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concision

La conclusion du premier mouvement d’une symphonie de Dvorak (symphonie en fa majeur, assez rarement jouée) illustre bien cette sorte de mutisme, de "silence musical" ou de "musique qui se tait" comme dirait Federico Mompou (Musica callada). Dvorak a développé cet allegro initial autour d’un thème simplissime qui apparaît dès la première mesure de l’œuvre et consiste en une broderie en arpège du deuxième renversement de l’accord parfait de fa majeur : do fa ; do la do fa la fa. Il conclut son premier mouvement par ce même thème énoncé paisiblement en solo, sans le moindre soutien harmonique hormis la tenue de l’accord de fa majeur, aussitôt suivi d’un point final (c’est-à-dire sans la succession d’accords qui annoncent généralement, dans la symphonie romantique, la fin du morceau par une péroraison académique, parfois interminable et pompière). Cette fin peut prendre l’auditeur de court, comme surprirent en leur temps les fins abruptes de Ravel, bientôt suivi par les compositeurs qui héritèrent de lui l’art de savoir interrompre. – Quoi, c’est déjà fini ? – Oui, c’est fini, j’ai dit tout ce que je voulais dire. – Mais que vouliez-vous dire au juste ? – Eh bien, précisément cela : do fa ; do la do fa la fa. Le poumon, vous dis-je.

Auteur: Rosset Clément

Info: Dans "L'invisible" pages 23-24

[ interprétation ]

 
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satisfaction sereine

Une des marques les plus assurées de la joie est, pour user d’un qualificatif aux résonances fâcheuses à bien des égards, son caractère totalitaire. Le régime de la joie est celui du tout ou rien : il n’est de joie que totale ou nulle (et j’ajouterai, anticipant sur la suite de mon propos, qu’il n’est de joie qu’à la fois totale et de certaine façon nulle). L’homme joyeux se réjouit certes de ceci ou de cela en particulier ; mais à l’interroger davantage on découvre vite qu’il se réjouit aussi de tel autre ceci et de tel autre cela, et encore de telle et telle autre chose, et ainsi de suite à l’infini. Sa réjouissance n’est pas particulière mais générale : il est " joyeux de toutes les joies ", omnibus laetitiis laetum, comme le dit un amoureux comblé dans une pièce du dramaturge latin Trabéa, partiellement citée par Cicéron. Parole pénétrante, encore qu’on ignore tout du contexte dans lequel elle se situait. Ce que suggère une telle parole peut à peu près s’énoncer ainsi : il y a dans la joie un mécanisme approbateur qui tend à déborder l’objet particulier qui l’a suscitée pour affecter indifféremment tout objet et aboutir à une affirmation du caractère jubilatoire de l’existence en général. La joie apparaît ainsi comme une sorte de quitus aveugle accordé à tout et à n’importe quoi, comme une approbation inconditionnelle de toute forme d’existence présente, passée ou à venir.






Auteur: Rosset Clément

Info: La force majeure, pp. 7-8

[ bien-être ]

 

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ressort illusoire

Affirmer le caractère névrotique de l'espérance peut certes sembler paradoxal : puisqu'on tient généralement celle-ci pour une vertu, c'est à dire une force. Pourtant il n'est pas de force plus douteuse que l'espérance. Ce n'est sans doute pas par hasard, ni par l'effet d'une erreur de copiste, que Hésiode assimile, toujours dans Les travaux et les jours, l'espoir au pire des maux, au fléau qui est resté dans la boîte de Pandore, à la libre disposition des hommes qui s'y précipitent dans la pensée qu'ils y trouveront le salut et le contre-poison à tous les autres maux, alors qu'il s'agit d'un poison parmi les autres, sinon du poison par excellence. Tout ce qui ressemble à de l'espoir, à de l'attente, constitue en effet un vice, soit un défaut de force une défaillance, une faiblesse, - un signe que l'exercice de la vie ne va plus de soi, se trouve en position attaquée et compromise. Un signe que le goût de vivre fait défaut et que la poursuite de la vie doit dorénavant s'appuyer sur une force substitutive : non plus sur le goût de vivre la vie que l'on vit, mais sur l'attrait d'une vie autre et améliorée que nul ne vivra jamais. L'homme de l'espoir est un homme à bout de ressources et d'arguments, un homme vidé, littéralement "épuisé" ; tel cet homme dont parle Schopenhauer, qui "espère trouver dans des consommés et dans des drogues de pharmacie la santé et la vigueur dont la vraie source est la force vitale propre".


