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dépendance

"Ah ! c’est bon, n’est-ce pas ? d’être sous l’aile du pouvoir. On y est mieux que sous l’aile de Jésus-Christ. Car il y en a d’autres, peut-être, pour qui obéir en aveugle est une attitude doctrinale, contestable, mais du moins religieuse et sincère. Pour vous, obéir, c’est être quoi qu’il arrive la protégée du pouvoir. Du pouvoir qui vous fera abbesse. Car on veut obéir, mais c’est qu’on veut commander. Obéir aux grands, pour commander aux petits, et leur commander à sa guise. Notre liberté à nous est celle des enfants de Dieu : elle nous mène aux prisons. La vôtre est la liberté des enfants de Bélial : pouvoir faire n’importe quoi, parce qu’on le fera toujours impunément. "

Auteur: Montherlant Henry de

Info: Port-Royal, page 135, éditions Gallimard, 1954

[ contrainte ] [ confort ] [ sacré vs profane ] [ religieux vs politique. ]

 
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soirée familiale

Tout ce temps, M. Elie malaxait une boulette de mie de pain qu’il avait rapportée du restaurant, boulette que sa salive et la saleté de ses doigts avaient rendue si noire et si brillante qu’on l’eût prise pour une boulette de goudron. À certain moment, il s’arrêta net dans une évocation sentimentale qu’il était en train de faire, et se mit à fureter sous les meubles, avec des yeux hagards. "Qu’est-ce qu’il y a, l’oncle ?" demanda Léon, inquiet. "J’ai perdu ma boulette", dit le vieux, le visage bouleversé. Léon, s’agenouillant, la chercha avec lui. Quand il l’eut aperçue, il eut une courte hésitation : puis il songea que c’était son dernier soir auprès de son oncle, et au nom du passé, au nom de la famille, au nom du souvenir de sa mère, il ramassa l’immonde petite chose et la lui tendit.

Auteur: Montherlant Henry de

Info: Dans "Les Célibataires", éditions Grasset, Paris, 1934, page 244

[ tendresse cachée ] [ dégoût ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

triangle amoureux

Le troisième être était surtout le lapin en peluche, posé sur l’oreiller contre la tête de Solange ; fort pelé et poussiéreux, […] avec une de ses oreilles lui retombant sur le museau, et un de ses yeux remplacé par un bouton de bottine. Souvent Costals le baisait au lieu de Solange, à moins qu’ils n’unissent leurs trois bouches : Costals, qui connaissait son génie, savait bien pourquoi il l’avait priée de s’adjoindre de ce lapin. (D’autres fois, il lui arrivait de faire porter à ses amis, durant les caresses, des têtes de carnaval représentant des têtes d’animaux. Combien alors il les dépassait ! bondissait hors des limites étroites de ce sexe !) Il le mêla si fort à leurs jeux qu’un moment vint où le lapin envahit complètement son imagination, en chassant Solange. Sa volupté prit alors un caractère religieux […].

Auteur: Montherlant Henry de

Info: Les jeunes filles, tome 3 : Le démon du bien

[ fétiche ] [ doudou ]

 
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Ajouté à la BD par miguel

jansénisme

Le nom de Port-Royal éveille peut-être une certaine résonance chez les Français de 1954. N’en demandons pas plus : ces Français, même catholiques, ignorent les problèmes de Port-Royal à un point incroyable, et s’ils en ont une teinte, ne sont pas touchés par eux. Du moins l’opinion, si peu qu’elle sache, s’est-elle mise du côté de la souffrance ; car il y eut bien un côté de la souffrance : quoi qu’on puisse penser en faveur des ennemis de Port-Royal, chez eux on ne souffrait pas. Sainte-Beuve écrit que les filles de Port-Royal poussaient les choses au mélodramatique. C’est imaginer avec trop peu de nerfs une histoire dont maint trait fut affreux. L’opinion serait plus encore de ce "côté de la souffrance" si elle réalisait combien la persécution fut alors semblable à celles d’aujourd’hui ; à quel point les Jansénistes sont des frères et des sœurs pour les Européens d’aujourd’hui.

