Les hommes du Moyen Âge, vus de notre époque agitée et fiévreuse, peuvent à certains égards nous paraître naïfs, enfantins, dénués de complexité psychologique, ce qui nous amène à tort à les prendre pour des êtres plus instinctifs, moins conscients que nous. En fait toute leur activité créatrice était portée par l'Idée, c'est-à-dire une conception spirituelle de la vie, bien plus que ce n'est le cas de l'homme moderne. Et c'est précisément dans cette vérité éternelle, au centre de leur vie, que leur amour et leur joie créatrice pouvaient puiser la force unificatrice que nous admirons dans leurs œuvres. "Ils étaient plus proches que nous du ciel autant que de la terre", a-t-on pu dire très justement à leur propos.
Chez l'homme moderne, la situation est en général inverse : il est mû par des sentiments qu'il justifie par tout un appareil conceptuel, une idéologie, si bien que les passions personnelles sont reléguées à l'arrière-plan et que la pensée rationnelle occupe toute l'avant-scène. Le recours à la psychologie peut se concevoir pour parvenir à la compréhension de l'homme moderne ; comprendre l'homme du Moyen Âge passe par la découverte de ses buts les plus élevés, sans craindre de pénétrer au cœur de son univers symbolique, dans ce qu'il recèle de vérité éternelle et universelle
Auteur:
Info: Chartres et la naissance de la cathédrale, Milan, éd. Archè, 1995, p.6
Commentaires: 0