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motivation

Il est aussi impossible qu'une société puisse se former et subsister sans amour-propre, qu'il serait impossible de faire des enfants sans concupiscence, de songer à se nourrir sans appétit, etc. C'est l'amour de nous-mêmes qui assiste l'amour des autres ; c'est par nos besoins mutuels que nous sommes utiles au genre humain ; c'est le fondement de tout commerce ; c'est l'éternel lien des hommes. Sans lui il n'y aurait pas eu un art inventé, ni une société de dix personnes formée ; c'est cet amour-propre que chaque animal a reçu de la nature qui nous avertit de respecter celui des autres. La loi dirige cet amour-propre et la religion le perfectionne.

Auteur: Voltaire

Info: Lettres Philosophiques, Mélanges, la Pléiade, Gallimard 1961

[ égoïsme éclairé ]

 

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déclarations d'amour

Je sortais du lit, ma chère, quand votre lettre me fut rendue, il était cinq heures du matin. On donnera La Prude le vendredi de la semaine prochaine, c'est-à-dire le 15 décembre. Venez, ma chère, et soyez mon juge. je voudrais que votre frère put la voir. Venez avec tous vos amis et toute votre famille. Mais je me flatte de vous embrasser avant que n'arrive ce grand jour de divertissements. je vous aime, ma chère, plus que toutes les comédies, et plus que toute autre consolation. ( ... ) Je vous embrasse mille fois. Mon âme embrasse la vôtre, mon vit et mon coeur sont amoureux de vous. J'embrasse votre gentil cul et toute votre adorable personne.

Auteur: Voltaire

Info: à Marie-Louise Denis 7 décembre 1747

 

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complexité

Faut-il que ce qui fait le plus d'honneur à l'esprit humain soit souvent ce qui est le moins utile ?... Un homme avec les quatre règles d'arithmétique et du bon sens devient un grand négociant, un Jacques Coeur, un Delmet, un Bernard, tandis qu'un pauvre algébriste passe sa vie à chercher dans les nombres des rapports et des propriétés étonnantes, mais sans usage, et qui ne lui apprendront pas ce que c'est que le change. Tous les arts sont à peu près dans ce cas ; il y a un point passé lequel les recherches ne sont plus que pour la curiosité : ces vérités ingénieuses et inutiles ressemblent à des étoiles qui, placées trop loin de nous, ne nous donnent point de clarté.

Auteur: Voltaire

Info: Lettres Philosophiques/Mélanges, la Pléiade/nrf 1961<p.103>

[ rebutante ] [ inutile ]

 

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économie

La guerre et le commerce ne sont que deux moyens différents d'arriver au même but, celui de posséder ce que l'on désire. Le commerce n'est autre chose qu'un hommage rendu à la force du possesseur par l'aspirant à la possession. C'est une tentative pour obtenir de gré à gré ce qu'on n'espère plus conquérir par la violence. Un homme qui serait toujours le plus fort n'aurait jamais l'idée du commerce. C'est l'expérience qui, en lui prouvant que la guerre, c'est-à-dire, l'emploi de sa force contre la force d'autrui, est exposée à diverses résistances et à divers échecs, le porte à recourir au commerce, c'est-à-dire, à un moyen plus doux et plus sûr d'engager l'intérêt des autres à consentir à ce qui convient à son intérêt.

Auteur: Voltaire

Info: Idées républicaines <p.87>

 

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penser

Il est bien triste d'avoir des idées et de ne savoir pas au juste la nature des idées.
Je l'avoue ; mais il est bien plus triste et beaucoup plus sot de croire savoir ce que l'on ne sait pas. Mais, si vous ne savez pas positivement ce que c'est qu'une idée, si vous ignorez d'où elles viennent, vous savez du moins par où elles vous viennent ?
Oui, comme les anciens Egyptiens, qui ne connaissant pas la source du Nil, savaient très bien que les eaux du Nil leur arrivaient par le lit de ce fleuve. Nous savons très bien que les idées nous viennent par les sens ; mais nous ignorons toujours d'où elles partent. La source de ce Nil ne sera jamais découverte.

Auteur: Voltaire

Info: Dictionnaire philosophique, Garnier 1967.<p.555-556>

 

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pouvoir

La politique est le moyen pour des hommes et des femmes sans principes, de diriger des hommes et des femmes sans mémoire (…)

Il y a deux types de voleurs:

Le voleur ordinaire, c’est celui qui vole votre argent, votre portefeuille, votre montre, etc.

Et il y a le voleur politique: celui qui vous vole votre avenir, votre éducation, votre santé, votre sourire.

