Citation
Catégorie
Tag – étiquette
Auteur
Info
Rechercher par n'importe quelle lettre



nb max de mots
nb min de mots
trier par
Dictionnaire analogique intriqué pour extraits... Recherche mots ou phrases tous azimuts... Outil de précision sémantique et de réflexion communautaire... Voir aussi la rubrique mode d'emploi. Jetez un oeil à la colonne "chaînes". ATTENTION, faire une REINITIALISATION après  une recherche complexe. Et utilisez le nuage de corrélats ... Lire la suite >>
Résultat(s): 3
Temps de recherche: 0.0286s

nord-sud

Les "élites" autoproclamées de Davos ont peur. Très peur. Lors des réunions du Forum économique mondial de cette semaine, le maître à penser Klaus Schwab - affichant son numéro de méchant de James Bond - n'a cessé de répéter un impératif catégorique : nous avons besoin de "coopération dans un monde fragmenté".

Bien que son diagnostic de la "fragmentation la plus critique" dans laquelle le monde est aujourd'hui embourbé soit, comme on pouvait s'y attendre, sombre, Herr Schwab maintient que "l'esprit de Davos est positif" et qu'au final, nous pourrons tous vivre heureux dans une "économie verte et durable".

Ce que Davos a su faire cette semaine, c'est inonder l'opinion publique de nouveaux mantras. Il y a le "nouveau système" qui, compte tenu de l'échec lamentable de la grande réinitialisation tant vantée, ressemble maintenant à une mise à jour hâtive du système d'exploitation actuel, qui a été ébranlé.

Davos a besoin de nouveau matériel, de nouvelles compétences en programmation, voire d'un nouveau virus. Pourtant, pour l'instant, tout ce qui est disponible est une "polycrise" ou, en langage de Davos, un "ensemble de risques mondiaux liés entre eux et dont les effets s'aggravent". 

En clair : une parfaite tempête.

Les insupportables raseurs de l'île "Diviser pour régner" du nord de l'Europe viennent de découvrir que la "géopolitique", hélas, n'est jamais vraiment entrée dans le pénible tunnel de la "fin de l'histoire" : à leur grande surprise, elle est maintenant centrée - à nouveau - sur le Heartland, comme elle le fut pendant la majeure partie de l'histoire connue.

Ils se plaignent d'une géopolitique "menaçante", synonyme de Russie-Chine, l'Iran en plus.

Mais la cerise sur le gâteau alpin, c'est l'arrogance/la stupidité qui révèle le jeu : la City de Londres et ses vassaux sont livides parce que le "monde créé par Davos" s'effondre rapidement.

Davos n'a pas " inventé " le monde, si ce n'est son propre simulacre.

Davos n'a jamais rien compris, car ces "élites" ont toujours été occupées à faire l'éloge de l'Empire du Chaos et de ses "aventures" meurtrières dans le Sud.

Non seulement Davos n'a pas su prévoir toutes les crises économiques majeures récentes, mais surtout la "tempête parfaite" actuelle, liée à la désindustrialisation de l'Occident collectif engendrée par le néolibéralisme.

Et, bien sûr, Davos n'a aucune idée de la véritable remise à zéro qui tend à aller vers la multipolarité. 

Des leaders d'opinion autoproclamés sont occupés à "redécouvrir" qu'un siècle plus tard La Montagne magique de Thomas Mann se déroule à Davos - "avec pour toile de fond une maladie mortelle et une guerre mondiale imminente".

Eh bien, de nos jours, la "maladie" - arme entièrement bio-institutionnalisée - n'est pas vraiment mortelle en soi. Et la "guerre mondiale imminente" est de fait activement encouragée par une cabale de néo-cons et autres néolibéraux américains : un État profond non élu, non responsable, bipartisan et même pas soumis à une idéologie. Le criminel de guerre centenaire Henry Kissinger ne l'a toujours pas compris.

Le panel de Davos sur la démondialisation a multiplié les non-séquences, mais le ministre hongrois des affaires étrangères, Peter Szijjarto, a au moins apporté une dose de réalité.

Quant au vice-premier ministre chinois Liu He, avec sa vaste connaissance de la finance, de la science et de la technologie, il a au moins été très utile pour définir les cinq grandes lignes directrices de Pékin pour l'avenir prévisible - au-delà de la sinophobie impériale habituelle.

La Chine se concentrera sur l'expansion de la demande intérieure, le maintien de chaînes industrielles et d'approvisionnement "fluides", le "développement sain du secteur privé", l'approfondissement de la réforme des entreprises d'État et la recherche d'"investissements étrangers attrayants".

