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froide réalité

La faiblesse du cœur humain ne désire que des vérités agréables et réconfortantes, ou, à défaut, des fables aimables ; elle ne veut pas de la vérité intégrale où tant de choses ne sont ni claires ni plaisantes ni confortables, mais dures à comprendre et plus dures à supporter.

Auteur: Gose Sri Aurobindo

Info: La Bhagavad-Gîtâ

[ univers impersonnel ]

 

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philosophie politico-scientifique

Prix Nobel de physiologie et de médecine en 1965, professeur au Collège de France et directeur de l'Institut Pasteur, Jacques Monod, qui s'est situé à l'avant-garde de la biologie par les travaux qu'il a menés avec André Lwoff et François Jacob sur le code génétique, déborde avec ce livre le domaine scientifique et tente de dégager de la biologie moderne des implications à la fois épistémologiques, éthiques et politiques.

Jacques Monod  part d'une distinction, à ses yeux fondamentale, entre les êtres vivants et les autres structures existantes. Les vivants sont des objets doués d'un projet, propriété qu'il appelle téléonomie. En outre, contrairement aux objets fabriqués, les êtres vivants sont des machines qui se construisent elles-mêmes et qui se reproduisent elles-mêmes de façon invariante. Le projet téléonomique fondamental d'une espèce est d'assurer à la génération suivante la transmission d'un contenu spécifique d'invariance reproductive. La distinction entre téléonomie et invariance se trouve justifiée par des considérations chimiques.

Mais le principe d'objectivité de la nature, pierre angulaire de la science, qui refuse toute explication finaliste, paraît en contradiction avec la téléonomie. Selon Jacques Monod, cette contradiction se résout si l'on fait de l'invariance la propriété primitive et de la téléonomie une propriété seconde. Cette thèse est conforme à la théorie de l'évolution sélective, qui rend compte du raffinement progressif des structures téléonomiques par des perturbations survenues dans une structure possédant déjà la propriété d'invariance. Ainsi, l'évolution apparemment orientée des espèces s'explique par un mécanisme de sélection d'une série de hasards (les mutations), mécanisme qui obéit à des lois biologiques et physico-chimiques nécessaires.

Au contraire, estime Jacques Monod, les idéologies religieuses et la plupart des systèmes philosophiques nient le hasard et font appel à un principe téléonomique universel, responsable d'une évolution cosmique qui a pour but l'épanouissement humain. Cette interprétation est également présente, selon Jacques Monod, dans le progressisme scientiste du XIXe siècle et dans le matérialisme dialectique de Marx et d'Engels.

Résolument indéterministe en ce qui concerne aussi bien l'avènement de l'homme que celui de la cellule primitive, Jacques Monod estime que l'un comme l'autre disposaient, dans la loterie de l'univers, d'une chance voisine de zéro. Cette idée, à laquelle conduit la connaissance objective, est très difficilement acceptable, parce que les hommes ont toujours eu besoin, pour dissiper leur angoisse, de croire qu'ils occupent dans les plans de la nature une place nécessaire.

Jacques Monod, dans les dernières pages, les plus célèbres de son livre, appelle l'homme contemporain à abandonner les valeurs millénaires pour adopter une éthique de la connaissance. Cette éthique définit une valeur transcendante, la connaissance vraie, et propose à l'homme de la servir. Monod y voit la seule attitude rationnelle sur laquelle s'édifierait un véritable socialisme. Emergé par hasard dans l'immensité de l'univers, l'homme peut choisir de se libérer des servitudes mensongères de l'animisme.

Auteur: Favrod Charles-Henri

Info: https://www.letemps.ch/, 27 octobre 2000 - Les grands livres du XXe siècle. "Le hasard et la nécessité" de Jacques Monod

[ univers impersonnel ] [ post-darwinisme laïc ] [ citation s'appliquant à ce logiciel ]

 

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eulogie

L’inutilité fonctionnelle de la mort de Luhmann

Nécrologie en parallèle à certaines étranges formulations

Niklas Luhmann est donc mort. Le 6 novembre 1998, il a cessé de mourir, sous réserve de comprendre la mort comme appartenant à la vie, qui prend fin en même temps que la mort. Les grands médias n’ont pas pu en faire part ; on y célébrait plutôt l’anniversaire d’un autre grand maître de l’ironie, Viktor von Bülow, alias Loriot. Dans les feuilletons des journaux bourgeois en revanche, notamment dans la taz, on a fait des adieux au " grand maître de la théorie ", au " théoricien de la société moderne sans doute le plus important " de la République fédérale. Mais à quoi disait-on adieu ?

