Je le voyais quelquefois seul. Je faisais tout ce qu’il me demandait. Nous sortions ensemble, mais le terrible était que je sentais très vite qu’il s’ennuyait avec moi.
J’aimais chez Roger qu’il s’ennuyât dès qu’on ne faisait rien. J’étais comme lui, mais alors que je n’osais le montrer, il ne se gênait pas. Je sentais que je devenais pour lui semblable à ces mêmes gens qui m’ennuyaient moi aussi et auxquels il m’assimilait.
- Tu te souviens, quand on était en Belgique, disait quelquefois Roger qui avait l’air de croire que tout était fini, quand il ne savait que dire.
Mon plus grand plaisir était de l’accompagner, mais bien qu’il n’eût rien à faire, il refusait mon offre. Je lui demandais pourquoi. Il ne me répondait pas. Quelquefois, dans la rue, il s’arrêtait soudain et il me disait au revoir. Je croyais qu’il allait partir. Comme il ne bougeait pas, je restais. Il me disait alors :
- Allez, va-t’en.
Je m’éloignais. Quand je me retournais, je le voyais toujours au même endroit, non pas pour me surveiller, car il ne regardait même pas dans ma direction. […] Un jour, il revint sur ses pas, me vit, mais détourna les yeux. Je ne devais plus le revoir.
        
Auteur:
Info: Non-lieu, Editions Archipoche, Paris, 2025, pages 391-392
Commentaires: 2
Coli Masson
26.10.2025
ok
miguel
26.10.2025
séparation ?