Résistance russe, précipice américain 

Emmanuel Todd n'était pas à Davos. Mais c'est l'anthropologue, historien, démographe et analyste géopolitique français qui a fini par hérisser toutes les plumes supposément compétentes de l'Occident collectif ces derniers jours avec un objet anthropologique fascinant : une interview basée sur la réalité.

Todd s'est entretenu avec Le Figaro - journal de prédilection de l'establishment et de la haute bourgeoisie française. L'interview a été publiée vendredi dernier à la page 22, entre les proverbiales tirades russophobes et avec une mention extrêmement brève en bas de la première page. Il fallait donc que les gens fassent des efforts pour la trouver.   

Todd a plaisanté en disant qu'il avait l'image - absurde - d'un "rebelle destroy" en France, alors qu'au Japon, il est respecté, qu'il fait l'objet d'articles dans les médias grand public et que ses livres sont publiés avec grand succès, y compris le dernier (plus de 100 000 exemplaires vendus) : "La troisième guerre mondiale a déjà commencé".

Il est significatif que ce best-seller japonais n'existe pas en français, étant donné que toute l'industrie de l'édition basée à Paris suit la ligne de l'UE et de l'OTAN sur l'Ukraine.

Le fait que Todd ait raison sur plusieurs points est un petit miracle dans le paysage intellectuel européen actuel, d'une myopie abyssale (il existe d'autres analystes, notamment en Italie et en Allemagne, mais ils ont bien moins de poids que Todd).

Voici le résumé des thème principaux abordés par Todd.

- Une nouvelle guerre mondiale est en cours : En "passant d'une guerre territoriale limitée à un affrontement économique mondial, entre l'Occident collectif d'un côté et la Russie liée à la Chine de l'autre, cette guerre est devenue une guerre mondiale".

- Selon Todd, le Kremlin a commis une erreur en calculant qu'une société ukrainienne décomposée s'effondrerait immédiatement. Bien entendu, il n'explique pas en détail comment l'Ukraine a été militarisée à outrance par l'alliance militaire de l'OTAN.

- Todd a raison lorsqu'il souligne que l'Allemagne et la France sont devenues des partenaires mineurs de l'OTAN et n'étaient pas au courant de ce qui se tramait en Ukraine sur le plan militaire : "Ils ne savaient pas même que les Américains, les Britanniques et les Polonais pouvaient permettre à l'Ukraine de mener une guerre prolongée. L'axe fondamental de l'OTAN est désormais Washington-Londres-Varsovie-Kiev".

- La principale révélation de Todd est meurtrière : "La résistance de l'économie russe conduit le système impérial américain vers le précipice. Personne n'avait prévu que l'économie russe tiendrait face à la 'puissance économique' de l'OTAN".

- Conséquence, "les contrôles monétaires et financiers américains sur le monde peuvent s'effondrer, et avec eux la possibilité pour les USA de financer pour rien leur énorme déficit commercial".

- "C'est pourquoi nous sommes dans une guerre sans fin, dans un affrontement dont la conclusion est l'effondrement de l'un ou l'autre." 

- Sur la Chine, Todd pourrait faire penser à une version plus féroce de celle de Liu He à Davos : "C'est le dilemme fondamental de l'économie américaine : elle ne peut pas faire face à la concurrence chinoise sans importer une main-d'œuvre chinoise qualifiée."

- Quant à l'économie russe, "elle accepte les règles du marché, mais avec un rôle important de l'État, et elle garde la flexibilité de former des ingénieurs qui permettent des adaptations, industrielles et militaires."

- Tout cela nous amène, une fois de plus, à la globalisation, d'une manière que les tables rondes de Davos ont été incapables de comprendre : "Nous avons tellement délocalisé notre activité industrielle que nous ne savons pas si notre production de guerre peut être soutenue".

- Dans une interprétation plus érudite de ce sophisme du "choc des civilisations", Todd s'intéresse au soft power et arrive à une conclusion surprenante : "Sur 75 % de la planète, l'organisation de la parentalité était de type patrilinéaire*, et c'est pourquoi nous pouvons identifier une forte compréhension de la position russe. Pour le collectif non-occidental, la Russie affirme un conservatisme moral rassurant."

- Ainsi, ce que Moscou a réussi à faire, c'est de "se repositionner comme l'archétype d'une grande puissance, non seulement "anticolonialiste" mais aussi patrilinéaire et conservatrice en termes de mœurs traditionnelles."

