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félicité

Le bonheur de demain n'existe pas. Le bonheur, c'est tout de suite ou jamais. Ce n'est pas organiser, enrichir, dorer, capitonner la vie, mais savoir la goûter à tout instant. C'est la joie de vivre, quelles que soient l'organisation et les circonstances.

Auteur: Barjavel René

Info: Si j'étais Dieu

[ attitude ] [ présent ]

 
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humanité

[...] parce que les hommes sont des hommes, c'est-à-dire des êtres chez qui le mal domine le bien, parce que le progrès moral de ces hommes est loin d'avoir été aussi rapide que le progrès de leur science, ils tournent celle-ci vers la destruction.

Auteur: Barjavel René

Info:

[ pessimisme ]

 

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ouverture

La science-fiction, ce n'est pas un "genre" littéraire, c'est tous les genres, c'est le lyrisme, la satire, l'analyse, la morale, la métaphysique, l'épopée. Ce sont toutes les activités de l'esprit humain en action dans les horizons sans limites. C'est en ce moment la seule littérature vivante du monde entier.

Auteur: Barjavel René

Info:

[ littérature ]

 

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femmes-hommes

Les femmes aiment que l'homme qui les aime, pendant qu'il les aime, leur donne un nom de nuit. C'est la marque de leur entente, la clé secrète du langage de l'amour que l'on parle à voix basse, quand chaque mot qui ne signifie rien dit tout. Et s'il arrive que ce nom de nuit échappe aux lèvres de l'homme pendant les heures diurnes, la femme sent tout à coup la chaleur de son sang dans son corps.

Auteur: Barjavel René

Info: Colomb de la lune, Folio no 955

[ femmes-par-hommes ] [ Rallumée ]

 

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série télévisée

La traversée, chaque soir, de ces cinq minutes de shadoks me décape de la hargne et de l’éreintement accumulés dans la journée. Je m’assieds fourbu, grognant contre le monde entier, ils arrivent, la voix de Piéplu me passe la cervelle au papier de verre, j’écoute, je regarde, je les vois, je me vois, je nous vois, acharnés toute notre vie à pomper le vide et à marcher les pieds en l’air. Je ris, j’en pleure, de nous voir si bêtes, et de savoir que je continuerai demain à l’être autant et sans doute encore plus. Ils s’en vont, ça va mieux, j’ai le plexus assoupli et la matière grise décalaminée.

Auteur: Barjavel René

Info: Le Journal du Dimanche, rubrique "Moi téléspectateur", 23 février 1969

[ mise en abyme ] [ avis ] [ émotion ] [ absurde ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

docteur

Je l'ai [Dr Paul Carton] rencontré, une fois. Jeune père, je ne comprenais pas pourquoi mes deux enfants (dix-huit mois et six mois) ne sortaient d'une otite que pour entrer dans une rhinopharyngite ou vice versa. Ils étaient surveillés par un excellent pédiatre dont nous suivions méticuleusement les conseils alimentaires. Et ils continuaient d'être malades et de souffrir. C'est à cette époque que je perdis le sommeil. Je guettais dans la nuit le premier pleur de ma fille ou de mon fils. Je sautais aussitôt hors du lit pour prendre mon bébé dans les bras, le bercer, lui parler doucement, essayer de le calmer et de le distraire de son mal. Il continuait de pleurer en frottant son oreille de son petit poing fermé. La souffrance d'un enfant est horrible. Il ne sait pas, il ne comprend pas, il subit cette chose atroce qui s'est installée en lui et le déchire, et les parents ne peuvent rien faire pour le soulager. J'aurais voulu prendre son mal, souffrir de la tête aux pieds pourvu qu'il fût délivré. Mais ce genre de substitution ne fonctionne pas. C'est dommage.

Ma femme me relayait jusqu'à ce que, épuisés tous les trois, nous sombrions dans le sommeil. D'où nous tirait une nouvelle morsure de la bête tapie dans la petite tête, et le cri stupéfait de sa victime...

