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relativisme

Qui oserait encore prétendre, aujourd’hui, que sa colère soit vraiment la sienne, quand tant de gens se mêlent de lui en parler et de s’y retrouver mieux que lui-même ? Il s’est constitué un monde de qualités sans homme, d’expériences vécues sans personne pour les vivre ; on en viendrait presque à penser que l’homme, dans le cas idéal, finira par ne plus pouvoir disposer d’une expérience privée et que le doux fardeau de la responsabilité personnelle se dissoudra dans l’algèbre des significations possibles. 

Auteur: Musil Robert

Info: Dans "L'homme sans qualités", tome 1, trad. Philippe Jaccottet, éditions du Seuil, 1957, page 234

[ psychologisme ] [ hors-sol ] [ virtualisation ] [ dissolution grégaire ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

nature

Les rusés forestiers se contentent de veiller à maintenir un rien d'irrégularité, un arbre sortant un peu du rang pour accrocher le regard, une coupe de guingois ou un tronc abattu qu'on laisse là tout l'été. Car ils ont un sentiment très juste de la Nature et savent qu'à en faire plus, ils ne seraient pas crus. Les forêts sauvages ont quelque chose d'extrêmement peu naturel, de dégénéré. Chez elles, la non-nature, devenue la seconde nature de la Nature, retombe à la nature. Une forêt allemande ne se le permettrait pas.

Auteur: Musil Robert

Info: oeuvres pré-posthumes

[ Europe ] [ sylviculture ]

 

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opinion

Etant un homme efficace dans sa spécialité, il savait naturellement que l'on ne peut avoir de conviction sur laquelle miser soi-même en dehors du seul domaine où l'on est vraiment ferré ; l'extraordinaire extension des activités empêche qu'il s'en forme ailleurs. C'est pourquoi les hommes efficaces et travailleurs, en dehors du cercle fort étroit de leur spécialité, n'ont aucune conviction qu'ils ne soient prêts à renier pour peu qu'ils devinent sur elle quelque pression extérieure ; on pourrait carrément dire qu'ils se voient forcés par scrupule de conscience, d'agir autrement qu'ils ne pensent.

Auteur: Musil Robert

Info: L'homme sans qualités, Editions du Seuil, Points 1956 <p.169>

 

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idéaliste

Vois-tu, Clarisse, ce dont nous avons tous besoin aujourd’hui avant tout, c’est de simplicité, de santé, de contact avec la terre et aussi, sans aucun doute, quoi que tu puisses dire, d’un enfant, parce que ce sont les enfants qui vous donnent des racines. Tout ce qu’Ulo te raconte est inhumain. Je t’assure que moi, quand je rentre à la maison, j’ai vraiment, je possède vraiment le courage de prendre simplement le café avec toi, d’écouter les oiseaux, de faire une petite promenade, d’échanger quelques mots avec les voisins et de laisser tranquillement le jour s’éteindre : voilà ce qu’est la vie humaine ! 

Auteur: Musil Robert

Info: Discours d'un homme à son épouse, dans "L'homme sans qualités", tome 1, trad. Philippe Jaccottet, éditions du Seuil, 1957, page 106

[ innocence blessante ]

 
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Ajouté à la BD par Coli Masson

hyperactivité

Ce n’est plus le temps où l’on s’étendait sous un arbre à regarder le ciel entre deux orteils, mais le temps où l’on produit. Quand on veut être actif, on n’a plus le droit d’être affamé ni de rêvasser : il faut manger des beefsteaks, et se remuer. C’est exactement comme si l’ancienne humanité inactive s’était endormie sur une fourmilière, et que la nouvelle, en s’éveillant, eût senti les fourmis dans ses jambes, de sorte qu’elle se voit forcée d’accomplir les mouvements les plus violents sans jamais pouvoir se défaire de ce sentiment d’une activité purement animale qui la démange comme vermine. 

Auteur: Musil Robert

Info: Dans "L'homme sans qualités", tome 1, trad. Philippe Jaccottet, éditions du Seuil, 1957, page 63

[ moderne ] [ paresse interdite ] [ fuite en avant ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

croissance de la pensée

C¹est une chose bien étrange que les pensées.

Elles ne sont souvent rien de plus que des accidents qui disparaissent sans laisser de traces, elles ont leurs temps morts et leurs saisons florissantes.

On peut faire une découverte géniale et la voir néanmoins se faner lentement dans vos mains, telle une fleur.

La forme en demeure, mais elle n'a plus ni couleur, ni parfum.

C¹est-à-dire que l¹on a beau s'en souvenir mot pour mot, que sa valeur logique peut bien être intacte, elle ne rôde plus qu¹à la surface de notre être, au hasard, et sans nous enrichir.

Jusqu¹à ce que revienne soudain - quelques années plus tard peut-être - un moment où nous prenons conscience que dans l¹intervalle, même si notre logique a paru en tenir compte, nous avons complètement négligé sa présence.