Sur la base de tout ce qui précède, Todd brise le mythe vendu par les "élites" de l'UE/OTAN - Davos inclus - selon lequel la Russie est "isolée", en soulignant comment les votes à l'ONU et le sentiment général à travers le Sud global caractérisent la guerre, "décrite par les médias grand public comme un conflit de valeurs politiques, en fait, à un niveau plus profond, comme un conflit de valeurs anthropologiques."      

Entre lumière et obscurité

Se pourrait-il que la Russie - aux côtés du vrai Quad, tel que je l'ai défini (avec la Chine, l'Inde et l'Iran) - l'emporte sur le terrain des enjeux anthropologiques ?  

Le vrai Quad a tout ce qu'il faut pour s'épanouir en un nouveau foyer interculturel d'espoir dans un "monde fragmenté".

Mélangez la Chine confucéenne (non dualiste, sans divinité transcendante, mais avec le Tao qui coule à travers tout) avec la Russie (chrétienne orthodoxe, vénérant la divine Sophia) ; l'Inde polythéiste (roue de la renaissance, loi du karma) ; et l'Iran chiite (islam précédé par le zoroastrisme, l'éternelle bataille cosmique entre la Lumière et les Ténèbres).

Cette unité dans la diversité est certainement plus attrayante, et plus édifiante, que l'axe de la guerre éternelle.

Le monde en tirera-t-il une leçon ? Ou, pour citer Hegel - "ce que nous apprenons de l'histoire, c'est que personne n'apprend de l'histoire" - sommes-nous irrémédiablement condamnés ?

Auteur: Escobar Pepe

Info: https://www.presstv.ir, 18 janvier 2023, *système de filiation dans lequel chacun relève du lignage de son père

[ ukraine 2023 ] [ point chaud ] [ inertie patriarcale ]

 

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par miguel

nord-sud

Ils sont venus. Ils ont détruit le bunker. Ils ont fui. Et puis ils ont préparé le terrain pour contrôler le récit via une opération de relations publiques massive.


Le président des États-Unis a salué  la victoire " spectaculaire "  des B-2 volant des États-Unis vers l’Asie occidentale pour larguer des MOP (" Massive Ordnance Penetrators ") au-dessus de Fordow au milieu de la nuit du 22 juin (de manière significative, la même date que le début de l’opération Barbarossa en 1941).

Les fonctionnaires de Trump 2.0 se sont réjouis de la disparition du programme nucléaire iranien.

Voilà pour la télé-réalité. Passons maintenant à la réalité. Mannan Raisi, député du  Majlis  (Parlement) iranien de la ville sainte de Qom, a résumé la situation : - Contrairement aux déclarations du  président américain menteur , les installations nucléaires de Fordow n'ont pas été sérieusement endommagées. Seules les structures en surface, qui peuvent être restaurées, ont été détruites. De plus, tout ce qui pouvait représenter un danger pour la population a été évacué au préalable. Aucune émission nucléaire n'a été signalée. Les fausses affirmations de Trump sur la " destruction de Fordow " sont réfutées par le fait que les attaques étaient si superficielles qu'il n'y a même pas eu de victimes sur le site. 

Ce qui compte vraiment, c'est que l'Empire du Chaos, en un seul raid – spectaculairement criminel – a détruit la charte de l'ONU (une fois de plus) ; le droit international (une fois de plus) ; le TNP (peut-être pour de bon) ; la constitution américaine ; la " communauté internationale " ; et la propre base MAGA de Trump.

Le Sud global fait désormais les calculs et en tire les conclusions qui s’imposent. " La paix par la force " Le président américain est désormais responsable de deux guerres : un génocide et une attaque non provoquée par une superpuissance nucléaire au nom d’une puissance nucléaire contre une puissance non nucléaire.

La réponse du CGRI fut immédiate : la véritable guerre commence maintenant. L'axe sioniste en paiera le prix fort. Il ne s'agira pas d'une guerre à grande échelle contre l'Empire : c'est une stratégie totalement anti-stratégique. Ce qui se produira, c'est une mort à plusieurs niveaux, à coups de mille coups.

C'était déjà le cas le matin du 23 juin. L'Iran a lancé pas moins de cinq vagues de missiles  multidirectionnels, couvrant tout Israël, y compris de nouvelles cibles comme le port et la centrale électrique d'Ashdod. Le taux d'interception israélien est tombé sous la barre des 50 %. L'enfer s'est déchaîné, des dysfonctionnements des sirènes d'alerte aux coupures de courant. Les députés ont pris la fuite. Un avion de sauvetage d'El Al en provenance de New York a été contraint de faire demi-tour en plein vol lorsque les missiles ont commencé à voler.

