religion

Durant mes années de lycée, lorsque je discutais avec un chrétien, un musulman ou un juif, j'avais toujours eu la sensation que leur croyance était à prendre en quelque sorte au second degré ; qu'ils ne croyaient évidemment pas, directement et au sens propre, à la réalité des dogmes proposés, mais qu'il s'agissait d'un signe de reconnaissance, d'une sorte de mot de passe leur permettant l'accès à la communauté des croyants – un peu comme aurait pu le faire la grunge music, ou Doom Generation pour les amateurs de ce jeu. Le sérieux pesant qu’ils apportaient parfois à débattre entre des positions théologiques également absurdes semblait aller à l’encontre de cette hypothèse ; mais il en allait de même, au fond, pour les véritables d’un jeu : pour un joueur d’échecs, ou un participant réellement immergé dans un jeu de rôles, l’espace fictif du jeu est une chose en tous points sérieuse et réelle, on peut même dire que rien d’autre n’existe pour lui, pendant la durée du jeu tout du moins.

Auteur: Houellebecq Michel

Info: La possibilité d'une île, 2007, pages 252-253

[ énoncé-énonciation ] [ enjeux dissimulés ] [ foi ] [ rhétorique ludique ]

 

Commentaires: 1

Ajouté à la BD par Coli Masson

Commentaires

miguel, filsdelapensee@bluewin.ch
2025-09-02 06:09
monothéismes, ludique rhétorique ?