prévisibilité humaine

Je ne me range ni parmi les alarmistes, ni parmi les angoissés. Malheur au psychanalyste qui n’aurait pas dépassé le stade de l’angoisse. C’est vrai, il y a autour de nous des choses horripilantes et dévorantes, comme la télévision par laquelle une grande partie de nous est régulièrement phagocytée. Mais ce n’est que parce qu’il existe des gens qui se laissent phagocyter, qui s’inventent même un intérêt pour ce qu’ils voient.

Et puis il y a d’autres trucs monstrueux autrement dévorants : les fusées qui vont sur la lune, les recherches au fond des océans, etc. Toutes choses qui dévorent. Mais il n’y a pas de quoi en faire un drame. Je suis certain que lorsque nous en aurons assez des fusées, de la télévision et de toutes leurs maudites recherches à vide, nous trouverons autre chose de quoi nous occuper. C’est une reviviscence de la religion, n’est-ce pas ? Et quel meilleur monstre dévorant que la religion ? C’est une fête continuelle, de quoi se divertir pour des siècles comme cela a déjà été démontré.

Ma réponse à tout cela, c’est que l’homme a toujours su s’adapter au mal. Le seul réel qu’on puisse concevoir, auquel nous avons accès est justement celui-ci, il faudra bien s’en faire une raison : donner un sens aux choses, comme nous disions. Autrement, l’homme n’aurait pas d’angoisse, Freud ne serait pas devenu célèbre, et je serais professeur de lycée.

Auteur: Lacan Jacques

Info: Entretien au magazine Panorama, 1974

[ signification ] [ éternel retour ] [ amor fati ] [ questions ] [ fatalité ] [ culture du progrès ] [ technologie ]

 

Commentaires: 2

Ajouté à la BD par Coli Masson

Commentaires

miguel, filsdelapensee@bluewin.ch
2025-09-01 07:15
culture du progrès, technologie ?
Coli Masson, colimasson@live.fr
2025-09-01 09:43
oui merci.