Le message : tout Israël est désormais une cible légitime – atteinte en quelques minutes par les missiles Kheybar-Shakan, Emad, Qadr et Fattah-.

Le détroit d'Ormouz, la carte ultime.


 Les priorités renforcées de l’Iran incluent : l’arrêt de la guerre contre Gaza et le sud du Liban ; " faire évoluer " la doctrine nucléaire (tous les paris sont ouverts) ; les assassinats ciblés de dirigeants sionistes ; davantage de frappes contre le Mossad ; davantage de barrages de missiles sur Tel Aviv, Haïfa et Dimona.

Il n'y aura pas de guerre directe contre l'Empire du Chaos. Le blocus du détroit d'Ormuz est la carte iranienne ultime, et non la carte nucléaire : elle ne sera pas utilisée pleinement pour l'instant. Au mieux, il pourrait y avoir un blocus partiel du transport de pétrole vers l'Occident collectif – fragmenté.

Une ancienne source importante de l’État profond a confirmé que " la CIA a informé l’administration Trump que la Chine était résolument opposée à la fermeture du  détroit d’Ormuz , donc Trump a procédé au bombardement. "

La fermeture du détroit d'Ormuz déclencherait une dépression mondiale d'une ampleur insoupçonnée. La perte de plus de 20 % des réserves mondiales de pétrole entraînerait l'implosion de plus de deux quadrillions de dollars de produits dérivés, comme le prévoyaient déjà les projections de Goldman Sachs à la fin des années 2010. Warren Buffett a décrit ce phénomène comme une réaction en chaîne après une explosion nucléaire.

Dans l'état actuel des choses, Téhéran a tiré une leçon de la manière la plus brutale. Ce n'est pas que les dirigeants iraniens aient agi de manière immorale : au contraire, leur foi en la diplomatie et en des négociations sérieuses s'est révélée en totale contradiction avec le modus operandi totalement dévoyé de l'empire américain.

Le ministre iranien des Affaires étrangères, Abbas Araghchi, a résumé la situation. L'Iran négociait avec les États-Unis " lorsqu'Israël a décidé de faire exploser cette diplomatie ". Puis l'Iran discutait " avec les E3/UE lorsque les États-Unis ont décidé de faire exploser cette diplomatie ". Il est donc absurde d'ordonner à l'Iran de " revenir " à la table des négociations : " Comment l'Iran peut-il revenir à un point qu'il n'a jamais quitté, et encore moins fait exploser ? "

Lors du forum de Saint-Pétersbourg, le président Poutine a clairement affirmé : " Nous soutenons l'Iran et la lutte pour ses intérêts légitimes, notamment l'utilisation pacifique de l'énergie atomique. " Il a ajouté, point crucial : " Ceux qui prétendent que la Russie n'est pas un partenaire fiable sont des provocateurs. "

Poutine lui-même avait déclaré plus tôt cette semaine que la Russie avait proposé de renforcer la défense aérienne de l'Iran, mais que cette offre n'avait pas été retenue. Il est également notoire que, contrairement au traité avec la Corée du Nord, l'accord de partenariat stratégique russo-iranien ne comportait pas de clause de sécurité collective.

Cela est peut-être sur le point de changer.

Il n'y a pas encore eu de fuites importantes concernant la  rencontre Poutine-Araghchi, mais des sujets extrêmement délicats auraient dû être abordés. Poutine a réaffirmé : " L'agression absolument injustifiée contre l'Iran est sans fondement et sans justification. " Puis, il a ajouté, de manière cryptique : " La Russie prend des mesures pour soutenir le peuple iranien. "

Aujourd'hui, Poutine rencontre le ministre iranien des Affaires étrangères Araghchi à Moscou.

Personne ne devrait s'étonner si l'Iran décide de se doter de l'arme nucléaire pour dissuader l'axe sioniste. Une option évoquée par certains analystes – bien qu'extrêmement délicate à plusieurs égards – serait un partenariat de sécurité complet avec la Russie et peut-être la Chine, l'Iran étant placé sous leur parapluie nucléaire.

Après tout, il s’agit des trois principales nations des BRICS – le triangle Primakov remanié et la guerre de l’Empire sont fondamentalement une guerre contre les BRICS.

Ce nouvel accord permettrait au moins de maintenir  l’enrichissement nucléaire de l’Iran  comme un processus civil, scientifique et non militaire, permettant au partenariat stratégique russo-chinois de superviser l’enrichissement de l’uranium tout en fournissant des garanties de sécurité à l’Iran.