Auteur: Montherlant Henry de

Info: Notes de théâtre, Port-Royal, Editions Gallimard, 1954, page 172

[ actualité ] [ minimisation ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

torpeur collective

Des radio-je-ne-sais-quoi déversaient une sorte de vomissement musical, comme si tous les dîneurs des restaurants s’étaient mis à rendre de "concert" une sorte de guimauve sans nom, sans sexe et sans âge, musique de limbes, bonne pour faire danser les ombres, au ralenti, sur les prés d’outre-tombe. Il n’y avait aucune poussée vitale ni vers le bien ni vers le mal, dans cette foule où la jeunesse elle-même n’était pas la jeunesse, rien d’instinctif, rien de vigoureux, et seulement rien de naturel dans cette foule aux visages de filles, où les plus mâles des mâles eux-mêmes se tuaient entre eux avec l’arme des femmes : cette masse exsangue, c’est un grouillement de vers blancs dans une feuillée. Tout homme en bonne santé, devant ce spectacle, ne pouvait avoir qu’un cri : ou Jésus-Christ, ou Sardanapale, mais pas ça ! Balzac appelle Paris "un grand chancre" : l’impression était plutôt celle d’un grand mal blanc.

Auteur: Montherlant Henry de

Info: Dans "Les Célibataires", éditions Grasset, Paris, 1934, page 188

[ vie opératoire ] [ anesthésie générale ] [ muzak ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

jansénisme

La réalité est que don Alvaro et ses pareils – la race des durs – sont une des "familles spirituelles" du christianisme : ils en font partie tout autant que la race des doux. Une fois de plus, il n’y a pas à choisir. […] je retrouve la race des intransigeants, voire des farouches, d’abord dans le christianisme primitif, où elle règne et donne le ton, et puis dans l’histoire du christianisme français, dans l’histoire du christianisme allemand, dans l’histoire du christianisme italien, presque autant qu’en Espagne : les exemples en surabondent. […] Il n’est pas supportable d’imaginer que cette race des intransigeants puisse être exclue de la communion qu’elle chérit, parce qu’elle en a suivi la loi avec trop de pureté et de vigueur, parce qu’elle a pris à la lettre ce qui n’est pour ses frères heureux qu’une rhétorique anodine et futile. Cette race, la mauvaise conscience des chrétiens de la compromission la persécute incessamment sur la terre. Persécutée incessamment sur la terre, elle prend sa revanche aux cieux.

Auteur: Montherlant Henry de

Info: Notes de théâtre, Port-Royal, Editions Gallimard, 1954, page 151

[ radicalisme ] [ nécessité ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

routine

Il se réveillait à neuf heures, et restait au lit jusqu’à dix heures et demie, lisant, tripotant les chats, et se farfouillant dans le nez. A honze heures, il faisait un tour dans le quartier jusqu’à l’heure du déjeuner, et alors rentrait. Après le déjeuner, il lisait un peu, puis se promenait dans Paris de trois à sept, bouquinant chez les revendeurs, et allant de café en café. Jamais il ne prenait un repas au restaurant, malgré l’envie qu’il en avait parfois, parce que sa pension était payée à la maison. Jamais il ne fit un voyage de huit jours. Jamais il ne sortait le soir, et jamais n’était invité. Par sauvagerie et horreur de se contraindre, il avait quitté le monde, n’avait plus été voir les gens qu’aux heures où il savait ne les trouver pas ; ensuite, comme il arrive, le monde le quitta, et tandis qu’au début il n’y allait pas par fantaisie d’humeur, un temps vint où s’y ajouta cette raison, qu’il craignait d’y être humilié.