La grande différence entre ces deux types de voleurs, c’est que le voleur ordinaire vous choisit pour vous voler, alors que le voleur politique, c’est vous qui le choisissez pour qu’il vous vole.

Et l’autre grande différence: c’est que le voleur ordinaire est traqué par la police, tandis que le voleur politique est le plus souvent protégé par un convoi de police.

Auteur: Voltaire

Info:

[ chiasme ] [ démocratie ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

finalité

Je sais bien que plusieurs philosophes, et surtout Lucrèce, ont nié les causes finales ; et je sais que Lucrèce, quoique peu châtié, est un très grand poète dans ses descriptions et dans sa morale ; mais en philosophie, il me paraît, je l'avoue, fort au-dessous d'un portier de collège et d'un bedeau de paroisse. Affirmer que ni l'oeil n'est fait pour voir, ni l'oreille pour entendre, ni l'estomac pour digérer, n'est-ce pas là la plus énorme absurdité, la plus révoltante folie qui soit jamais tombée dans l'esprit humain ? Tout douteur que je suis, cette démence me parait évidente et je le dis. Pour moi, je ne vois dans la nature comme dans les arts, que des causes finales ; et je crois un pommier fait pour porter des pommes comme je crois une montre faite pour marquer l'heure.

Auteur: Voltaire

Info: Dictionnaire philosophique, Garnier 1967.<p.512>

 

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réparties

Albrecht von Haller était un austère médecin bernois, fameux pour son immense érudition. Voltaire ne manquait jamais une occasion d'ironiser à son propos. Mais dans l'intimité. Car, réfugié à Genève, il avait besoin de son appui. De bons amis s'empressaient de rendre publics les propos privés. Sans réaction de la part du savant.
- Puisqu'il est en ville, pourquoi n'allez-vous pas lui rendre la monnaie de sa pièce ? finit par lui demander l'un des "bons amis".
- C'est que si monsieur de Voltaire est un homme qui mérite d'être connu, bien des gens, malgré les lois de la physique, l'ont trouvé plus grand de loin que de près. Toujours à la recherche de la dispute, les mêmes bons amis courent alors chez Voltaire pour l'exciter contre Haller.
- Comment pouvez-vous dire tant de bien de Haller alors qu'il dit tant de mal de vous ?
- Ah ! s'écria Voltaire, c'est probablement parce que nous nous trompons tous les deux.

Auteur: Voltaire

Info:

 

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morale

Origine du mal. On dit à un soldat pour l'encourager : "Songe que tu es du régiment de Champagne." On devrait dire à chaque individu : "Souviens-toi de ta dignité d'homme." Et en effet, malgré qu'on en ait, on en revient toujours là ; car que veut dire ce mot si fréquemment employé chez toutes les nations, rentrez en vous-même ? Si vous étiez né enfant du diable, si votre origine était criminelle, si votre sang était formé d'une liqueur infernale, ce mot rentrez en vous-même signifierait : consultez, suivez votre nature diabolique, soyez imposteur, voleur, assassin, c'est la loi de votre père. L'homme n'est point né méchant ; il le devient, comme il devient malade. Des médecins se présentent et lui disent : "vous êtes né malade." Il est bien sûr que ces médecins, quelque chose qu'ils disent et qu'ils fassent, ne le guériront pas si sa maladie est inhérente à sa nature ; et ces raisonneurs sont très malades eux-mêmes.

Auteur: Voltaire

Info: Dictionnaire philosophique, Garnier 1967, p.301-302

[ éthique ]

 

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dernières paroles

Voici le plus fort de tous les suicides, celui de Thérèse Lortet et de son amant Gian Faldoni. Il vient de s'exécuter à Lyon, au mois de juin.
Un jeune homme très connu, beau, bien fait, aimable, plein de talents, est amoureux d'une jeune fille que les parents ne veulent point lui donner. Jusqu'ici ce n'est que la première scène d'une comédie, mais l'étonnante tragédie va suivre.
L'amant se rompt une veine par un effort. Les chirurgiens lui disent qu'il n'y a point de remède : sa maîtresse lui donne un rendez-vous avec deux pistolets et deux poignards afin que si les pistolets manquent leur coup, les deux poignards servent à leur percer le coeur en même temps.
Ils s'embrassent pour la dernière fois ; les détentes des pistolets étaient attachées à des rubans couleur de rose ; l'amant tient le ruban du pistolet de sa maîtresse ; elle tient le ruban du pistolet de son amant. Tous deux tirent à un signal donné, tous deux tombent au même instant.

Auteur: Voltaire

Info: Dictionnaire Philosophique, Précis de quelques suicides singuliers

 

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