Aux environs de midi Jons prenait place pour une heure et demie sur le vieux canapé aux boutons de porcelaine. Il mangeait lestement ce que lui servait Melle Holstein et tirait un livre des longs rayons austères. C'était l'unique moment de la journée ou de la nuit où il ne pensait pas à ses études, où il lisait des vers ou les leçons de la sagesse des anciens ou bien ce que pensaient ou avaient pensé d'autres peuples au sujet des destinées de l'humanité. C'était l'heure sans objet, comme il l'appelait ou l'heure défendue; mais il en tirait le plus grand réconfort de la journée ou de la nuit, la libération de tout objectif, la conviction de la puissance de l'esprit véritable, qu'il ne pouvait jamais séparer de la puissance du cœur, et le léger frisson que donne la magie du beau, qu'il ne rattachait pas à une forme humaine, pas même à la langue seule, parce qu'à ses yeux la langue n'était que l'un des nombreux moyens d'ouvrir la porte du mystère.
Auteur:
Info: Les Enfants Jéromine
Commentaires: 7
Coli Masson
13.09.2025
Merci pour ces compléments...
Benslama
13.09.2025
mon savoir n'excède pas le contenu de la page wikipédia, que vous avez peut-être consultée entretemps - je suppose qu'effectivement, sa popularité a dû être liée à son opposition aux nazis (mais aussi à l'éthique chrétienne qu'il défendait) - il a quand même été envoyé à Buchenwald, pour ses prises de position très claires (et a été relâché, du fait des larges soutiens dont il bénéficiait) - quant à savoir pourquoi on le connait si peu aujourd'hui, il faudrait d'abord savoir si c'est aussi vrai en Allemagne - c'est un excellent romancier, la valeur de l'oeuvre ne me paraît pas être en question - peut-être, justement, les "valeurs chrétiennes" font-elles obstacles à sa lecture, aujourd'hui ?...
miguel
07.09.2025
Il est resté en Allemagne durant la guerre