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opinions politiques

Dostoïevski était parmi les sceptiques. Lecteur assidu des auteurs socialistes, il ne s’en montrait pas moins critique à leur égard. Tout en reconnaissant la noblesse de leurs aspirations, il les considérait comme des chimères d’hommes honnêtes. Il insistait surtout sur le peu d’importance qu’avaient ces théories pour nous autres Russes. Ce n’était pas sur les doctrines socialistes occidentales, disait-il, que pourrait se fonder l’évolution de notre société ; les sources devaient en être recherchées dans la vie et les traditions historiques séculaires de notre peuple. Le mir, l’artel, la caution solidaire formaient à ses yeux une base autrement sûre du progrès social à venir que les rêveries de Saint-Simon et de ses adeptes. La vie dans une commune d’Icarie ou dans un phalanstère lui apparaissait comme plus pénible et plus avilissante que n’importe quel bagne. Il va de soi que nos fanatiques du socialisme ne partageaient pas sa manière de voir.

Auteur: Milioukov Alexandre

Info: "Dostoïevski vivant", trad. du russe par Raïssa Tarr, éditions Gallimard, 1972, page 59

[ déracinement ] [ critique ]

 

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roman

Peu à peu, Fédor Mikhaïlovitch consentit à nous parler de sa vie en Sibérie et des mœurs des réprouvés, ses compagnons de bagne. La plupart de ces récits furent inclus ensuite dans les Souvenirs de la maison morte. Ce livre, d’ailleurs, parut dans des circonstances opportunes.

L’esprit de tolérance soufflait sur le pays et pénétrait jusqu’à la censure. Des ouvrages virent le jour dont, peu de temps avant, la publication paraissait impensable. Certes, la censure fut quelque peu troublée par ce livre sans précédent, tout entier consacré à illustrer des vies de forçats, par le fond noir des récits dont les héros étaient d’effroyables criminels et enfin par le fait que l’auteur lui-même était un ancien prisonnier politique, à peine revenu à la vie normale. Cependant, rien ne put détourner Dostoïevski de rapporter exactement ce qu’il avait connu. Aussi les Souvenirs de la maison morte bouleversèrent-ils l’opinion ; leur auteur apparut comme un autre Dante. L’enfer où il était descendu fut d’autant plus terrifiant pour le public que, loin d’être le fruit de l’imagination du poète, il appartenait incontestablement au monde de la réalité. Cependant, sur les instances de la censure, Dostoïevski supprima l’épisode des Polonais déportés et des détenus politiques.

Auteur: Milioukov Alexandre

Info: "Dostoïevski vivant", trad. du russe par Raïssa Tarr, éditions Gallimard, 1972, page 67

[ contexte ] [ réception ] [ circonstances ]

 

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