Au matin, le pédiatre alerté accourait et perçait le tympan. Tout le monde était enfin soulagé ! Le petit malade retrouvait le sourire. Ses parents aussi. Trois jours après, c'était l'autre oreille...

Un ami me conseilla de consulter le Dr Carton. Il habitait Brévannes et recevait peu de clientèle. Je lui écrivis pour lui demander rendez-vous. Il me répondit de lui envoyer d'abord la liste minutieuse de toutes les nourritures et boissons avalées par nos enfants pendant une semaine. Ce que nous fîmes. Puis nous lui conduisîmes les bébés.

C'était un homme d'aspect sévère, pourvu d'une longue barbe blanche. Il nous reçut dans son bureau un peu sombre, nous fit asseoir, prit sur la table une feuille de papier sur laquelle je reconnus mon écriture - c'était ma "liste alimentaire !" - , l'agita vers nous, et prononça ces mots que je n'oublierai jamais :

- Vous êtes des assassins !

C'était excessif, mais exact. Nous étions en train, en suivant les conseils de la pédiatre moderne, non pas de tuer nos enfants qui avaient une solide résistance, mais de les torturer, en croyant agir pour leur bien.

Il nous garda plus d'une heure, pour nous expliquer l'évidence, nous conseilla de lire deux de ses livres, nous dit le prix de sa consultation, qui était élevé, et s'en excusa en précisant qu'il prenait cher parce qu'il ne revoyait plus ses clients...

- Vous n'aurez plus besoin de me consulter.

C'était vrai. Nous suivîmes ses prescriptions, qui ne comportaient aucun médicament, et nos enfants ne furent plus jamais malades. Nous les avions tout simplement remis à un régime naturel et de bon sens.

C'était à la fin des années 30. Il était de mode, alors, d'administrer trop tôt aux bébés des nourritures trop riches. Leur organisme ne pouvait pas les assimiler, accumulait les toxines, et s'en débarrasser au moyen de maladies qui étaient des crises de "nettoyage". Je crains que cette mode ne continue, quand j'entends, l'hiver, des jeunes mères parler d'otites...[...]

Carton a réinventé la nourriture et la médecine naturelles. Il les avait baptisées "naturistes". Il a rejeté ce mot avec horreur quand le naturisme est devenu synonyme de nudisme! Pendant qu'il se battait contre les laboratoires pharmaceutiques, contre les industriels du sucre et des bonbons, contre les pontes de la médecine classique, des hommes astucieux commençaient déjà à le piller, de son vivant.

Dans son livre essentiel, La Cuisine simple, il n'est pas un seul menu qui ne comporte une salade de légumes crus. C'était avant l'invention industrielle des "vitamines". Un de ses élèves est devenu milliardaire et célèbre en fabriquant des produits dits "diététiques" qui se vendent dans le monde entier. Il n'a jamais cité le nom de son maître. Tous les "diététiciens" et les "nutritionnistes" - quels mots horribles! - l'ont piraté, lui prenant quelques miettes de vérité qu'ils ont mélangées à des montagnes d'erreur pour les commercialiser.

Les innombrables boutiques qui vendent aujourd'hui des produits dits "naturels" ou "de régime" ont germé sur le cartonisme, se nourrissant de lui sans même le connaître.

Carton est mort pauvre, toujours furieux, toujours combattant. Il avait fait une chute de six mètres alors qu'il cueillait des cerises. Côtes brisées, décalcifié, colonne vertébrale tordue, il s'enferma dans un corset aux baleines de fer, pour pouvoir continuer à recevoir un client par jour, et rester utile jusqu'à sa fin.

Auteur: Barjavel René

Info: Demain le paradis, Denoël, pp. 31-32

[ vocation ] [ biographie ] [ dévouement ] [ portrait ]

 
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Ajouté à la BD par Coli Masson