Auteur: Rosset Clément

Info: La force majeure

[ dénigrement ]

 

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ego

Renoncer à se peindre de face équivaut à renoncer à se voir, c’est-à-dire renoncer à l’idée que le soi puisse être perçu comme une réplique qui permette au sujet de se saisir lui-même. Le double, qui autoriserait cette saisie, signifierait aussi le meurtre du sujet et le renoncement à soi, perpétuellement dessaisi de lui-même au profit d’un double fantomatique et cruel ; cruel de n’être pas, comme le dit Montherlant : " car ce sont les fantômes qui sont cruels ; avec des réalités, on peut toujours s’arranger ". C’est pourquoi l’assomption jubilatoire de soi-même, la présence véritable de soi à soi, implique nécessairement le renoncement au spectacle de sa propre image. Car l’image, ici, tue le modèle. Et c’est au fond l’erreur mortelle du narcissisme que de vouloir non pas s’aimer soi-même avec excès, mais, tout au contraire, au moment de choisir entre soi-même et son double, de donner la préférence à l’image. Le narcissique souffre de ne pas s’aimer : il n’aime que sa représentation. S’aimer d’amour vrai implique une indifférence à toutes ses propres copies, telles qu’elles peuvent apparaître à autrui et, par le biais d’autrui, si j’y prête trop attention, à moi-même. Tel est le misérable secret de Narcisse : une attention exagérée à l’autre. C’est d’ailleurs pourquoi il est incapable d’aimer personne, ni l’autre ni lui-même, l’amour étant une affaire trop importante pour qu’on commette à autrui le soin d’en débattre. Que t’importe si je t’aime, disait Goethe ; cela ne vaut que si l’on accorde implicitement que l’assentiment d’autrui est également facultatif dans l’amour que l’on porte à soi-même : que t’importe si je m’aime.

Auteur: Rosset Clément

Info: Le réel et son double, au sujet de " L’atelier " de Vermeer

[ je ] [ dédoublement ]

 

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mésinterprétation

Pour être honnête, même les nazis n’ont pas réussi à délirer autant à propos de Nietzsche que Heidegger. Lisez son cours sur Nietzsche en deux volumes : tout y est faux de bout en bout. Dès le début, Heidegger explique qu’il ne va pas parler de ce que Nietzsche a écrit, mais de ce qu’il n’a pas écrit. Voilà comment il justifie cette méthodologie pour le moins curieuse : "Si notre connaissance se limitait à ce qui fut publié par Nietzsche même, nous ne pourrions jamais apprendre ce que Nietzsche savait déjà, ce qu’il préparait et ne cessait de mûrir, mais qu’il retint." Avec ces prémisses, Heidegger explique que l’éternel retour est une découverte essentielle, majeure, montrant que Nietzsche est un penseur de l’Être, de ce qui perdure et revient au-delà du défilé des événements, et qu’il serait donc heideggérien avant la lettre. Le plus curieux, c’est que les philosophes français de l’après-guerre, Derrida et Deleuze en tête, aient pris cette lecture au sérieux. Je ne sais pourquoi, dans l’université française, s’est propagé le mythe selon lequel Heidegger serait le grand philosophe du XXe siècle. C’est d’autant plus incompréhensible que ces dithyrambes sur Heidegger ont commencé juste après l’Occupation, preuve que nous ne sommes pas trop rancuniers.

La réalité, c’est que Nietzsche est le penseur le plus anti-heideggérien qui soit : pour lui, l’éphémère est plus important que l’éternel, le devenir a plus de valeur que l’Être, la surface est la véritable profondeur. Moi, j’admire Nietzsche parce qu’il a su prendre sur ses frêles épaules deux millénaires de philosophie idéaliste, et qu’il les a renversés. Je ne m’explique toujours pas comment il a eu la force de mener à bien un tel combat, alors qu’il avait une santé fragile et une trajectoire rien de moins que précaire. Mais c’est l’exploit de Nietzsche.

Auteur: Rosset Clément

Info: Entretien

[ détournement ] [ résumé ] [ critique ] [ vacherie ] [ éloge ]