En outre, cela constituerait une garantie de sécurité pour le corridor international de transport Nord-Sud (INSTC) – qui est dans l’intérêt national stratégique de la Russie.

Le point de vue chinois est une autre question très complexe. Il existe une sorte de consensus parmi les groupes de réflexion chinois : l’Iran devrait, plus que jamais, renforcer son système de défense aérienne. Cela implique probablement d’accepter la proposition russe de coopération dans ce domaine.


Un long nuage sombre descend

L'entrée de Trump dans la guerre – suicidaire – menée par Israël et les néoconservateurs américains contre l'Iran ne fait qu'ajouter une nouvelle dimension à la situation. C'était prévisible depuis au moins la fin des années 1990 : la même stratégie consistant à contrôler les ressources énergétiques de l'Asie occidentale pour renforcer la puissance économique de l'Empire du Chaos, tout en intimidant le Sud global : n'envisageons même pas de déroger à notre ordre unilatéral.

Même le président des États-Unis lui-même a révélé la vérité, en majuscules : "Si le régime iranien actuel est incapable de RENDRE L'IRAN GRAND À NOUVEAU, pourquoi n'y aurait-il pas de changement de régime ?  "

L'éminent professeur Michael Hudson, parmi d'autres, a résumé les enjeux : " L'Iran n'est pas seulement la clé de voûte du contrôle total du Proche-Orient et de ses réserves de pétrole et de dollars. Il est également un maillon essentiel du programme chinois  la Ceinture et la Route  pour une nouvelle route de la soie ferroviaire vers l'Occident. Si les États-Unis parviennent à renverser le gouvernement iranien, cela interrompra le long corridor de transport que la Chine a déjà construit et espère étendre plus à l'ouest. L'Iran est également un élément clé pour bloquer le commerce et le développement russes via la mer Caspienne et l'accès au sud, en contournant le canal de Suez. Et sous contrôle américain, un régime client de l'Iran pourrait menacer la Russie depuis son flanc sud. »

Il n’est donc pas étonnant que le changement de régime à Téhéran – c’est l’objet de toute cette guerre – soit une question d’intérêt national suprême pour les élites américaines, dans le sens souligné par le professeur Hudson d’un " empire coercitif d’États clients observant l’hégémonie du dollar en adhérant au système financier international dollarisé ".

Comparez maintenant tout ce qui précède avec la teneur des discussions du Forum économique international de Saint-Pétersbourg  (SPIEF)  la semaine dernière. Le forum s'est terminé dans la soirée du 20 juin. Les États-Unis ont attaqué l'Iran au milieu de la nuit du 22 juin.

La quasi-totalité des pays du Sud étaient présents à Saint-Pétersbourg ; au moins 15 000 personnes. Plus d'un millier de contrats ont été signés, pour un montant de plus de 80 milliards de dollars, selon Anton Kobakov, secrétaire exécutif du comité d'organisation du SPIEF.

Il y avait des panels éclairants partout : sur les défis de la route maritime du Nord, l’un des principaux corridors de connectivité du 21e siècle ; sur les investissements mutuels entre la Russie et la Chine ; sur la réforme du système financier international ; sur la lutte contre les fausses nouvelles – une industrie dans laquelle l’Occident excelle – et l’IA contrôlant tous les récits ; sur les BRICS, l’OCS, l’UEEA, l’ASEAN, l’INSTC.

Lors de la séance plénière,  les pays du Sud  et les BRICS étaient pleinement représentés : Russie, Chine, Indonésie (le président Prabowo était l’invité d’honneur), Afrique du Sud et Bahreïn. Le président Poutine est allé droit au but : " La Russie et la Chine ne façonnent pas le nouvel ordre mondial ; il se lève naturellement, comme le soleil. Nous ne faisons que préparer le terrain pour un meilleur équilibre. "

Mais un nuage noir s'abat sur nous, tandis que l'Empire du Chaos ne ménagera aucun effort pour bloquer l'aube. Le représentant de la Russie à l'ONU, Vassili Nebenzia, l'a dit avec une précision cinglante : « Les États-Unis ont ouvert la boîte de Pandore (…) Personne ne sait quelles nouvelles catastrophes et souffrances cela entraînera. »




 

Auteur: Escobar Pepe

Info: 25 juin 2025

[ géopolitique ]

 

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par Le sous-projectionniste

nord-sud

L’Âge de la colère Parfois, après une longue attente, apparaît un livre qui écorche l’esprit du temps, brillant comme un diamant fou. Age of Anger, de Pankaj Mishra, auteur aussi du livre fondateur From the Ruins of Empire, pourrait bien en être le dernier avatar.

