évolution psychologique

L’amour génital est même doublement artificiel. Premièrement son interférence constante avec une satisfaction sexuelle libre (génitale et prégénitale) établit des résistances externes puis internes contre le plaisir, et favorise ainsi le développement des passions, pour que l’homme puisse, à certains moments privilégiés, vaincre ces résistances. Deuxièmement, l’obligation de faire preuve de considération et de gratitude de façon prolongée et durable nous force à régresser à la forme archaïque, infantile de l’amour tendre, voire nous empêche de jamais nous en éloigner. L’homme peut donc être considéré comme un animal qui, même à l’âge mûr, s’attarde à une forme d’amour infantile.

Il est intéressant de savoir que les anatomistes ont découvert des faits semblables bien avant nous. Ils ont découvert que, sur le plan anatomique, l’homme ressemble à l’embryon du singe plutôt qu’au singe adulte. Les anatomistes en ont conclu que l’homme présente un retard du développement biologique, que du point de vue de sa structure c’est un fœtus, ou plutôt qu’il est fœtalisé, mais que nonobstant il a atteint un fonctionnement génital complet. Il y a beaucoup d’autres exemples dans le règne animal où un embryon acquiert des fonctions génitales bisexuelles pleinement développées ; ce sont des embryons dits néoténiques. L’amour génital est le parallèle exact de ces formes. On trouve une fonction génitale pleinement développée, associée à un comportement infantile ; en d’autres termes, l’homme est un embryon néoténique, non seulement sur le plan anatomique, mais aussi sur le plan psychique.

Ce raisonnement explique certaines particularités de la génitalité chez l’homme. On sait à quel point l’amour génital est instable, surtout si on le compare aux éternelles formes "prégénitales". Fonction phylogénétiquement nouvelle, il n’est pas encore solidement établi ; l’homme n’a pas encore eu assez de temps, pour ainsi dire, pour s’adapter à cette forme d’amour, en fait il doit y être éduqué à chaque nouvelle génération. L’amour oral par exemple ne demande manifestement aucune éducation de cette sorte. Et réciproquement, l’amour oral ne risque pas la faillite, tandis que l’amour génital est beaucoup plus précaire.

Auteur: Balint Michael

Info: Dans Amour primaire et technique psychanalytique, Payot, 2001

[ opposition amour-tendresse ] [ hypothèse ]

 

Commentaires: 7

Ajouté à la BD par Coli Masson

Commentaires

miguel, filsdelapensee@bluewin.ch
2021-04-30 03:07
surfaces érogènes ?
Coli Masson, colimasson@live.fr
2021-04-30 16:51
C'est pas vraiment le sujet.
miguel, filsdelapensee@bluewin.ch
2021-04-30 17:15
bon, je vais relire alors ;-)
miguel, filsdelapensee@bluewin.ch
2021-05-01 05:28
Okay... je comprends un peu mieux. Mais y'a un manque de précision, j'ai l'impression qu'il parle d'un humain indifférencié, sans genre... Je sens un biais
Coli Masson, colimasson@live.fr
2021-05-01 16:50
Bah... l'amour génital semble moins développé que l'amour prégénital (tendresse) puisque l'amour génital finit par perdre de son intensité et l'amour prégénital lui survit et semble finalement arrondir les angles. D'où la notion d'homme néoténique. La question du genre n'est pas impliquée car il est supposé que c'est pareil pour homme et femme, et d'ailleurs pourquoi ne le serait-ce pas, puisqu'ici l'objet de cet amour importe peu ?
miguel, filsdelapensee@bluewin.ch
2021-05-01 16:56
Pas sûr pas sûr ... ;-)
Coli Masson, colimasson@live.fr
2021-05-02 16:32
La durée de domination de l'amour génital varie peut-être un peu d'un sexe à l'autre mais là encore, les généralités ne disent pas tout.