Qu'est-ce que "l'effet papillon inversé" décrit par une équipe de l'université Yale?
Un simple battement d'ailes quelque part dans le monde peut déclencher une réaction en chaîne – c'est le fameux "effet papillon". Une étude met en garde contre le processus inverse : le changement climatique transforme les principaux refuges de ces insectes en pièges écologiques (université Yale).
Les lépidoptères vous fascinent ? Vous n'êtes pas seul(e) ! "La diversité, l'élégance et la beauté pure des papillons passionnent des gens dans le monde entier", souligne dans un communiqué de l'université Yale Walter Jetz, professeur d'écologie et de biologie évolutive et directeur du centre pour la Biodiversité et le Changement mondial au sein de la prestigieuse institution américaine.
En analysant les relations de parenté entre les organismes ("données phylogénétiques") ainsi que les aires de répartition géographiques de plus de 12 000 espèces à travers la planète, le scientifique et ses collègues ont découvert que deux tiers des espèces de papillons se trouvent exclusivement ou principalement dans des régions montagneuses.
Or, les écosystèmes d'altitude se transforment à toute vitesse sous l'effet du changement climatique : en effet, les montagnes sont, avec les régions arctiques, les zones de la planète qui se réchauffent le plus vite (Centre de ressources pour l'adaptation au changement climatique, ministère de l'Écologie, 2024).
La diversification "fascinante" des papillons pourrait sonner leur glas
Ainsi, selon l'étude publiée par l'équipe de Yale le 24 mars dans la revue Nature Ecology and Evolution (S. Pinkert et al., 2025), s'agissant des papillons tropicaux par exemple, près des deux tiers (64 %) de leur "niche" de température – c'est-à-dire la superficie totale correspondant aux températures propices à leur survie et à leur reproduction – aura disparu d'ici 2070.
Autrement dit, pour retrouver un environnement compatible avec leur biologie, les lépidoptères devront donc se déplacer de plus en plus haut… jusqu'à se retrouver inévitablement piégés au niveau des sommets.
"Malheureusement, notre première évaluation mondiale de la diversité des papillons et des menaces qui pèsent sur eux révèle que la diversification fascinante de ces insectes dans des environnements de très haute altitude pourrait désormais sonner leur glas, des milliers d'espèces étant potentiellement menacées d'extinction par le réchauffement climatique au cours de ce siècle", déplore le Pr Jetz.
Inclure davantage les insectes dans les plans de conservation
Jusqu'à présent, à la connaissance des auteurs de l'étude, il n'existait aucune évaluation géographique globale de la diversité, de la rareté et des menaces liées au changement climatique pour un groupe d'insectes, quel qu'il soit.
Or, ces nouveaux travaux révèlent que les schémas de diversité des papillons diffèrent "fortement" de ceux de groupes "beaucoup mieux étudiés" tels que les oiseaux, les mammifères ou les amphibiens. Les scientifiques de Yale espèrent donc que leurs résultats aideront les acteurs de la conservation de la nature à inclure davantage les insectes dans leurs plans d'action.
"La réduction des émissions de carbone, associée à l'identification proactive et à la préservation des habitats clés des papillons et des corridors migratoires, sera essentielle pour garantir la survie d'une grande partie de la diversité des papillons au profit des générations futures", prône le professeur.