Pensez à ce livre comme à une ultime arme – conceptuelle – mortelle, fichée dans les cœurs et les esprits d’une population dévastée d’adolescents cosmopolites déracinés 1 qui s’efforcent de trouver leur véritable vocation, au fur et à mesure que nous traversons péniblement la plus longue période – le Pentagone dirait infinie – de guerres mondiales ; une guerre civile mondiale – que dans mon livre 2007 Globalistan j’ai appelée " Liquid War " : Guerre nomade.

L’auteur, Mishra, est un pur produit, subtil, de East-meets-West 2. Il soutient, pour l’essentiel, qu’il est impossible de comprendre le présent si nous ne reconnaissons pas la prégnance souterraine de la nostalgie du mal du pays, qui contredit l’idéal du libéralisme cosmopolite, incarné dans une " société commerciale universelle d’individus rationnels, conscients de leurs intérêts personnels ", conceptualisée par les Lumières via Montesquieu, Adam Smith, Voltaire et Kant.

Le vainqueur de l’histoire est finalement le récit aseptisé des Lumières bienveillantes. La tradition du rationalisme, de l’humanisme, de l’universalisme et de la démocratie libérale était censée avoir toujours été la norme. Il était " manifestement trop déconcertant ", écrit Mishra, " de reconnaître que la politique totalitaire cristallisait des courants idéologiques – racisme scientifique, rationalisme chauvin, impérialisme, technicisme, politique esthétisée, utopie, ingénierie sociale " qui bouleversaient déjà l’Europe à la fin du XIXe siècle. Ainsi, évoquant " le regard furtif en arrière, au-dessus de l’épaule, vers la terreur primitive ", de T.S. Eliot –, qui a finalement conduit l’Ouest à se dresser contre Le Reste du Monde –, nous devons regarder les précurseurs. Fracasser le Palais de Cristal

Entre en scène Eugène Onéguine de Pouchkine, " le premier d’une grande lignée d’hommes inutiles dans la fiction russe ", avec son chapeau de Bolivar, tenant une statue de Napoléon et un portrait de Byron, allégorie de la Russie essayant de rattraper l’Occident, " une jeunesse spirituellement déchaînée avec une conception quasi-byronienne de la liberté, encore pleine du romantisme allemand ". Les meilleurs critiques des Lumières devaient être Allemands et Russes, derniers venus à la modernité politico-économique. Deux ans avant de publier ses étonnants Carnets du sous-sol, Dostoïevski, dans sa tournée en Europe occidentale, voyait déjà une société dominée par la guerre de tous contre tous, où la plupart étaient condamnés à être perdants.

À Londres, en 1862, à l’Exposition internationale au Palais de Cristal, Dostoïevski eut une illumination : " Vous prenez conscience d’une idée colossale […] qu’il y a ici la victoire et le triomphe. Vous commencez même vaguement à avoir peur de quelque chose. " Tout stupéfié qu’il était, Dostoïevski, plutôt astucieux, a pu observer comment la civilisation matérialiste était tout autant renforcée par son glamour que par sa domination militaire et maritime.

La littérature russe a finalement cristallisé le crime de hasard comme le paradigme de l’individualité savourant son identité et affirmant sa volonté – thème repris plus tard, au milieu du XXe siècle, par l’icône de la Beat Generation William Burroughs, qui prétendait que tirer au hasard était son frisson ultime.

Le chemin avait été tracé pour que le festin des mendiants commence à bombarder le Palais de Cristal – même si, comme Mishra nous le rappelle : " Les intellectuels du Caire, de Calcutta, de Tokyo et de Shanghai lisaient Jeremy Bentham, Adam Smith, Thomas Paine, Herbert Spencer et John Stuart Mill " pour comprendre le secret de la bourgeoisie capitaliste en perpétuelle expansion.

Et ceci après que Rousseau, en 1749, a posé la pierre angulaire de la révolte moderne contre la modernité, aujourd’hui éparpillée dans un désert où les échos se répondent, le Palais de Cristal est de facto implanté dans des ghettos luisants partout dans le monde.

Le Bwana des Lumières : lui mort, Missié

Mishra crédite l’idée de son livre à Nietzsche, en commentant la querelle épique entre l’envieux plébéien Rousseau et Voltaire, l’élitiste serein – qui a salué la Bourse de Londres, quand elle est devenue pleinement opérationnelle, comme l’incarnation laïque de l’harmonie sociale.

