Entre les plus étourdissants des vocalistes,
J’ai remarqué depuis trois ou quatre matins
Les arpèges hardis, les trilles argentins
De deux merles ardents comme des duellistes ;
Auprès d’eux les rayons du jour semblent éteints.
Rivalisant d’éclat pendant une heure entière,
Virtuoses mais inspirés, ne rabâchant
Jamais, ils font briller à la fois le tranchant
D’une lame et le bloc d’idéale matière
D’où s’élèvent les jets capricieux du chant.
Et si fort et si librement qu’ils s’évertuent,
On les sait asservis aux lois de la saison.
Mais par l’accouplement et par la couvaison,
C’est encore leur chant qu’ils aiment, perpétuent,
À la folle hauteur de ce diapason.
C’est parfois si tendu, si plein, qu’on appréhende
Et qu’on espère aussi les entendre soudain,
Dans un vague demi-sommeil presque enfantin,
Se déchirer sur une couverture béante
Qui nous rendrait le paradis, en ce jardin.
Auteur:
Info: Un paradis d’oiseaux, B
Commentaires: 0