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longue solitude

Quand on vit seul, on ne sait même plus ce que c’est que raconter : le vraisemblable disparaît en même temps que les amis. Les évènements aussi, on les laisse couler ; on voit surgir brusquement des gens qui parlent et qui s’en vont, on plonge dans des histoires sans queue ni tête : on ferait un exécrable témoin.

Auteur: Sartre Jean-Paul

Info: La nausée

[ déconnexion ] [ réel déconnecté ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

cerveau

Si je pouvais m’empêcher de penser ! J’essaie, je réussis : il me semble que ma tête s’emplit de fumée… et voilà que ça recommence : "Fumée… ne pas penser… Je ne veux pas penser… Je pense que je ne veux pas penser. Il ne faut pas que je pense que je ne veux pas penser. Parce que c’est encore une pensée." On n’en finira donc jamais ?

Auteur: Sartre Jean-Paul

Info: La nausée

[ incontrolable ] [ gamberge ] [ imprévisible ] [ emballement ] [ idées ]

 

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ontologie

Pour moi le passé n’était qu’une mise à la retraite : c’était une autre manière d’exister, un état de vacance et d’inaction ; chaque évènement, quand son rôle avait pris fin, se rangeait sagement, de lui-même, dans une boîte et devenait évènement honoraire : tant on a de peine à imaginer le néant. Maintenant, je savais : les choses sont tout entières ce qu’elles paraissent — et derrière elles… il n’y a rien.

Auteur: Sartre Jean-Paul

Info: La nausée

[ classer ] [ détruire ] [ ancien effacé ] [ nihilisme ]

 
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Ajouté à la BD par Plouin

détail

Évidemment, il ne s’est rien produit de nouveau, si l’on veut : ce matin, à huit heures et quart, comme je sortais de l’hôtel Printania pour me rendre à la bibliothèque, j’ai voulu et je n’ai pas pu ramasser un papier qui traînait par terre. C’est tout et ce n’est même pas un événement. Oui, mais, pour dire toute la vérité, j’en ai profondément impressionné : j’ai pensé que je n’étais plus libre.

Auteur: Sartre Jean-Paul

Info: La nausée

[ gamberge ]

 
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Ajouté à la BD par miguel

paysage

Mathieu ouvrit les yeux et vit le ciel ; il était gris perle, sans nuage, sans fond, rien qu'une absence. Un matin s'y formait lentement, une goutte de lumière qui allait tomber sur la terre et l'inonder d'or. Un commencement, un matin. Le premier matin du monde, comme tous les matins : tout était à faire, tout l'avenir était dans le ciel.(...)

Un chat passa près d'eux à toute vitesse, en zigzaguant. Il se tapit soudain, parut prêt à bondir ; puis, oubliant son projet, s'éloigna nonchalamment.

Auteur: Sartre Jean-Paul

Info: Dans "Les chemins de la liberté"

[ description ] [ instantané de vie ] [ espoir ]

 
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Ajouté à la BD par Coli Masson

motivation

Jamais je ne me suis crû l'heureux propriétaire d'un talent, ma seule affaire était de me sauver - rien dans les mains, rien dans les poches - par le travail et la foi. Du coup ma pure option ne m'élevait au-dessus de personne; sans équipement, sans outillage, je me suis mis tout entier à l'oeuvre pour me sauver tout entier. Si je range l'impossible salut au magasin des accessoires, que reste-t-il ? : Tout un homme fait de tous les hommes et qui les vaut tous et que vaut n'importe qui.

Auteur: Sartre Jean-Paul

Info:

[ s'en sortir ]

 

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intellectuel

Cela me navrait : je m'étais armé pour défendre l'humanité contre des dangers terribles et tout le monde m'assurait qu'elle s'acheminait doucement vers la perfection. Grand-père m'avait élevé dans le respect de la démocratie bourgeoise : pour elle, j'aurais dégainé ma plume volontiers ; mais sous la présidence de Fallières le paysan votait : que demander de plus ? Et que fait un républicain s'il a le bonheur de vivre en république ? Il se tourne les pouces ou bien il enseigne le grec et décrit les monuments d'Aurillac à ses moments perdus.

Auteur: Sartre Jean-Paul

Info: In "Les Mots", éd. Gallimard, p. 147

[ fin de l'histoire ] [ progrès ] [ sentiment d'inutilité ] [ Gaule ] [ passe-temps ]

 

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Ajouté à la BD par Benslama

média

La première chose sur laquelle on fait beaucoup d'erreurs, c'est qu'on croit que la liberté d'information, le droit à la liberté de la presse, c'est un droit du journaliste. Mais pas du tout, c'est un droit du lecteur du journal. C'est-à-dire que ce sont les gens, les gens dans la rue, les gens qui achètent le journal, qui ont le droit d'être informés. Ce sont les gens qui travaillent dans une entreprise, dans un chantier, dans un bureau qui ont le droit de savoir ce qu'il se passe et d'en tirer les conséquences.

Auteur: Sartre Jean-Paul

Info:

[ indépendance ]

 

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vacherie

Il faut se rappeler que la plupart des critiques sont des hommes qui n'ont pas eu beaucoup de chance et qui, au moment où ils allaient désespérer, ont trouvé une petite place tranquille de gardien de cimetière. Dieu sait si les cimetières sont paisibles?: il n'en est pas de plus riant qu'une bibliothèque. Les morts sont là?: ils n'ont fait qu'écrire, ils sont lavés depuis longtemps du péché de vivre et d'ailleurs on ne connaît leur vie que par de petits cercueils qu'on range sur des planches, le long des murs, comme les urnes d'un columbarium. Le critique vit mal, sa femme ne l'apprécie pas comme il faudrait, ses fils sont ingrats, les fins de mois difficiles. Mais il lui est toujours possible d'entrer dans sa bibliothèque, de prendre un livre sur un rayon et de l'ouvrir. Il s'en échappe une légère odeur de cave et une opération étrange commence, qu'il a décidé de nommer la lecture. [...] C'est tout un monde désincarné qui l'entoure où les affections humaines, parce qu'elles ne touchent plus, sont passées au rang d'affections exemplaires, et pour tout dire, de valeurs. Aussi se persuade-t-il d'être entré en commerce avec un monde intelligible qui est comme la vérité de ses souffrances quotidiennes et leur raison d'être. [...] Et, pendant le temps qu'il lit, sa vie de tous les jours devient une apparence. [...] C'est une fête pour lui quand les auteurs contemporains lui font la grâce de mourir?: leurs livres, trop crus, trop vivants, trop pressants passent de l'autre bord, ils touchent de moins en moins et deviennent de plus en plus beaux?; [...] Quant aux écrivains qui s'obstinent à vivre, on leur demande seulement de ne pas trop remuer et de s'appliquer à ressembler dès maintenant aux morts qu'ils seront.

Auteur: Sartre Jean-Paul

Info: Qu'est-ce que la littérature ?

[ analyste ]

 

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