absurdité

Les amours ratent, mais de peu, c’est ainsi que commencent les suivantes peut-être que nous en avons trop en nous, quoi qu’on en dise, et il faut que ça sorte ; rien de plus triste qu’un sommeil solitaire, rien de plus triste qu’un sommeil partagé.

Il n’y a pas d’amour heureux, disait le communiste. Là encore, il avait tout faux. Il n’y a pas d’issue heureuse eût été plus juste. Prenez cinq minutes et imaginez votre avenir, irrémédiablement des envies de suicide envahiront votre âme et votre corps, choses mêlées pour les uns, séparées pour les autres ; tout ce que notre existence, courte ou longue, nous a enseigné, c’est que ces choses sont parfaitement inutiles.

La mort vous hante, vous ne pensez qu’à elle. Une fois levé, vous prenez votre douche et sortez. Vous faîtes bien attention en traversant : un drame est si vite arrivé. Vous accomplissez votre besogne. Votre corps lâche, votre tête ne suit plus. Vous n’êtes plus rien, et, de plus en plus, vous admettez que cet état de fait dure depuis longtemps déjà. 

Vous êtes, nous sommes, des putains sans trottoir.

Que s’est-il passé ? Vous essayez de remonter au moment où tout a foiré. La tentation de mettre cela sur le dos de votre naissance comme le faisait un Roumain rébarbatif est forte. Il y a cependant autre chose, et cette autre chose vous hante, au point que vous piochez un anxiolytique, le troisième depuis votre réveil, dans la poche de votre anorak. Des gens dans la rue marchent, vous ne savez pas où ils vont. Eux non plus. Etrangement, vous les enviez. 

Auteur: Zinet Nagui

Info: Une trajectoire exemplaire, éditions Gallimard, 2024, pages 11-12

[ incipit ] [ désespoir ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

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