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province

Madame Staël n'aimait pas les petites villes. "Leur séjour m'a toujours paru très ennuyeux, L'esprit des hommes s'y rétrécit, le coeur des femmes s'y glace ; on y vit tellement en présence les uns des autres qu'on est oppressé par ses semblables. Ce n'est plus cette opinion à distance qui vous anime et retentit de loin comme le bruit de la gloire ; c'est un examen minutieux de toutes les actions de votre vie, une observation de chaque détail, qui rend incapable de comprendre l'ensemble de votre caractère; et plus on a d'indépendance et d'élévation moins on peut respirer à travers tous ces petits barreaux."

Auteur: Staël Madame de Germaine Necker baronne de Staël-Holstein

Info: in Staëlliana de Cousin d'Avallon

[ étroitesse ] [ étouffement ]

 

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dictature

Madame Staël termine ses observations sur Louis XIV, par une remarque pleine de force et de vérité : " Il ne faut jamais juger les despotes par les succès momentanés que la tension même du pouvoir leur fait obtenir. C'est par l'état dans lequel ils laissent leur pays à leur mort où à leur chute ; c'est ce qui reste de leur règne, à présent, qui révèle ce qu'ils ont été. L'ascendant politique des nobles et du clergé a fini en France avec Louis XIV; il ne les avait fait servir qu'à sa puissance : ils se sont trouvés après lui sans liens avec la nation même, dont l'importance croissait chaque jour."

Auteur: Staël Madame de Germaine Necker baronne de Staël-Holstein

Info: in Staëlliana de Cousin d'Avallon

[ royauté ] [ héritage politique ]

 

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réparties

Bonaparte n'aimait pas qu'une femme se mêlât de balancer les intérêts des Etats. A l'époque où il n'était encore que général, il se trouva dans un cercle, où Mme de Staël venait, dans une espèce de dissertation aussi spirituelle que bien raisonnée, de juger les différents partis qui avaient successivement gouverné la France. Tout le monde joignait son avis au sien et applaudissait à son esprit : Bonaparte seul se taisait, elle s'en aperçut, " Eh bien ! général, est-ce que vous n'êtes pas de mon avis ? - Madame, je n'ai pas écouté, parce que je n'aime pas que les femmes se mêlent de politique. - Vous avez raison, général, répondit l'aimable raisonneuse, mais dans un pays où on leur coupe la tête, il est naturel qu'elles aient envie de savoir pourquoi. (Bonaparte ne répliqua rien)

Auteur: Staël Madame de Germaine Necker baronne de Staël-Holstein

Info:

[ femmes-hommes ] [ macho ]

 

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éloge

Ne craignez pas que je sois comme madame Miford, que je mette la couronne sur votre tête au moment le plus pathétique ; mais comme je ne puis vous comparer qu'à vous même, il faut que je vous dise, Talma, qu'hier vous avez surpassé la perfection et l'imagination même. Il y a dans cette pièce, toute défectueuse qu'elle est, un débris d'une tragédie plus forte que la nôtre, et votre talent m'est apparu dans ce rôle de Hamlet, comme le génie de Shakespeare, mais sans inégalités, sans les gestes familiers, devenus tout-à-coup ce qu'il y a de plus noble sur la terre.
Cette profondeur de nature, ces questions sur notre destinée à tous, en présence de cette foule qui mourra, et qui semblait vous écouter comme l'oracle du sort ; cette apparition du spectre, plus terrible dans vos regards que sous la forme la plus redoutable, cette profonde mélancolie, cette voix, ces regards qui révèlent des sentiments, un caractère au-dessus de toutes les proportions humaines ; c'est admirable, trois fois admirable; et mon amitié pour vous n'entre pour rien dans cette émotion la plus profonde que les arts m'aient fait ressentir depuis que je vis. Je vous aime, dans la chambre, dans les rôles où vous êtes encore votre pareil ; mais dans ce rôle d'Hamlet, vous m'inspirez un tel enthousiasme, que ce n'était plus vous, que ce n'était plus moi; c'était une poésie de regards, d'accents, de gestes à laquelle aucun écrivain ne s'est encore élevé. Adieu, pardonnez-moi de vous écrire, quand je Vous attends ce matin à une heure, et ce soir à huit ; mais si les convenances sociales ne devaient pas tout arrêter, je ne sais pas, hier, si je ne me serais pas fait fière d'aller moi-même vous donner cette couronne, qui est due à un tel talent plus qu'à tout autre ; car ce n'est pas un acteur que vous êtes, c'est un homme qui élève la nature humaine, en nous en donnant une idée nouvelle. Adieu ! à une heure. Ne me répondez pas, mais aimez-moi pour mon admiration.

Auteur: Staël Madame de Germaine Necker baronne de Staël-Holstein

Info: in Staëlliana de Cousin d'Avallon, Staël à Talma, Juillet 1809

[ théâtre ] [ comédien ]

 

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