Pendant qu'il parlait prudent et préliminaire, j'essayais de me représenter tout ce qu'il exécutait chaque jour ce curé pour gagner ses calories, des tas de grimaces et des promesses encore, dans le genre des miennes... Et puis je me l'imaginais pour m'amuser, tout nu devant son autel... C'est ainsi qu'il faut s'habituer à transposer dès le premier abord les hommes qui viennent vous rendre visite, on les comprend bien plus vite après ça, on discerne tout de suite dans n'importe quel personnage sa réalité d'énorme et d'avide asticot. C'est un bon truc d'imagination. Son sale prestige se dissipe, s'évapore. Tout nu, il ne reste plus devant vous en somme qu'une pauvre besace prétentieuse et vantarde qui s'évertue à bafouiller futilement dans un genre ou dans un autre. Rien ne résiste à cette épreuve. On s'y retrouve instantanément. Il ne reste plus que les idées, et les idées ne font jamais peur. Avec elles, rien n'est perdu, tout s'arrange. Tandis que c'est parfois difficile à supporter le prestige d'un homme habillé. Il garde des sales odeurs et des mystères plein ses habits.
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Info: Voyage au bout de la nuit, 1932, Romans, 1 la Pléiade, Gallimard 1997 <p.336>
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