibilité d’être là. Elle est le mystique et universel de toutes choses, elle est le jeu de l’être, elle donne à tout être du jeu pour exister.

Auteur: Borella Jean

Info: Dans "Lumières de la théologie mystique", éditions L'Harmattan, Paris, 2015, pages 152-153

[ sagesse ] [ définie ] [ masculin-féminin ] [ lîla ]

 
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christianisme

Si chaque vertu théologale peut être soumise à la corruption, c’est essentiellement parce que la "théologie" est divine et la "vertu" humaine. Le propre des vertus théologales, c’est en effet d’apprendre à la substance humaine à se conformer à sa finalité divine. Dans sa pratique, aucune vertu n’est de soi, sanctification. Elle prépare seulement la substance humaine à la réception de la grâce, bien que, dans sa réalité essentielle, elle corresponde à une qualité divine, et qu’ainsi elle soit une grâce en tant que Dieu consent miséricordieusement à laisser les créatures participer, selon leur capacité, à l’infini de Ses trésors. Nous disons par là que la vertu théologale présente un double aspect, existentiel dans sa réalité humaine, et essentiel dans sa réalité divine. Si la grâce du sacrement descend du Ciel vers la terre, la grâce de la vertu nous permet de monter de la terre vers le Ciel.

La vertu n’est au fond rien d’autre que la grâce de cette aspiration vers le Haut, et l’on peut dire à cet égard, puisque les vertus ont une essence commune, que chacune d’elles se retrouve dans les deux autres. La foi, adhésion à une connaissance anticipée, est l’espérance d’atteindre la Vérité de Dieu et l’amour de cette Vérité. L’espérance repose sur la foi, comme sur son motif initial et se justifie dans l’amour qui ne peut nous tromper. Enfin la charité combine la foi et l’espérance parce qu’elle réalise, autant que le comporte la nature de l’ici-bas, ce que la foi promet et ce que l’espérance attend. C’est pourquoi la charité, sur l’échelle des vertus qui monte de la terre vers le Ciel, est la plus proche du Ciel, quand encore elle n’y touche pas dans sa plus haute expression.

Auteur: Borella Jean

Info: Amour et vérité, L’Harmattan, 2011, Paris, pages 17-18

[ naturel-surnaturel ] [ triade ]

 

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confusion catégorielle

En effet, de même que les modernistes veulent ouvrir l’âme chrétienne à la totalité du multiple mondain, au mépris de la nature humaine, de même, dans leur orgueil, ils veulent écraser cette âme sous le poids de la transcendance divine ; ils prennent, disent-ils, l’Evangile à la lettre – à vrai dire, ils ne prennent de cette lettre que ce qui leur paraît s’accorder avec leur sensibilité idéologique, laquelle consiste essentiellement à se donner bonne conscience en condamnant les "riches" ou les "bourgeois" […]. Il y a, dans cette attitude, pensons-nous, comme une conséquence de la morale kantienne qui prétend affronter directement l’action humaine à l’Absolu, et refuse, comme impures, toutes les motivations naturelles. Il est évident qu’à jauger nos actions à l’aune de l’Universel, on ne risque pas d’en trouver une seule qui soit bonne, et le Christ lui-même a dit : "Que m’appelles-tu bon ? Dieu seul est bon". […] Mais ce qui est vrai dans la perspective d’une via negationis, d’une théologie et d’une spiritualité apophatiques, est un mensonge mortel au niveau de la voie commune, parce qu’il prétend à ce à quoi il n’a pas vraiment droit. […]

Il apparaît donc que les vertus naturelles ont pour fonction d’assurer l’équilibre de la substance humaine entre la pression du monde et celle de l’Absolu. La religion s’adressant a priori à une collectivité humaine, il faut aussi que cette collectivité puisse exister et que, d’une certaine manière, elle ignore le caractère radical des injonctions divines. "Mon Royaume n’est pas de ce monde". Cela ne signifie pas seulement qu’il se réalisera en des Cieux nouveaux et une Terre nouvelle ; cela signifie aussi qu’il ne peut se réaliser ici-bas. L’ordre du monde humain tel qu’il est ne saurait contenir le Royaume du Christ sans en périr instantanément.

