structure incorporée du langage

Je vous ai déjà dit pas mal de choses de l’obsessionnel, il ne s’agit pas de les répéter. Il ne s’agit pas de simplement répéter ce qu’il y a de foncièrement substitutif, de perpétuellement éludé, de cette sorte de "passez-muscade" qui caractérise toute la façon dont l’obsessionnel procède dans sa façon de se situer par rapport à l’Autre, plus exactement de n’être jamais à la place où sur l’instant il semble se désigner.

Ce à quoi fait très précisément allusion la formulation du second terme du fantasme de l’obsessionnel, c’est ceci que les objets, pour lui, en tant qu’objets de désir, sont en quelque sorte mis en fonction de certaines équivalences érotiques, ce qui est précisément dans ce quelque chose que nous avons l’habitude d’articuler, en parlant de l’érotisation de son monde, et spécialement de son monde intellectuel, ce à quoi tend précisément cette façon de noter cette mise en fonction par φ [petit phi] qui désigne ce quelque chose.

Il suffit de recourir à une observation analytique, quand elle est bien faite par un analyste, pour nous apercevoir que le φ - nous verrons peu à peu ce que ça veut dire - c’est justement ce qui est sous-jacent à cette équivalence instaurée entre les objets sur le plan érotique, que le φ est en quelque sorte l’unité de mesure où le sujet accommode la fonction petit(a), la fonction des objets de son désir.

Pour l’illustrer, je n’ai vraiment rien d’autre à faire qu’à me pencher sur l’observation princeps de la névrose obsessionnelle, mais vous la retrouverez aussi bien dans toutes les autres, pour peu que ce soit des observations valables, rappelez-vous ce trait de la thématique du Rattenmann, de "L’homme aux rats". Pourquoi d’ailleurs est-il appelé L’homme aux rats - au pluriel - par FREUD, alors que dans le fantasme où FREUD approche pour la première fois cette espèce de vue interne de la structure de son désir, dans cette sorte d’horreur saisie sur son visage, d’une jouissance ignorée, il n’y a pas des rats, il n’y a qu’un rat dans le fameux supplice turc sur lequel j’aurai à revenir tout à l’heure.

Si on parle de L’homme aux rats, c’est bien parce que le rat poursuit sous une forme multipliée sa course dans toute l’économie de ces échanges singuliers, ces substitutions, cette métonymie permanente, dont la symptomatique de l’obsessionnel est l’exemple incarné. La formule, qui est de lui, "tant de rats, tant de florins" - ceci à propos du versement des honoraires dans l’analyse - n’est là qu’une des illustrations particulières de cette équivalence en quelque sorte permanente de tous les objets saisis tour à tour dans cette sorte de marché.

Ce métabolisme des objets dans les symptômes s’inscrit, d’une façon plus ou moins latente, dans une sorte d’unité commune, d’une unité-or, unité-étalon, qu’ici le rat symbolise, tenant proprement la place de ce quelque chose que j’appelle φ, en tant qu’il est un certain état, un certain niveau, une certaine forme, de réduire, de dégrader d’une certaine façon - nous verrons en quoi nous pouvons l’appeler dégradation - la fonction du signifiant Φ [grand phi]. 

Auteur: Lacan Jacques

Info: 26 avril 1961

[ déplacement ] [ valeur ] [ phallus ] [ petit autre-grand autre ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

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