Auteur: Montherlant Henry de

Info: Dans "Les Célibataires", éditions Grasset, Paris, 1934, page 51

[ isolement ] [ emploi du temps ]

 
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femmes-par-homme

La femme, au contraire, se fait une idée positive du bonheur. C’est que, si l’homme est plus agité, la femme est plus vivante. Ah ! ce n’est pas elle qui demandera, comme le jeune homme de tout à l’heure : "Qu’est-ce que vous entendez par vivre ?" Elle n’a pas besoin d’explications. Vivre pour elle, c’est sentir. Toutes les femmes préfèrent se consumer en brûlant, à être éteintes ; toutes les femmes préfèrent être dévorées, à être dédaignées. Et dans ce "sentir" quelle mobilité, quelle ampleur des réactions ! Quand on voit qu’une femme, si l’homme qu’elle aime semble l’aimer moins – ne fût-ce qu’un peu moins – souffre autant que s’il ne l’aimait pas du tout ; quand on voit qu’ensuite, si elle reconnait qu’il l’aime autant, non seulement elle en éprouve une joie merveilleuse, mais elle ajoute à sa joie cette nouvelle joie, de se faire pardonner de l’avoir soupçonné, quand on voit cela, et qu’on voit en regard la lourdeur des hommes, on donne un sens au mot vivant.

Auteur: Montherlant Henry de

Info: Les jeunes filles (I/IV) : Les Jeunes filles

[ empathiques ] [ charnelles ] [ sensitives ]

 

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jansénisme

Le Pape condamne cinq propositions hérétiques dans le livre de Jansénius. Moi qui suis votre Supérieur légitime, je vous affirme qu’elles y sont. Cependant vous n’en croyez rien. Vous préférez les lumières de vos Messieurs, et vous y brûler comme les papillons aux chandelles. Ceux que vous croyez, ce sont eux, qui vous disent que les propositions ne sont pas dans Jansénius ; que le Pape l’a condamné sans savoir ce qu’il faisait ; qu’il s’est laissé mener par le nez ; qu’il a été acheté par les Jésuites ; que cela leur a coûté bien cher. Voilà les sornettes qu’ils vous débitent, et vous croyez ces gens-là, qui n’ont ni caractère ni pouvoir dans l’Eglise, ni autorité sur vous ; vous optez pour leur jugement contre celui du Pape et de toute l’Eglise. Et pourquoi ? Il n’y a pas de raison, sinon qu’il faut jouer aux martyrs : oh ! que cela est beau, d’être un peu opprimé ! Et moi je vous dis que tout cela est pitoyable, et que vous êtes de pauvres filles, à l’esprit faux, vain et buté. (Un temps) Vous ne répondez rien ?

Auteur: Montherlant Henry de

Info: Port-Royal, Editions Gallimard, 1954, pages 93-94

[ point de vue institutionnel ]

 

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jugement dernier

A cette heure, il y avait aussi, partout, des hommes qui arrivaient en vue de la mort. Ceux qui s’étaient gouvernés par des principes, et ceux qui, mollement, s’étaient abandonnés aux hasards, ceux qui s’étaient torturés pour rien et ceux qui n’avaient eu d’autre souci que jouir, ceux qui avaient fait le mal et ceux qui ne l’avaient pas fait, tous, quand ils arrivaient en vue de la Grande Muraille, prenaient entre eux une ressemblance qui était un aveu. On ne voyait plus bien en quoi ils différaient et avaient différé les uns des autres. On voyait moins encore à quoi il leur avait servi de chercher à différer, de chercher à dépasser, de vouloir ceci plutôt que cela, de croire ceci plutôt que cela ; tout cela, en fin de compte, était la même chose ; cela n’avait été, pour les uns comme pour les autres, qu’une façon de passer le temps, et maintenant ces hommes, qui avaient marché disséminés et hostiles, se rapprochaient et se groupaient comme font des hommes qui sont obligés de passer par la même porte.

Auteur: Montherlant Henry de

Info: Dans "Les Célibataires", éditions Grasset, Paris, 1934, pages 295-296

[ absurdité ] [ indifférenciation ]

 

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