Auteur: Borella Jean

Info: Amour et vérité, L’Harmattan, 2011, Paris, pages 48-49

[ psychique-spirituel ] [ hypocrisie ] [ naturel-surnaturel ] [ degrés herméneutiques ] [ sécularisation ]

 

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ratio

La raison pure est une abstraction, légitime seulement dans la mesure où l’on est tenu de la considérer en elle-même, à son titre d’instance cognitive (par exemple dans certains débats logico-philosophiques), et non dans son fonctionnement réel. De ce dernier point de vue, qui est celui qu’impose l’existence de philosophies historiquement considérées, la raison naturelle est aussi bien une raison culturelle, c’est-à-dire que les œuvres dont on lui attribue la paternité sont le produit, rationnellement élaboré, d’une culture déterminée. Dans son essence, la raison est toujours la même, et si l’on dégage les règles formelles de son fonctionnement – ce qu’on appelle la logique – on constate qu’elles sont partout identiques. Mais la raison n’est pure et identique à elle-même dans son intemporelle universalité qu’en tant qu’elle ne s’applique à rien et ne sert à rien. Dès qu’elle entre en contact avec les matières qu’elle traite, elle doit composer avec elles et se soumettre à leurs déterminations naturelles. En outre, en accomplissant sa tâche au sein d'une certaine culture, elle en reçoit des suggestions, des précompréhensions intuitives, des inspirations instinctives qui confèrent à la raison en exercice une forme particulière et définissent un régime spécifique de rationalité. C’est pourquoi il y a aussi une histoire de la raison, spécialement en Occident. 

S’agissant de cette histoire, nous nous risquerions volontiers à distinguer, très approximativement, quatre régimes différents de rationalité. On aurait ainsi : 1 – le régime platonicien d’une raison intellective hiérarchiquement ordonnée au divin ; 2- le régime aristotélico-thomiste d’une raison logique soumise à la révélation, mais encore pénétrée d’intellectivité ; 3 – le régime kantien d’une raison scientifico-critique horizontalement contreposée aux croyances religieuses ; 4 – le régime cybernétique ou combinatoire d’une raison déconstruite et décentrée, livrée au pouvoir de ses déterminations économiques, sociales ou ethnologiques.

Auteur: Borella Jean

Info: Dans "Lumières de la théologie mystique", éditions L'Harmattan, Paris, 2015, pages 60-61

[ historique ]

 
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sécularisation

Une société tout entière peut perdre complètement l’esprit de foi, le sens du surnaturel, et le remplacer par un esprit d’incrédulité. Il est bien clair que depuis deux ou trois siècles, c’est précisément ce qui se produit dans l’Occident chrétien. […] Comme tout sens, le sens du surnaturel, l’intuition originelle de la foi, est conscience d’une réalité. […] Par lui, l’humanité "sait", dans la substance même de son être, que tout ce dont parle la Révélation est possible, bien qu’en dehors de notre expérience ordinaire. Sans lui, tout le discours religieux tombe d’un seul coup du côté de l’absurde et de l’invraisemblable. Or toutes les entreprises intellectuelles de l’Occident moderne tendent à suggérer à la conscience humaine qu’il n’y a pas d’ "autre" réalité, et qu’il ne peut pas y en avoir d’autre. C’est pourquoi, lorsque la conscience chrétienne succombe à ces suggestions, elle produit l’hérésie que le pape saint Pie X a très exactement appelée : le modernisme. […] la démarche constitutive de cette hérésie, c’est d’adopter en tout le point de vue du monde moderne, lequel est entièrement défini par sa négation de la réalité surnaturelle. Nous avons montré que cette négation consiste dans la fermeture de l’œil du cœur, racine ontologique de l’acte de foi, condition ultime et première, dans l’ordre humain, de sa possibilité. Il en résulte que ce troisième type d’hérésie ne sera pas une hérésie comme les autres. Attaquant l’acte de foi à sa racine, l’hérésie moderniste produit la condition générale de toute hérésie. Ce n’est pas une hérésie déterminée, une hérésie de la foi objective ou subjective, c’est une hérésie portant sur la condition même de possibilité de toute foi, sur la signification première de toute foi (objective ou subjective), et non point hérésie religieuse, mais hérésie ontologique et même métaphysique […].

Auteur: Borella Jean

Info: Le sens du surnaturel, L'Harmattan, 1997, pages 73-74

[ naturel-surnaturel ] [ actualisation impossible ]

 

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