Si l’on applique certaines hypothèses fondamentales de la théorie de Luhmann à lui-même, on ne sait plus très bien ce qui s’est réellement passé avec la mort du système biologique et psychique nommé Luhmann. Car d’un côté, la mort - comme le dit l’un  théoricien-référence majeurs de Luhmann, Humberto R. Maturana - c'est la dissolution de l’autopoïèse ; de l’autre, la mort n’a aucun rôle-fonction dans l’autopoïèse. Elle en aurait une si l’on partait du principe que l’autoproduction éternelle d’un système fait partie de ses opérations. C’est peut-être le cas pour les chrétiens, les croyants en la réincarnation ou autres personnes religieuses ; mais sûrement pas pour la théorie de l’autopoïèse, et donc pas pour Luhmann. Pour lui, la vie n’a pas de but, et l’histoire des systèmes vivants ne suit aucun dessein. " Elle se passe ", dit Maturana.

Et la mort ? " L’événement mort survient simplement. " Rien de plus.

Hermann Pfütze rapporte une citation de Luhmann (probablement du milieu des années 1980) qui, malgré son caractère cryptique, pourrait aujourd’hui apporter un éclairage. Cette citation concernait un élément du " cosmos des essences " de sa théorie et les conditions permettant l’autoproduction de sa théorie elle-même. Luhmann dit (selon Pfütze) : " Lorsque l'unité indifférenciée, conceptuellement formulée-bétonnée par moi, est atteinte, tout est terminé." Qu’est-ce qui prend fin ? L’acte de  bétonner ? L’unité sans différence ? Le sens-concept en lui-même ? Et : qui ou quoi atteint cette unité sans différence coulée dans le béton du concept de sens ? Et que signifie " atteindre " : pouvoir observer, toucher, consommer, la fin de l’horizon ?

L’unité indifférenciée dans cette idée : c’est la vie. Pas la vie au sens de la philosophie de l'existence, mais la vie comme concept de création. La créativité, l’autoproduction de la théorie de Luhmann n’a intrinsèquement aucun moyen de s’arrêter elle-même. Techniquement, elle a éliminé la possibilité d’un dernier moment, d’un dernier événement, d’une dernière opération au sein du système. Le concept de sens social est et reste donc contingent dans sa clôture, bien qu’autonome dans sa continuation. La plausibilisation de l’autonomie de la continuation : c’est ici que Luhmann a déployé des efforts considérables. Pour le dire grossièrement, les systèmes ne naissent plus ; ils se génèrent eux-mêmes. Mais la mort/l’arrêt de la vie reste inaccessible pour le système. Il n’y a pas de suicide des systèmes autopoïétiques, du moins pas encore. Et, plus grave peut-être : il n’y a pas de suicide du sens. Ce qu’on peut faire, c’est soit attendre l’arrivée de la mort (le bien connu "être jusqu'au décès"), soit faire comme si la vie vivait pour elle-même (autopoïèse). Luhmann connaissait les deux options et a choisi la seconde. Mais était-il poussé par la première ?

Peut-être bien. Son livre La Société de la société* est précédé d’une citation de Spinoza (Éthique, partie I, axiome 2) : " Ce qui ne peut être conçu par autre chose doit être conçu par soi-même. " Visiblement, il ne s’agit pas ici d’une forme d’auto-conception, de conscience de soi, d’autoréflexion, ni d’une forme d’apparition devant soi, car alors il faudrait dire : "...doit se concevoir par soi-même." Il s’agit plutôt de l’idée que les systèmes qui sont conçus produisent leur réalité par leur propre action ; qu’ils créent eux-mêmes le fond sur lequel ils se détachent comme figure ; qu’ils sont aussi la cause dont ils sont l’effet ; qu’ils ont eux-mêmes posé la question à laquelle ils répondent. Luhmann voulait penser le monde avec des concepts qui ne se laissent plus duper par la réalité, il voulait rendre le concept plus fort que son objet. Le prix à payer pour ces systèmes théoriquement conçus pour " se vivre " eux-mêmes est qu’ils ne peuvent plus apparaître devant eux-mêmes, mais peuvent à tout moment se percevoir eux-mêmes. Chez Whitehead,  véritable précurseur philosophique de Luhmann, c'est exprimé comme suit : "Un individu est réel lorsqu'il a une signification pour lui-même. Il s’ensuit qu’un individu réel agit en fonction de sa propre détermination. Ainsi, un individu réel unit en lui identité et différence." (Procès et réalité, p. 69).

L’individu luhmannien est, comme on le sait, l’événement, qui ne produit paradoxalement l’unité de l’identité et de la différence qu’en distinguant à la fois entre désigner et distinguer, et entre l’événement comme opération opérante et opération observante. Les individus luhmanniens sont donc dans le temps, ou plutôt : dans la temporalité, des individus réellement agissants. S’il n’y avait que la dimension du temps, il n’y aurait pas de mort. La mort est une propriété de l’espace, y compris l’espace de l’observateur. Ranulph Glanville décrit à quoi ressemble la mort là-bas : " Chaque objet est un auto-observateur. Certains objets observent d’autres objets. Certains objets sont observés par d’autres objets. Mais un objet peut être un non-observateur-d’autres-objets et un non-observé-par-d’autres-objets. Un tel objet habite l’univers inconnu des autres. Il ne sait pas qu’il habite l’univers, et l’univers ne sait pas qu’il est un habitant. "

Cet événement, à savoir être à la fois un non-observateur-d’autres-objets et un non-observé-par-d’autres-objets (une description un peu trop précise de la mort), n’existe pas dans la théorie de Luhmann. Il ne peut pas exister. C’est impossible. Mais c’est précisément cette impossibilité qui semble être la raison maîtresse de la construction luhmannienne de la société de la communication.