Auteur: Musil Robert

Info: Dans "Les désarrois de l¹élève Törless"

[ contingence ] [ appartenance ] [ comprendre ] [ synchronicité ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

frustration

Notre époque ruisselle suffisamment d'énergie. On ne veut plus voir que des actes, et nulle pensée. Cette terrible énergie provient de ce que l'on n'a plus rien à faire. Intérieurement, je veux dire. Mais en fin de compte, même extérieurement, l'homme ne fait que répéter toute sa vie un seul et même acte : il entre dans une profession, puis y progresse. […] Il est si simple d'avoir la force d'agir, et si malaisé de trouver un sens à l'action ! Très peu de gens, aujourd'hui, le comprennent. C'est pourquoi les hommes d'action ressemblent à des
joueurs de quilles qui emprunteraient des poses à la Napoléon pour renverser neuf machins de bois ! Je ne serais même pas surpris qu'ils finissent par en venir violemment aux mains, simplement pour voir passer par-dessus leur tête ce mystère incompréhensible : que toutes les actions du monde ne suffisent jamais !

Auteur: Musil Robert

Info: L'Homme sans qualités, tome 2, Chap 10 : Suite de l'excursion à la Schwedenschanze. La morale du deuxième pas.

[ perdu ]

 

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description météorologique

On signalait une dépression au-dessus de l'Atlantique ; elle se déplaçait d'est en ouest en direction d'un anticyclone situé au-dessus de la Russie, et ne manifestait encore aucune tendance à l'éviter vers le nord. Les isothermes et les isothères remplissaient leurs obligations. Le rapport de la température de l'air et de la température annuelle moyenne, celle du mois le plus froid et le mois le plus chaud, et ses variations mensuelles apériodiques, était normal. Le lever, le coucher du soleil et de la lune, les phases de la lune, de Vénus et de l'anneau de Saturne, ainsi que nombre d'autres phénomènes importants, étaient conformes aux prédictions qu'en avaient faites les annuaires astronomiques. La tension de vapeur dans l'air avait atteint son maximum, et l'humidité relative était faible. Autrement dit, si l'on ne craint pas de recourir à une formule démodée, mais parfaitement judicieuse : c'était une belle journée d'août 1913.

Auteur: Musil Robert

Info: Dans "L'homme sans qualités", tome 1, trad. Philippe Jaccottet, éditions du Seuil, 1957, page 15

[ microcosme-macrocosme ]

 
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portrait

Il semblait que le père de Léone eût été un respectable petit bourgeois qui la battait chaque fois qu’elle sortait avec un admirateur ; mais, si elle sortait, c’était uniquement parce que sa plus grande joie était d’être assise à la terrasse d’une petite pâtisserie et de plonger sa cuillère dans une glace tout en jetant sur les passants des regards "distingués". Bien que l’on ne pût vraiment affirmer qu’elle n’était pas sensuelle, il faudrait dire, dans la mesure où on en a le droit, qu’elle se montrait, dans ce domaine comme dans les autres, plutôt paresseuse et peu encline au travail. Chaque excitation, dans son interminable corps, mettait un temps infini à atteindre le cerveau, et il arrivait qu’au milieu de la journée, sans aucune raison, ses yeux commençaient à fondre, alors que, pendant la nuit, ils étaient restés fixés sans bouger sur un point du plafond comme pour y observer une mouche. 

Auteur: Musil Robert

Info: Dans "L'homme sans qualités", tome 1, trad. Philippe Jaccottet, éditions du Seuil, 1957, page 36

[ jeune femme ] [ flegmatique ] [ frigide ] [ femme-par-homme ]

 
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naïveté enfantine

Ainsi donc, pensa Ulrich lorsqu’il se retrouva seul, ils avaient été vraiment, dans un temps pas si lointain, deux jeunes hommes dont l’esprit bénéficiait des plus hautes révélations non seulement avant tous les autres, mais encore, chose étrange, simultanément ; il suffisait en effet, que l’un des deux ouvrit la bouche dans l’intention de proférer quelque grande nouveauté, pour que l’autre fît aussitôt la même extraordinaire découverte. Les amitiés d’enfance sont chose bizarre ; elles ressemblent à un œuf qui pressent déjà dans le jaune son splendide avenir d’oiseau, mais ne montre encore au monde qu’un ovale assez inexpressif, impossible à distinguer d’aucun autre. […]

Il cherchait à se rappeler ces conversations avec Walter. Mais c’était comme des rêves dont on attrape juste les ultimes pensées au moment du réveil. Et il pensa, non sans surprise : "Alors, quand nous soutenions telle ou telle affirmation, nous ne nous souciions pas tellement qu’elles fussent justes, mais bien qu’elles servissent à nous affirmer !" Tant le besoin de luire soi-même, chez les jeunes gens, est plus fort que celui de voir dans la lumière ; et le souvenir de ce sentiment qu’on avait de flotter sur des rayons, Ulrich l’éprouvait comme une perte douloureuse. 

Auteur: Musil Robert

Info: Dans "L'homme sans qualités", tome 1, trad. Philippe Jaccottet, éditions du Seuil, 1957, pages 89-90

[ remémoration ] [ construction identitaire ]

 

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