 
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fondements philosophiques

Ainsi la philosophie s’obstine-t-elle généralement à remplacer l’idée que "cela est" par l’idée qu’il est impossible et inadmissible que "cela soit" : opposant au règne souverain et contraignant de l’être, le règne fantasmatique et moral d’un "doit être". […] ce à quoi en a la morale n’est pas du tout l’immoral, l’injuste, le scandaleux, mais bien le réel, - unique et vraie source de tout le scandale. Le cas de Platon et de Rousseau, pour m’en tenir à ces deux seuls penseurs soucieux avant tout de morale, est ici très éclairant. Platon ne cesse en effet de représenter comme méprisable et indigne de l’homme ce qui constitue au contraire sa tâche la plus haute et la plus difficile : je veux dire s’accommoder du réel, trouver sa satisfaction et son destin dans le monde sensible et périssable. De même l’égarement de Rousseau consiste-t-il essentiellement à condamner comme immorale toute réalité dès lors que celle-ci est tragique. […] Le dernier mot de la philosophie de Platon comme de celle de Rousseau me paraît ainsi se résumer à ce simple et aberrant adage : que si la vérité est cruelle, c’est qu’elle est fausse, - et doit par conséquent être à la fois réfutée par les doctes et dissimulée au peuple. Kant, me semble-t-il, s’inspire souvent du même adage ; établissant volontiers – ou croyant établir – la validité des thèses qui lui sont chères (comme l’immortalité de l’âme ou la rationalité et la finalité de la nature) sur la seule considération du caractère contrariant des hypothèses inverses. Ainsi cette démonstration étrange de la première proposition de l’Idée d’une histoire universelle au point de vue cosmopolitique. Proposition : "Toutes les dispositions naturelles d’une créature sont déterminées de façon à se développer un jour complètement et conformément à un but." Démonstration : "Car si nous nous écartons de ce principe, nous n’avons plus une nature conforme à des lois, mais une nature marchant à l’aveuglette, et le hasard désolant remplace le fil conducteur de la raison." Idées vraies et idées fausses se départagent en somme aisément au gré de Kant : les premières se reconnaissent à leur nature agréable, les secondes à leur aspect "désolant".

Auteur: Rosset Clément

Info: "Principe de cruauté" in L'école du réel, pages 216-218

[ autoconfirmation ] [ réconfort existentiel ] [ simplicité bipolaire ]

 

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observateur

Hegel distingue deux formes d'illusions: l'illusion grossière, qui consiste à prendre les choses pour ce dont elles ont l'apparence, et l'illusion métaphysique, qu'il prétend dépasser, qui consiste à reléguer le réel dans un autre monde, complètement distinct du monde de l'apparence.

Il faut donc, chez Hegel, distinguer non pas deux mondes mais bien trois: 

1. Le monde des apparences sensibles;

2. Le monde suprasensible, considéré en tant qu'il est différent du monde sensible;

3. Ce monde suprasensible, mais considéré cette fois en tant qu'il coïncide finalement avec le monde premier des apparence

Comme troisième monde, qui prend le contrepied du second en ce qu'il annule la différence que celui-ci prétendait instituer entre lui-même et le monde sensible, mais ne se confond pas pour autant avec le monde immédiat (ce dernier étant incapable de se réfléchir pour n'avoir pas encore parcouru l'itinéraire de sa radicale mise en doute métaphysique et du retour à lui-même), ce troisième monde est ce que Hegel appelle "Le Monde Renversé", c'est-à-dire un double de l'unique, qui serait justement l'unique lui-même, mais seulement au retour d'une galipette, qui n'aurait accompli le tour métaphysique que pour mieux ramener au point de départ…

…Un tour qui n'est pas sans bénéfice; on était parti des apparences sensibles, simples écorces du réel, alors que, une fois terminé la galipette, on retombe sur l'intérieur, ou le fond des choses, on découvre alors que le sensible n'est autre que la concrétisation progressive de l'au-delà suprasensible, dont il constitue ce que Hegel appelle: “le remplissement“. Le suprasensible, dit Hegel, est donc le phénomène comme phénomène. 

Nous comprenons ce que voulait dire Hegel en prétendant qu'il n'y avait pas deux mondes, mais que le monde intelligible était le phénomène comme phénomène, la manifestation qui est dans son évolution effective, seulement manifestation de soi par soi. 

En d'autres termes, ce monde-ci est l'autre d'un autre monde, qui est justement le même que ce monde-ci. Car cet itinéraire mystérieux au cours duquel le phénomène se médiatise par lui-même pour devenir manifestation de l'essence, n'est autre que le chemin qui conduit de A à A, en passant par A. 

Cette étrange coïncidence de ce monde et de l'autre monde n'échappe pas à Hegel, qui y voit le dernier mot du mystère philosophique, c'est-à-dire du mystère qui fait que les choses sont justement ce qu'elles sont, et non pas d'autres, d'où l'idée ouvertement démentielle que, la coïncidence du réel avec le réel est l'effet d'une ruse; “la grande ruse“, disait Hegel dans une note personnelle, “c'est que les choses sont comme elles sont“. 

L'essence de l'essence est de se manifester, et la manifestation est manifestation de l'essence.

Auteur: Rosset Clément

Info:

[ unicité ] [ scrutateur ] [ miroir ]

 

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