Si le véritable désir de Luhmann est de construire une théorie de la société au-delà des traditions d’interprétation anthropologiques et humanistes, de sorte que les affirmations sur les systèmes sociaux soient fondées et dérivables exclusivement dans la socialité des systèmes sociaux (c’est-à-dire dans la communication), et que ces affirmations rencontrent des modes d’opération et des principes organisationnels formels qui, à leur tour, ne peuvent rien dire de spécifique sur le système social, mais agissent de manière transsociétale — dans la cellule comme dans le système psychique, dans le cerveau comme dans la communication, dans le système immunitaire comme dans l’amour — ; si donc sa sociologie (dans le domaine de la théorie de la connaissance) n’a pour tâche que de compléter l’épistémologie naturalisée de Quine en y ajoutant la sociologie : pourquoi alors Luhmann maintient-il le sens comme un concept qui échappe à toute naturalisation, à toute métabiologisation ? Est-ce ce que la systématicité autopoïétique a-historique permet comme historicité dans le domaine de la socialité, afin de reproduire les conditions nécessaires à l’accomplissement de l’autopoïèse sans histoire ? — " Seuls les 'sujets' ont besoin d''esprit ' ", dit Luhmann avec dédain. Mais pourquoi la communication socio-sociétale a-t-elle besoin de sens ? (Une hypothèse plausible serait que, pour Luhmann, la communication basée sur et véhiculant le sens, y compris celle qu’il pratique avec sa théorie, n’a elle-même que le statut d’une réduction de complexité assez grossière ; car son destinataire, c’est-à-dire le destinataire de sa théorie, ce sont les machines sémantiques, symboliques, sociales et techniques qui réduisent, produisent et gèrent la complexité. Mais ces machines n’ont pas besoin de sens pour elles-mêmes afin de faire sens pour les humains : elles se comportent simplement, mais n’agissent pas ; elles fonctionnent, ou ne fonctionnent pas. Elles sont déjà " à la fin ", c’est-à-dire là où l’unité sans différence, coulée dans le béton du concept de sens, est atteinte. Seulement, les machines cybernétiques n’en savent rien. Et elles n’en ont pas besoin en ce qui concerne l’action ; car les actions ne sont, généralisées, que des formes d’auto-description des systèmes de communication et donc des "inventions autonomes relatives au système. [...] Il s’agit toujours d’une auto-simplification dans le système concerné" (Luhmann). Avec sa théorie, Luhmann délivre aux machines le certificat qu’elles sont l’avant-garde véritable de tous les non-morts, qu’elles sont la véritable objectivation de ce qui revendique la vitalité pour soi. Mais malheureusement, il n'est lu que par des personnes qui lisent que cela ne les concerne pas. — Peut-être est-il aussi possible que ma perspective soit étroite et qu’un jour, quelqu’un écrive sur Luhmann avec la même plausibilité ce qu’Adorno a écrit sur Hegel : "Hegel, critiqué pour son idéalisme en comparaison avec la concrétion des écoles phénoménologiques, anthropologiques et ontologiques, a introduit infiniment plus de concret dans la pensée philosophique que ces courants, non pas parce que son sens de la réalité et son regard historique auraient contrebalancé sa fantaisie spéculative, mais en vertu de la démarche de sa philosophie — on pourrait dire, à cause du caractère expérientiel de la spéculation elle-même.")

Luhmann est donc mort. La communication sur ses textes, ses pensées et sa théorie, elle, est loin d’être terminée. Peter Fuchs, sans doute l’épigone le plus original de Luhmann, a souligné dans son dernier livre, dissimulé dans une note de bas de page, qu’avec l’œuvre de Luhmann, surtout avec La Société de la société, il reste quelque chose que l’on ne croyait plus possible après plus de vingt ans de troisième postmodernité, à savoir : un grand récit.

Dans ce récit, la mort de Luhmann n'apparaît pas. Son décès demeure un élément environnemental du système " Luhmann ".

Une consolation qui n’aide pas vraiment.



 

Auteur: Ternes Bernd

Info: https://userpage.fu-berlin.de/miles/Tod.html *Die Gesellschaft der Gesellschaft

[ sociologue-par-sociologue ] [ univers impersonnel ] [ homme-machine ] [ non subjectivité ] [ Umwelt ] [ idiosyncrasie ] [ philosophe-par-philosophe ] [ spiritualité ] [ mort intégrée ]

 

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