M’est avis :
– qu’il n’est pas possible de le comprendre [le contre-transfert] hors du registre de ce que j’ai pointé comme étant la place de (a), l’objet partiel, l’ἄγαλμα [agalma] dans la relation de désir en tant qu’elle-même est déterminée à l’intérieur dans une relation plus vaste, celle de l’exigence d’amour,
– que ce n’est que là, que ce n’est que dans cette topologie que nous pouvons comprendre une telle façon de procéder, dans une topologie qui nous permet de dire que, même si le sujet ne le sait pas, par la seule supposition je dirai objective de la situation analytique, c’est déjà dans l’Autre que (a), l’ἄγαλμα fonctionne,
– et que ce qu’on nous présente à cette occasion comme contre-transfert, normal ou pas, n’a vraiment aucune raison spéciale d’être qualifié de "contre-transfert", je veux dire qu’il ne s’agit là que d’un effet irréductible de la situation de transfert simplement par elle-même.
Le fait qu’il y a transfert suffit pour que nous [analystes] soyons impliqués dans cette position, d’être celui qui contient l’ἄγαλμα [agalma], l’objet fondamental dont il s’agit dans l’analyse du sujet, comme lié, conditionné, par ce rapport de vacillation du sujet que nous caractérisons – comme constituant le fantasme fondamental, comme instaurant le lieu où le sujet peut se fixer comme désir. C’est un effet légitime – du transfert. Il n’y a pas besoin là pour autant de faire intervenir le contre-transfert comme s’il s’agissait de quelque chose qui serait – la part propre, et bien plus encore la part fautive, de l’analyste. Seulement je crois que pour le reconnaître, il faut que l’analyste sache certaines choses. Il faut qu’il sache en particulier que le critère de sa position correcte n’est pas qu’il comprenne ou qu’il ne comprenne pas.
Il n’est pas absolument essentiel qu’il ne comprenne pas, mais je dirai que jusqu’à un certain point cela peut être préférable à une trop grande confiance dans sa compréhension. En d’autres termes, il doit toujours mettre en doute ce qu’il comprend et se dire que ce qu’il cherche à atteindre, c’est justement ce qu’en principe il ne comprend pas.
C’est en tant certes qu’il sait ce que c’est que le désir, mais qu’il ne sait pas ce que ce sujet, avec lequel il est embarqué dans l’aventure analytique, désire, qu’il est en position d’en avoir en lui - de ce désir - l’objet. Car seulement cela explique tels de ces effets si singulièrement encore effrayants, semble-t-il.
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Info: 8 mars 1961
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