Spéculativement, l’idée de progrès rend le devenir inintelligible parce que, comme nous l’avons dit, elle utilise inconsciemment deux concepts antinomiques, ceux de continuité et de discontinuité. Nous pourrions dire de même que l’idée de progrès – absolu – détruit l’idée de progrès – relatif – dont pourtant, comme nous l’avons montré, elle n’est qu’une extension. Dans le progrès absolu, on ne considère aucun processus déterminé, mais tout processus en général. On compare n’importe quoi à n'importe quoi, par exemple on compare un symbole peau-rouge de la divinité – un cercle et un point – avec telle définition d’une théodicée philosophique et l’on conclut à la supériorité de la seconde sur la première sous prétexte que la première est inapte à l’abstraction, alors qu’en réalité le symbole est bien plus riche et plus vrai que le concept. Enfin, il n’y a pas de norme de référence. […] Ce sont des imaginations du futur qui répondent à l’imagination du passé qu’est le progrès… En fait, le progrès absolu est à lui-même sa propre norme.
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Info: Tradition et modernité, L'Harmattan, Paris, 2023, page 158-159
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