Mais ce fut Nietzsche qui finit par devenir l’acteur central, en tant que féroce détracteur du capitalisme libéral et du socialisme, faisant de la promesse séduisante de Zarathoustra un Saint Graal attractif pour les bolcheviks – Lénine le haïssait –, le gauchiste Lu Xun en Chine , les fascistes, anarchistes, féministes et hordes d’esthètes mécontents.

Mishra nous rappelle également comment " les anti-impérialistes asiatiques et les barons voleurs américains empruntent avec empressement " à Herbert Spencer, " le premier penseur véritablement mondial " qui a inventé le mantra de " la survie du plus apte " après avoir lu Darwin.

Nietzsche était le cartographe ultime du ressentiment. Max Weber a prophétiquement décrit le monde moderne comme une " cage de fer " dont seul un leader charismatique peut permettre l’évasion. De son côté, l’icône anarchiste Mikhaïl Bakounine avait déjà, en 1869, conceptualisé le révolutionnaire coupant " tout lien avec l’ordre social et avec tout le monde civilisé […] Il est son ennemi impitoyable et continue de l’habiter avec un seul but : Détruire ".

S’échappant du " cauchemar de l’histoire " du suprême moderniste James Joyce – en réalité la cage de fer de la modernité – une sécession, viscéralement militante, hors " d’une civilisation fondée sur un progrès éternel sous l’administration des libéraux-démocrates " est en train de faire rage, hors de contrôle, bien au-delà de l’Europe.

Des idéologies, qui pourraient être radicalement opposées, ont néanmoins grandi en symbiose avec le tourbillon culturel de la fin du XIXe siècle, depuis le fondamentalisme islamique, le sionisme et le nationalisme hindou jusqu’au bolchevisme, au nazisme, au fascisme et à l’impérialisme réaménagé.

Dans les années trente, le brillant et tragique Walter Benjamin, avait non seulement prophétisé la Seconde Guerre mondiale mais aussi la fin de la partie, alors qu’il était déjà en train d’alerter sur la propre aliénation de l’humanité, enfin capable " d’expérimenter sa propre destruction comme un plaisir esthétique du premier ordre ". La version pop actuelle en live-streaming, style bricolage, comme ISIS, essaie de se présenter comme la négation ultime des piétés de la modernité néolibérale.

L’ère du ressentiment

Tissant les fils savoureux de la politique et de la littérature par pollinisation croisée, Mishra prend son temps pour poser la scène du Grand Débat entre ces masses mondiales en développement, dont les vies sont forgées par " l’histoire largement reconnue de la violence " de l’Occident atlantiste, et des élites modernes nomades (Bauman) tirant profit du rendement de la partie – sélective – du monde qui a fait les percées cruciales depuis les Lumières dans la science, la philosophie, l’art et la littérature.

Cela va bien au-delà d’un simple débat entre l’Orient et l’Occident. Nous ne pouvons pas comprendre la guerre civile mondiale actuelle, ce " mélange intense d’envie, de sentiment d’humiliation et d’impuissance post-moderniste et post-vérité ", si nous n’essayons pas de " démanteler l’architecture conceptuelle et intellectuelle des gagnants de l’histoire en Occident ", issue du triomphalisme des exploits de l’histoire anglo-américaine. Même au summum de la Guerre froide, le théologien américain Reinhold Niebuhr se moquait des " ternes fanatiques de la civilisation occidentale " dans leur foi aveugle selon laquelle toute société est destinée à évoluer exactement comme une poignée de nations occidentales – parfois – l’ont fait.

Et cela – ironie ! – tandis que le culte internationaliste libéral du progrès imitait le rêve marxiste de la révolution internationaliste.

Dans sa préface de 1950 aux Origines du totalitarisme – un méga best-seller ressuscité –, Hannah Arendt nous a essentiellement dit d’oublier la restauration éventuelle du Vieil ordre mondial. Nous avons été condamnés à voir l’histoire se répéter, " l’itinérance à une échelle sans précédent, l’absence de racines à une profondeur sans précédent ".

Pendant ce temps, comme Carl Schorske l’a noté dans son spectaculaire Fin-de-Siècle à Vienne : Politique et Culture, l’érudition américaine a " coupé le lien de conscience " entre le passé et le présent, carrément aseptisé l’Histoire, des siècles de guerre civile, de ravage impérial, de génocide et d’esclavage en Europe et en Amérique ont ainsi tout simplement disparu. Seul le récit TINA (il n’y a pas d’alternative) a été autorisé, voici comment les atlantistes, avec le privilège de la raison et l’autonomie de la personne, ont fait le monde moderne.

