Les maîtres prétendent-ils communiquer leurs propres sentiments ? Ne veulent-ils pas que l’on s’applique plutôt à comprendre et à retenir les Sciences qu’ils croient faire connaître ? Et qui serait assez follement curieux pour envoyer son fils apprendre, dans une école, ce que pense le maître ? Quand celui-ci a expliqué dans ses leçons les matières qu’il fait profession d’enseigner, les règles mêmes de la vertu et de la sagesse ; c’est alors que ses disciples examinent en eux-mêmes s’il leur a dit vrai, consultant, comme ils peuvent, la vérité intérieure. C’est donc alors qu’ils apprennent. Reconnaissent-ils que l’enseignement est vrai ? ils le louent ; mais ils ignorent que les maîtres à qui s’adressent leurs louanges sont plutôt enseignés qu’enseignants, pourvu toutefois qu’ils comprennent eux mêmes ce qu’ils disent. Ce qui nous porte à leur donner le nom faux de maîtres, c’est que la plupart du temps il n’y a aucun intervalle entre la parole et la pensée ; et parce que la vérité intérieure enseigne aussitôt après l’éveil donné par le discours, on croit avoir été instruit par le langage qui a retenti aux oreilles.
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Info: De magistro in Œuvres complètes de Saint Augustin, Texte établi par Jean-Joseph-François Poujoulat et Jean-Baptiste Raulx, L. Guérin & Cie, 1864
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