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L'HUMANITÉ AURAIT ELLE ETE PRES DE L'EXTINCTION ?

"1 280 individus seulement : l'humanité a failli disparaître il y a près d'un million d'années

Une étude parue dans Science révèle que population humaine pourrait s'être maintenue à environ 1 300 individus pendant une centaine de milliers d'années. Une "presque extinction" qui pourrait avoir joué un rôle majeur dans l'évolution des hommes modernes et de parents disparus, les Néandertaliens et Dénisoviens.

Il y a près d’un million d’années, un événement dévastateur a presque anéanti nos ancêtres. Les données génomiques de 3 154 humains modernes suggèrent qu'à ce moment, la population aurait été réduite d’environ 100 000 à seulement 1 280 individus reproducteurs — soit un déclin démographique d'ampleur (98,7 %) sur une durée de 117 000 ans, qui aurait pu conduire l’humanité à l’extinction.

Le fait que vous puissiez lire cet article, et que la population mondiale atteigne aujourd'hui les plus de 8 milliards (chiffres de novembre 2022), montre bien que cela n'a pas été le cas. Mais les résultats de cette récente étude, publiée dans la revue Science le 31 août 2023, permettraient d'expliquer l'écart déjà observé entre les archives fossiles humaines d'Afrique et d'Eurasie durant le Pléistocène.

La génétique pour comprendre l'évolution de la lignée humaine

Les datations récentes situent les plus anciens Homo sapiens il y a environ 300 000 ans, en Afrique. Seulement, avec si peu de fossiles datant de cette époque parvenus jusqu'à nous, la manière dont la lignée humaine a évolué avant l'émergence de l'espèce reste plutôt incertaine.

Pour en savoir plus sur cette très secrète période, proche de l’évolution de l’Homme moderne, une équipe a étudié le génome de plus de 3 150 humains actuels. Des individus issus de dix populations africaines et de quarante populations non africaines, plus précisément.

Elle a pour cela développé un nouvel outil analytique, le "processus de coalescence rapide en temps infinitésimal" (FitCoal). Grossièrement, le FitCoal leur a permis, en examinant la diversité des séquences génétiques observées chez les descendants et comment elles ont divergé au fil du temps, de déduire la taille des groupes composant leurs lointains ancêtres.

Leurs résultats ont ainsi révélé un "goulot d'étranglement démographique" important il y a environ 930 000 à 813 000 ans, c'est-à-dire un épisode de réduction sévère de la population — suivi d'une nouvelle expansion démographique, d'où les termes de "goulot d'étranglement".

Un risque élevé d'extinction lié aux changements climatiques ?

Dans l'étude de l'évolution d'une espèce, les goulots d'étranglement démographiques liés à une guerre, une famine ou encore une crise climatique, ne sont pas rares. La baisse de la diversité génétique qui en résulte peut même être retracée jusqu’à la descendance des survivants.

C’est ainsi que les scientifiques ont pu en déduire qu'un tel phénomène s'est produit plus récemment, il y a environ 7 000 ans, dans la population humaine de l’hémisphère nord.

Toutefois, le cas du goulot d'étranglement bien plus ancien semble avoir été d'une gravité particulièrement exceptionnelle, puisque le groupe a alors perdu 65,85 % de sa diversité génétique et environ 98,7 % de sa population reproductrice, selon les données. Pendant plus ou moins 117 000 ans, cette dernière aurait été limitée à environ 1 280 individus.

Nos ancêtres ont connu un goulot d'étranglement démographique si grave pendant très longtemps qu'ils ont été confrontés à un risque élevé d'extinction. — Wangjie Hu, coauteur principal de l'étude de l'École de médecine du Mont Sinaï à New York (États-Unis) interrogé par LiveScience.

S'il est aujourd'hui difficile d'établir avec certitude les différents facteurs qui ont mené à ce goulot d'étranglement, un événement majeur semble coïncider dans les datations : la transition du milieu du Pléistocène (il y a entre 1,25 et 0,7 million d’années), où la Terre s'est vue sévèrement refroidie en raison de l'allongement des cycles glaciaires et interglaciaires.