Entre maintenant en scène Jalal Al-e-Ahmad, né en 1928 dans le sud pauvre de Téhéran, et l’auteur de Westoxification (1962), un texte majeur de référence sur l’idéologie islamiste, où il écrit que " l’Érostrate de Sartre tire au revolver, avec les yeux bandés, sur les gens dans la rue ; le protagoniste de Nabokov précipite sa voiture dans la foule ; et l’Étranger, Meursault, tue quelqu’un en réaction à un mauvais coup de soleil ". Vous pouvez parler d’un croisement mortel – l’existentialisme rencontre les bidonvilles de Téhéran pour souligner ce que Hanna Arendt a appelé la " solidarité négative ".

Arrive ensuite Abu Musab al-Suri, né en 1958 – un an après Osama ben Laden – dans une famille de la classe moyenne dévote, à Alep. C’est Al-Suri, et non l’Égyptien Al-Zawahiri, qui a conçu une stratégie de djihad mondial sans leader dans The Global Islamic Resistance Call, basée sur des cellules isolées et des opérations individuelles. Al-Suri était le " choc des civilisations " de Samuel Huntington appliqué à al-Qaïda. Mishra le définit comme le " Michel Bakounine du monde musulman ".

Cette " syphilis des passions révolutionnaires

Répondant à cette ridicule affaire néo-hégélienne de " fin de l’histoire ", après la Guerre froide, Allan Bloom a averti que le fascisme pourrait être l’avenir ; et John Gray a télégraphié le retour des " forces primordiales, nationalistes et religieuses, fondamentalistes et bientôt, peut-être, malthusiennes ".

Et cela nous amène à expliquer pourquoi les porteurs exceptionnels de l’humanisme et du rationalisme des Lumières ne peuvent expliquer l’agitation géopolitique actuelle – de ISIS au Brexit et à Trump. Ils ne peuvent jamais arriver à penser quelque chose de plus sophistiqué que l’opposition binaire de libre et non libre ; les mêmes clichés occidentaux du XIXe siècle sur le non-Occident ; et la diabolisation incessante de cet éternel Autre arriéré : l’islam. De là la nouvelle " longue guerre " (terminologie du Pentagone) contre l’islamofascisme. Ils ne pourraient jamais comprendre, comme le souligne Mishra, les implications de cette rencontre d’esprits dans une prison de Supermax au Colorado entre l’auteur de l’attentat d’Oklahoma City, l’Américain pur jus Timothy McVeigh et le cerveau de la première attaque contre le World Trade Center, Ramzi Yousef (musulman normal, père pakistanais, mère palestinienne).

Ils ne peuvent pas comprendre comment les concepteurs d’ISIS arrivent à enrégimenter, en ligne, un adolescent insulté et blessé d’une banlieue parisienne ou d’un bidonville africain et le convertir en narcissique – baudelairien ? – dandy fidèle à une cause émergente, pour laquelle il vaut la peine de se battre. Le parallèle entre le bricolage djihadiste et le terrorisme russe du XIXe siècle – incarnant la " syphilis des passions révolutionnaires ", comme l’a décrit Alexander Herzen – est étrange.

Le principal ennemi du djihad de bricolage n’est pas même chrétien; c’est le shi’ite apostat. Les viols massifs, les meurtres chorégraphiés, la destruction de Palmyre, Dostoïevski avait déjà tout identifié. Comme le dit Mishra, " il est impossible pour les Raskolnikov modernes de se dénier quoi que ce soit, mais il leur est possible de justifier tout ".

Il est impossible de résumer tous les feux croisés rhizomatiques – salut à Deleuze et Guattari – déployés à l’Âge de la colère. Ce qui est clair, c’est que pour comprendre la guerre civile mondiale actuelle, la réinterprétation archéologique du récit hégémonique de l’Occident des 250 dernières années est essentielle. Sinon, nous serons condamnés, comme des gnomes de Sisyphe, à supporter non seulement le cauchemar récurrent de l’Histoire, mais aussi son coup de fouet perpétuel.

Auteur: Escobar Pepe

Info: Février 2017, CounterPunch. Beaucoup d'idées sont tirées de son ouvrage : Globalistan, How the Globalized World is Dissolving into Liquid War, Nimble Books, 2007

[ vingt-et-unième siècle ]

 

Commentaires: 0