Et pour mettre là-dessus définitivement "le point sur les i", à savoir - ce que je vous ai indiqué - que ce n’est pas le géocentrisme soi-disant démantelé par le nommé "Chanoine KOPPERNIGK" [Copernic] qui est le plus important, et c’est même en ça que c’est assez faux, assez vain, de l’appeler une "révolution copernicienne".
Parce que, si dans son livre Sur les révolutions des orbes célestes il nous montre une figure du système solaire qui ressemble à la nôtre, à celle qu’il y a sur les manuels aussi dans la classe de sixième, où l’on voit le soleil au milieu, et tous les astres qui tournent autour dans l’orbe, il faut dire que ce n’était pas du tout un schéma nouveau, en ceci que tout le monde savait au temps de COPERNIC - ce n’est pas nous qui l’avons découvert - que, dans l’Antiquité, il y avait un homme HÉRACLIDE, puis ARISTARQUE de Samos, lui assurément d’une façon tout à fait attestée, qui avaient fait le même schéma.
La seule chose qui aurait pu faire de COPERNIC autre chose qu’un fantasme historique - car ce n’était pas autre chose - c’est si son système avait été, non pas plus près, de l’image que nous avons du système solaire réel, mais plus vrai. Et plus vrai, ça voudrait dire plus désencombré d’éléments imaginaires qui n’ont rien à faire avec la symbolisation moderne des astres, plus désencombré que le système de PTOLÉMÉE. Or il n’en est rien. Son système est aussi bourré d’épicycles. Et des épicycles, qu’est-ce que c’est ? C’est quelque chose d’inventé, et d’ailleurs personne ne pouvait croire à la réalité des épicycles !
Ne vous imaginez pas qu’ils étaient assez bêtes pour penser qu’ils verraient, comme ce que vous voyez quand vous ouvrez votre montre : une série de petites roues. Mais il y avait cette idée que le seul mouvement parfait qu’on pouvait imaginer concevable était le mouvement circulaire. Tout ce qu’on voyait dans le ciel était vachement dur à interpréter, car comme vous le savez, ces petites planètes errantes se livraient à toutes sortes d’entourloupettes irrégulières entre elles, dont il s’agissait d’expliquer les zigzags. On n’était satisfait que quand chacun des éléments de leur circuit, pouvait être ramené à un mouvement circulaire.
[…] Ce qu’il faudrait que vous lisiez pendant ces vacances, et vous allez voir que c’est possible, pour votre plaisir, c’est à savoir comment KÉPLER arrive à donner la première saisie qu’ont ait eue de quelque chose qui est ce en quoi consiste véritablement la date de naissance de la physique moderne. Il y arrive en partant des éléments dans PLATON du même Timée dont je vais vous parler, c’est à savoir d’une conception purement imaginaire, avec l’accent qu’a ce terme dans le vocabulaire dont je me sers avec vous, de l’univers entièrement réglé sur les propriétés de la sphère articulée comme telle : comme étant la forme qui porte en soi les vertus de suffisance qui font qu’elle peut essentiellement combiner en elle l’éternité de la même place avec le mouvement éternel.
C’est autour de spéculations, d’ailleurs raffinées, de cette espèce qu’il y arrive, puisqu’il y fait entrer à notre stupeur, les cinq solides - comme vous savez il n’y en a que cinq - parfaits inscriptibles dans la sphère. En partant de cette vieille spéculation platonicienne, déjà trente fois déplacée, mais qui déjà revenait au jour, à ce tournant de la Renaissance, et de la réintégration dans la tradition occidentale des manuscrits platoniciens, qui littéralement monte à la tête de ce personnage, dont la vie personnelle, croyez-moi, dans ce contexte de la révolution des paysans, puis de la guerre de Trente Ans, est quelque chose de gratiné et auquel, vous allez voir, je vais vous donner le moyen de vous reporter : ledit KEPLER, à la recherche de ces harmonies célestes, et par un prodige de ténacité - on voit vraiment le jeu de cache-cache de la formation inconsciente - arrive à donner la première saisie qu’on ait eue de quelque chose qui est ce en quoi consiste véritablement la date de naissance de la science physique moderne.
En cherchant "un rapport harmonique", il arrive à ce rapport de la vitesse de la planète sur son orbe à l’aire de la surface couverte par la ligne qui relie la planète au soleil. C’est-à-dire qu’il s’aperçoit du même coup que les orbites planétaires sont des ellipses.
[…] Si génial que fût GALILÉE, dans son invention de ce qu’on peut vraiment appeler la dynamique moderne, à savoir d’avoir trouvé la loi exacte de la chute des corps, ce qui était un pas essentiel, et bien entendu, malgré que ce soit sur cette affaire de géocentrisme qu’il ait eu tous ses embêtements, il n’en reste pas moins que GALILÉE était là, aussi retardataire, aussi réactionnaire, aussi collant à l’idée du mouvement circulaire parfait - donc seul possible pour les corps célestes - que les autres. Pour tout dire, GALILÉE n’avait même pas franchi ce que nous appelons la révolution copernicienne dont nous savons qu’elle n’est pas de COPERNIC. Vous voyez donc le temps que mettent les vérités à se frayer le chemin en présence d’un préjugé aussi solide que la perfection du mouvement circulaire.