Les glaciers ont émergé, les températures des océans ont diminué… et de longues sécheresses ont touché l'Afrique et en Eurasie. Pour les populations humaines luttant alors pour leur survie, ces conditions plus que défavorables auraient pu entraîner famines et conflits. La disparition d'autres espèces, sources de nourritures, pourrait aussi avoir contribué à leur déclin.

Encore une fois, les conséquences de ces bouleversements climatiques ne peuvent être constatées, tant les fossiles et les artefacts humains de cette période sont relativement rares. Peut-être, parce que la population était si faible durant cette fameuse période.

Cette donnée permet en tout cas d'enfin expliquer chronologiquement "l'écart entre les archives fossiles africaines et eurasiennes [...] au début de l'âge de pierre". "[Cet écart] coïncide avec la période proposée de perte significative de preuves fossiles", explique en effet l'anthropologue Giorgio Manzi de l'université Sapienza de Rome (Italie), coauteur principal de l'étude dans un communiqué.

Un changement de génome et une divergence des hominidés

Ce goulot d'étranglement pourrait aussi avoir contribué à une caractéristique du génome humain : la fusion de deux chromosomes en un seul, le chromosome 2. Les autres hominidés encore vivants, dont les grands singes, en possèdent en effet 24 paires, nous, 23. Cet événement de spéciation semble d'ailleurs avoir contribué à ce que les humains prennent une voie évolutive différente. Expliquons.

Des recherches ont déjà suggéré que le dernier ancêtre commun, partagé par les Hommes modernes (Homo Sapiens), les Néandertaliens (Homo neanderthalensis) et les Dénisoviens (Homo denisovensis), vivait il y a environ 765 000 à 550 000 ans… soit à peu en même temps que le phénomène décrit.

Si dernier ancêtre commun a vécu pendant ou peu après le goulot d'étranglement, celui-ci aurait pu jouer un rôle dans la division des groupes d'hominidés, suggèrent les chercheurs : la population pourrait s'être séparée en de petits groupes survivants, qui, au fil du temps, auraient développé des caractéristiques suffisamment importantes pour que les différents groupes deviennent distincts — avec d'une part l'Homme moderne, d'autre part l'Homme de Néandertal et l'Homme de Denisova.

Or, c'est aussi il y a environ 900 000 à 740 000 ans, que les deux chromosomes anciens semblent avoir convergé. Et puisque tout cela coïncide, les nouvelles découvertes suggèrent finalement que la quasi-éradication de l'homme pourrait avoir un lien avec ce changement majeur dans le génome humain.

En outre, "puisque les Néandertaliens et les Dénisoviens partagent cette fusion avec nous, elle a dû se produire avant que nos lignées ne se séparent", suggère à nos confrères Chris Stringer, paléoanthropologue au Musée d'histoire naturelle de Londres (Angleterre) qui n'a pas participé à l'étude.

"Brosser un tableau complet de l'évolution humaine"

Si la lutte pour la survie, il y a environ 930 000 à 813 000 ans, semble avoir joué un rôle dans la formation des chromosomes de l'Homme moderne, l'inverse est-il vrai ?

L'équipe suggère plutôt qu'un climat plus hospitalier il y a environ 813 000 ans, ainsi que la maîtrise du feu, sont des facteurs cruciaux qui pourraient avoir permis à nos ancêtres de rebondir. De plus amples recherches seront nécessaires pour y voir plus clair, ainsi que pour établir si la sélection naturelle qui a eu lieu durant cette période a accéléré l'évolution du cerveau humain.

Ces résultats ne sont qu'un début. — Haipeng Li, généticien théorique des populations et biologiste informatique de l'Académie chinoise des sciences, coauteur principal dans le communiqué.

Les objectifs futurs de ces connaissances visent à brosser un tableau plus complet de l'évolution humaine au cours de cette période de transition entre le Pléistocène précoce et le Pléistocène moyen, ce qui permettra à son tour de continuer à percer le mystère de l'ascendance et de l'évolution de l'homme primitif.

Auteur: Internet

Info: https://www.science.org, 31 aout 2023, trad et résumé Mathilde Ragot

[ paléolithique ]

 

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Ajouté à la BD par miguel